Intervention de Max Brisson

Réunion du 1er décembre 2023 à 14h30
Loi de finances pour 2024 — Recherche et enseignement supérieur

Photo de Max BrissonMax Brisson :

Certes, toutes les universités ne sont pas gangrénées par ces idéologies totalitaires et violentes, mais une seule le serait que ce serait déjà très grave. Nous nous devons donc sur ce point non seulement de faire preuve d’une vigilance permanente, mais encore de mener un combat politique, argument contre argument, analyse contre analyse.

Cela dit, il y a aussi des établissements où les étudiants travaillent sans être affectés par ces idéologies et ils ont alors besoin que nous leur garantissions des moyens. Sur ce point, force est de constater que ce budget répond aux besoins, avec près de 17, 5 milliards d’euros consacrés à l’enseignement supérieur.

Néanmoins, cette hausse, aussi souhaitable soit-elle, doit tout de même faire l’objet d’une mise en perspective : l’investissement national en faveur de l’enseignement supérieur est réel, mais sans éclat. Selon l’OCDE, notre effort en matière universitaire est à peine dans la moyenne des pays riches. Avec 1, 5 % de notre PIB consacré à l’enseignement supérieur, nous sommes loin derrière les États-Unis, le Canada ou le Royaume-Uni, qui lui consacrent au moins 2 %.

Au-delà des moyens, le dysfonctionnement de l’enseignement supérieur tient surtout à un système d’orientation qui révèle des faiblesses de plus en plus criantes.

Je suis donc obligé de vous réitérer mes propos de l’année dernière, madame la ministre, lorsque je vous invitais à vous rapprocher de votre collègue ministre de l’éducation nationale afin d’ouvrir enfin le chantier de l’orientation et de l’articulation lycée-licence. Actuellement, celle-ci ne fonctionne pas. L’enseignement supérieur n’a pas pris réellement la mesure du nouveau baccalauréat et bloque la mise en œuvre d’un parcours fluide et efficient de bac-3 à bac+3.

Dans un siècle d’incertitudes et de défis multiples, alors que la concurrence règne et que la course à l’innovation, dont l’issue déterminera le destin des nations, est permanente, l’environnement de la recherche dans lequel évoluent nos étudiants est primordial.

La performance de notre recherche, secteur stratégique pour la France est donc tout aussi cruciale.

Certes, la trajectoire de la LPR est respectée, mais le ratio de la dépense intérieure en recherche et développement par rapport au PIB stagne depuis plusieurs années, oscillant, dans les derniers budgets présentés, autour de 2, 2 %. Cette part est loin de l’objectif de 3 % fixé par l’agenda de Lisbonne en 2000.

De son côté, l’Allemagne a un ratio de 3 % et vise 3, 5 %, tandis que la Suède caracole en tête du classement des pays de l’Union européenne, avec un taux frôlant 3, 5 %. Je vois là le signe d’un décrochage par rapport à nos voisins et amis européens, qui ont consenti des efforts plus importants en la matière. J’y vois aussi le risque d’une difficulté à rattraper le retard qui aura été accumulé par la France au fil des années.

Je m’étonne donc des dernières déclarations du ministre de l’économie, ciblant, parmi d’autres, les organismes de recherche comme potentielles sources d’économies budgétaires. Il y a là un manque de compréhension du fonctionnement de ces derniers, doublé d’une erreur politique. C’est un manque de compréhension, parce que les réserves apparaissant dans leur fonds de roulement ne sont pas de l’argent thésaurisé, c’est la traduction d’engagements pris pour le financement pluriannuel de projets de recherche, qui sera décaissé au fur et à mesure de leur avancement.

C’est également une faute politique, parce que pareille mesure négligerait à la fois le temps long, nécessaire aux travaux de recherche, et l’importance stratégique pour la France de la recherche. Surtout, cela signifierait qu’il n’y a pas de clause de revoyure de la LPR.

Envisager de dégrader de la sorte le financement de la recherche, qui éprouve déjà des difficultés à conserver les chercheurs les plus talentueux et à financer les projets de recherche les plus ambitieux, fragiliserait encore un peu plus la souveraineté de notre pays en matière d’innovation ; nous aurons le débat sur le Conseil national de la refondation (CNR) dans quelques minutes. À croire que le ministre a omis qu’il était détenteur d’un portefeuille plus large que celui de l’économie et des finances, puisqu’il est aussi chargé de la souveraineté industrielle et numérique du pays, laquelle repose directement sur la notion fondamentale d’innovation.

Malgré ces points d’alerte, qui, je le sais, sont déjà au cœur de votre réflexion pour les prochaines années, madame la ministre, je tiens à saluer votre volontarisme pour défendre l’enseignement supérieur et la recherche. Je voterai donc, comme mes collègues du groupe Les Républicains, les crédits de cette mission, tout en restant attentif aux prochaines mesures que vous prendrez pour renforcer l’efficacité et la performance de l’enseignement supérieur et de la recherche.

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