Intervention de Jean Desessard

Réunion du 12 mai 2005 à 21h45
Protocoles d'application de la convention alpine dans le domaine de la protection de la nature — Adoption d'un projet de loi

Photo de Jean DesessardJean Desessard :

Monsieur le président, mes chers collègues, M. le secrétaire d'Etat et M. le rapporteur ont expliqué l'intérêt écologique de la convention alpine. Or il y a un « hic » : le projet de déclaration que le Gouvernement a pour ambition d'annexer au protocole « transports » de la convention alpine.

Selon ce projet de déclaration, neuf projets d'infrastructures routières seraient exclus de l'article 11 du protocole « transports », parmi lesquels l'axe Grenoble-Sisteron.

Cet article 11 dispose en effet que « les parties contractantes s'abstiennent de construire de nouvelles routes à grand débit pour le trafic transalpin », et encadre strictement la réalisation de projets routiers à grand débit interalpin.

Autrement dit, l'article 11 conditionne strictement la réalisation de nouvelles infrastructures routières dans les vallées alpines pour des raisons écologiques et environnementales qui sous-tendent la convention alpine.

Cependant, soustrait à l'article 11 du protocole « transports », et donc à la convention alpine, l'axe Grenoble-Sisteron échappe aux exigences de protection et de préservation de l'espace alpin. Ce faisant, il semblerait, monsieur le secrétaire d'Etat, que vous condamniez définitivement toute alternative au « tout autoroutier » pour la réalisation de cette liaison.

En effet, à l'origine, trois possibilités avaient été proposées pour réaliser la liaison Grenoble-Sisteron : un aménagement des deux nationales - option qui avait notre préférence -, un aménagement autoroutier de l'A51 passant à l'est de Gap, et un autre par le col de Lus-la-Croix-Haute.

Lors du comité interministériel d'aménagement et du développement du territoire du 18 décembre 2003, le Gouvernement a retenu la seconde hypothèse. Mais, avec la convention alpine, cette option est fortement compromise, car elle contrevient aux dispositions environnementales qui sont inscrites. Cette déclaration est donc fort avantageuse pour les défenseurs d'un axe autoroutier entre Grenoble et Sisteron.

L'argument avancé consiste à minimiser les impacts du projet autoroutier en soutenant que celui-ci aurait pour seule vocation de relier deux villes entre elles. Certes, c'est le but de n'importe quelle route ! Mais ses auteurs ont omis de préciser qu'il s'agit là d'un axe fort structurant, avec d'importantes incidences écologiques dans un environnement fragile et à préserver.

Enfin, la liaison Grenoble-Sisteron, dans ses versions autoroutières, a bel et bien une fonction transalpine : celle-ci est établie dans le rapport Brossier de 1998. Elle est aussi renforcée par les mesures prises pour améliorer la sécurité et la maîtrise du trafic des poids lourds sous les tunnels du Mont-Blanc et du Fréjus.

L'A51 Grenoble-Sisteron-Aix-en-Provence constituera, avec le projet d'A48 Ambérieu-Bourgoin, un axe nord-sud parallèle à l'axe rhodanien A6-A7. Cet axe desservira, dans sa partie centrale, la haute vallée de la Durance et le col du Montgenèvre. Ainsi, un nouvel accès rapide à Turin s'offrira aux poids lourds provenant soit de la Méditerranée soit du nord de la France et de l'Europe.

L'importance nouvelle ainsi donnée au col du Montgenèvre pour capter les flux de marchandises risque donc de porter atteinte à l'économie globale du projet ferroviaire Lyon-Turin, pourtant reconnu comme prioritaire par la France et par l'Union européenne.

Pour toutes ces raisons, je souhaiterais, monsieur le ministre, que vous éclairiez le Sénat sur vos intentions à l'égard de ce projet de déclaration qui, s'il est adjoint au protocole « transports », entraînera une rotation non écologique et non conforme à la convention, à cause de cette liaison Grenoble-Sisteron.

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