Intervention de Aymeric DUROX

Réunion du 1er décembre 2023 à 9h00
Loi de finances pour 2024 — Enseignement scolaire

Photo de Aymeric DUROXAymeric DUROX :

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, « le peuple qui a les meilleures écoles est le premier peuple ; s’il ne l’est pas aujourd’hui, il le sera demain. » Ainsi parlait Jules Simon, philosophe, sénateur, et l’un de vos lointains prédécesseurs à la tête du ministère de l’instruction publique, au tout début de la Troisième République.

Que dirait-il aujourd’hui de notre nation, au vu des résultats catastrophiques de la dernière évaluation nationale de jeunes élèves entrant en quatrième en 2023, réalisée dans 7 039 établissements sur un panel de 795 000 collégiens ? Selon ses conclusions, 53 % de ces élèves ne maîtrisent pas les compétences élémentaires requises en français, un chiffre qui atteint 55 % pour les mathématiques.

Quand je dis élémentaires, je pèse mes mots : à titre d’exemple, la première question de l’évaluation en mathématiques demande de calculer 14 – 6. Quatre réponses sont proposées : 6, 9, 8 et 7. Je ne vous ferai pas l’injure, monsieur le ministre, de vous donner la bonne. La deuxième question demande combien vaut la moitié de 70, présentant toujours un choix entre quatre réponses.

Tout le reste est pathétiquement à l’avenant.

Il s’agit de questions de niveau théorique CE2 ou CM1, auxquelles près de six élèves de quatrième sur dix échouent à répondre correctement.

Dans les établissements classés en éducation prioritaire, la situation est bien pire : 80 % des élèves ne comprennent pas la langue française et 83, 5 % ignorent les bases du calcul. Les trois quarts des élèves présentant un retard scolaire ne savent ni lire ni compter.

Le professeur d’histoire-géographie que j’étais il y a encore deux mois se souvient avec effarement des fautes d’orthographe et du niveau de culture générale moyen en seconde, notamment, une classe où tous les élèves parviennent, puisqu’il n’y a plus de sélection après la troisième depuis belle lurette.

Il n’y a d’ailleurs presque plus de sélection non plus à l’issue de la seconde, en conséquence, tout le monde, ou presque, obtient le baccalauréat, mais celui-ci ne vaut plus rien et l’on entretient son mythe en mentant aux élèves.

Pourtant, le budget que vous présentez est en hausse de 3, 9 milliards d’euros, soit 29 % d’augmentation en sept ans, pour un total de 64 milliards d’euros pour 12 millions d’écoliers. Ajoutons que les dépenses éducatives atteignent, en tout, près de 170 milliards d’euros, un chiffre largement supérieur à la moyenne de l’OCDE.

La question est simple, monsieur le ministre : où va ce « pognon de dingue » ? Comment peut-on obtenir des résultats si médiocres en y consacrant une telle proportion de la richesse nationale ?

Je n’insiste pas sur tous les autres problèmes de l’école, tout aussi importants, qui ont été plus ou moins décrits par mes prédécesseurs : l’ultraviolence, le communautarisme, la radicalisation, le harcèlement, le déclassement continu des enseignants, le manque criant d’attractivité du métier, la bureaucratisation étouffante, le management libéral déshumanisant. Bref, la coupe est pleine.

Il faut un véritable plan Marshall – que dis-je, un plan Messmer, pour parler français – afin de sauver la jeunesse de notre pays.

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