Intervention de Jacques Blanc

Réunion du 12 mai 2005 à 21h45
Protocoles d'application de la convention alpine dans le domaine de la protection de la nature — Adoption d'un projet de loi

Photo de Jacques BlancJacques Blanc, rapporteur :

Les protocoles relatifs à la protection de la nature et l'entretien des paysages et à la protection des sols sont plus particulièrement axés sur la protection de l'environnement. Ils prévoient le recensement exhaustif des zones ou espèces sensibles et encouragent leur protection, en particulier dans le cadre des espaces protégés, comme les parcs nationaux ou régionaux, les parcs nationaux devant eux-mêmes - et le projet de loi doit le leur permettre - associer bien davantage les populations, surtout dans le cas des parcs nationaux habités.

Le protocole sur l'aménagement du territoire et le développement durable fixe les grandes lignes des politiques à suivre en la matière. Le renforcement de l'action des collectivités territoriales, j'y insiste, conformément au principe de subsidiarité, est mis en exergue. Le protocole reconnaît la légitimité de mesures d'aide spécifiques aux zones de montagne, visant à compenser les handicaps naturels ou les restrictions liées à la protection de l'environnement et à maintenir les activités économiques et les services publics.

Au passage, il convient de rappeler que c'est l'Europe qui a pris la première mesure de protection des sols, à travers l'indemnité spéciale montagne, qui a permis de maintenir des élevages en montagne évitant ainsi la dégradation des sols. A l'heure où l'on discute beaucoup de l'Europe, il est intéressant de le rappeler. Hommage soit rendu à l'Europe !

Les protocoles sur l'exploitation forestière, l'énergie et le tourisme reconnaissent pleinement la contribution de ces activités à l'économie alpine et au maintien de la population locale.

Enfin, le protocole sur les transports a donné lieu à de longues négociations et n'a été adopté qu'en octobre 2000. Les Etats alpins ont reconnu la nécessité d'agir face aux nuisances et à la dégradation de l'environnement engendrées par l'accroissement considérable du trafic transalpin durant les vingt dernières années. Il s'agissait surtout de concilier cet impératif avec le souhait des populations locales de pouvoir bénéficier d'infrastructures de qualité, propices au désenclavement et au maintien de l'activité économique. Par ailleurs, il n'était pas concevable de remettre en cause l'existence même d'un transit international vital pour certains pays, notamment l'Italie.

Le protocole « transports » affirme la priorité à accorder au transport ferroviaire dans les Alpes, ce qui légitime - ô combien ! - le projet de nouvelle ligne ferroviaire Lyon-Turin établi par les gouvernements français et italien et qui faisait partie des grands projets retenus par le groupe de travail dirigé par M. Christophersen. Ce projet s'articule d'ailleurs avec la ligne TGV allant jusqu'à Barcelone, qui sera d'actualité le 23 mai prochain.

Parallèlement à la priorité donnée aux transports ferroviaires, le protocole retient également - et vous voyez que l'on retrouve la réalité méditerranéenne - le développement du transport maritime et du cabotage comme alternative au transport terrestre, le renoncement à tout nouveau projet de route à grand débit pour le trafic de transit international, l'encadrement strict des nouveaux projets de routes à grand débit pour le trafic intra-alpin. Enfin, le protocole prévoit l'introduction progressive d'une tarification spécifique permettant de facturer à l'usager l'ensemble des coûts des infrastructures alpines, y compris les coûts externes liés à l'impact environnemental.

La France effectuera une déclaration interprétative visant à tenir compte des projets routiers dont le principe était acquis au moment de la signature du protocole, en octobre 2000, et qu'il reste à réaliser. Protéger l'environnement ne signifie pas pour autant que l'on doit empêcher les circulations ; on doit les maîtriser. C'est vraiment le résultat d'une approche équilibrée entre la protection et le développement.

En conclusion, on peut rappeler que la France dispose déjà, dans sa législation, de tous les instruments lui permettant de mettre en oeuvre la convention alpine et ses protocoles, en particulier la loi « montagne » et les différents textes en matière de protection de l'environnement, d'urbanisme et d'aménagement du territoire.

L'adoption de la convention et des protocoles s'est échelonnée sur plus de dix ans. Il importe désormais de donner corps à cette ambition, pour accentuer la protection des Alpes mais également pour répondre aux attentes de la population du massif.

Il faudra pour cela mieux intégrer dans nos politiques les différents objectifs énoncés par les protocoles. Je constate que, dans une large mesure, ces objectifs s'accordent parfaitement avec les propositions formulées voilà trois ans, au Sénat, par la mission d'information sur l'avenir de la montagne que j'ai eu l'honneur de présider et dont le rapporteur était notre ami Jean-Paul Amoudry. Notre rapport s'intitulait : « Un développement équilibré dans un environnement préservé » ; c'est bien ce qui est recherché à travers la mise en place d'une coopération internationale à l'échelle de tout le massif alpin.

Soulignons également que l'Union européenne est partie à la convention alpine. Il est donc nécessaire de prendre en compte, dans les politiques européennes, la spécificité de l'espace alpin comme celle de l'ensemble des zones de montagne.

Je suis de ceux qui espèrent que l'élan qui sera donné à la construction européenne permettra de mettre en oeuvre une politique européenne nouvelle de compensation des handicaps au sein des régions, comme l'Europe avait déjà su le faire dans le cadre de l'objectif 5b, afin de promouvoir une vraie politique d'aménagement du territoire.

Sous réserve de ces observations, la commission des affaires étrangères vous demande, mes chers collègues, d'approuver le projet de loi autorisant la ratification par la France des sept protocoles d'application de la convention alpine. Nous montrerons par là même qu'il n'y a pas d'opposition entre protection de l'environnement et développement, mais qu'il est au contraire possible de mettre en oeuvre un développement équilibré et respectueux du capital naturel que constitue ce merveilleux massif alpin dans sa dimension méditerranéenne.

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