Intervention de Jean-François Rapin

Réunion du 1er décembre 2023 à 14h30
Loi de finances pour 2024 — Recherche et enseignement supérieur

Photo de Jean-François RapinJean-François Rapin :

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, avec un montant total de 32 milliards d’euros de crédits de paiement proposés en 2024, la mission « Recherche et enseignement supérieur » est la quatrième mission du budget général. Il s’agit également d’une mission dynamique, dont le budget global devrait augmenter de 3 % cette année.

Cette dynamique est un signal important au regard de la situation dégradée de nos finances publiques, alors que le déficit du budget général est évalué à 138 milliards d’euros pour l’année 2024.

Après avoir laissé ma corapporteure évoquer dans le détail les questions qui concernent la vie étudiante et le budget des universités, je vais me concentrer sur les programmes budgétaires qui financent la recherche publique dans notre pays.

Pour commencer, je tiens à rappeler l’importance qu’a revêtue l’adoption de la loi de programmation de la recherche au mois de décembre 2020. Alors que le monde de la recherche publique traversait une période d’incertitude nourrie par un phénomène de désinvestissement progressif, il était indispensable de réaffirmer notre ambition comme acteur majeur de la recherche à l’échelle européenne et mondiale.

Cette réaffirmation a été à la fois l’objectif et l’enjeu du débat parlementaire qui s’est tenu à la fin de l’année 2020 autour de l’adoption de cette programmation pluriannuelle. Le texte adopté a adressé un signal fort de soutien aux communautés de recherche : la représentation nationale a ainsi pris l’engagement de financer la recherche publique à la hauteur de nos ambitions.

Il est nécessaire d’avoir ces éléments en tête lorsque nous examinons chaque année les projets de loi qui mettent en œuvre, depuis 2021, la programmation que nous avons adoptée.

Dans le cadre de notre examen des crédits des programmes finançant la recherche publique, je voudrais attirer votre attention sur deux aspects saillants du budget qui nous est proposé.

En premier lieu, force est de constater que les montants inscrits dans la LPR sont respectés. Même si ces montants, comme j’y reviendrai, ne tiennent pas compte de l’inflation, ils correspondent à la trajectoire prévue par la programmation.

Par conséquent, les programmes de la recherche publique bénéficient d’une hausse de 540 millions d’euros en un an. Ces moyens supplémentaires correspondent pour plus de 60 % à l’exécution des mesures inscrites dans la LPR, dont notamment des mesures d’attractivité pour les chercheurs et le recrutement de nouveaux effectifs.

À cet égard, il convient également de saluer le redressement du taux de succès des candidatures déposées auprès de l’Agence nationale de la recherche (ANR), qui a été porté de 19 % en 2020 à 24 % en 2023 grâce à l’augmentation durable de ses crédits d’intervention.

Il faut saluer le fait que la feuille de route adoptée par le Parlement soit suivie année après année ; je salue également le choix de ne pas renoncer à ces dépenses de long terme, qui auront un effet positif sur notre croissance potentielle et notre prospérité économique.

Cependant, j’aimerais, en second lieu, tempérer cette appréciation au regard de la vitesse à laquelle la conjoncture a évolué depuis l’adoption de la LPR.

Dès son examen en première lecture au Sénat, la commission des finances, dont j’avais été désigné rapporteur pour avis, avait alerté sur les incertitudes pesant sur les hypothèses sous-jacentes à la programmation. Nous avions déjà estimé qu’une programmation sur une durée particulièrement longue – dix ans – risquait d’être remise en cause en cas de renversement de la conjoncture.

C’est pour cette raison que le Sénat avait insisté pour maintenir dans la loi une clause de revoyure tous les trois ans, afin de pouvoir actualiser la programmation et la mettre en cohérence avec l’évolution de son environnement. Or nous constatons aujourd’hui que, malgré l’engagement pris par le Gouvernement à l’époque, aucun exercice d’actualisation de la programmation n’est à l’ordre du jour.

Madame la ministre, pourriez-vous dire très nettement devant cette assemblée si le Gouvernement a l’intention ou non de respecter les dispositions de l’article 3 de la LPR ? Avez-vous l’intention de réaliser un exercice d’actualisation de la programmation ? Sous quelle forme ? À quelle échéance ?

Au regard de la hausse de l’inflation liée aux bouleversements géopolitiques intervenus depuis, j’estime que le risque que nous avions identifié en 2020 était fondé et que l’actualisation de la LPR est non seulement une obligation qui résulte de son article 3, mais aussi une nécessité pour préserver les ambitions initiales que la loi avait fixées.

Enfin, sans anticiper sur les remarques que formulera le rapporteur général, qui présentera un amendement sur la participation de la trésorerie du Centre national de la recherche scientifique (CNRS) à la consolidation publique, j’aimerais insister sur un enjeu commun à ces deux sujets : la sincérité du budget que nous votons annuellement.

Depuis plusieurs années, le Gouvernement nous explique que les hausses de coûts non compensées sont couvertes par les marges de trésorerie des opérateurs de la recherche publique.

Si ces opérateurs disposent de fonds de roulement qui leur permettent d’absorber plusieurs années successives de hausse des coûts de l’énergie, tant mieux ! Mais pourquoi ces marges de trésorerie ne figurent-elles pas dans la programmation initiale ?

L’un des enjeux de l’exercice d’actualisation législative de la LPR est de dresser un état des lieux de la trésorerie et du fonds de roulement des opérateurs.

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