Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, le Gouvernement présente cette année un budget en hausse de 6, 2 % pour le programme 147, « Politique de la ville ». Mais l’augmentation des crédits et la politique de la ville qui est actuellement menée sont-elles à la hauteur des enjeux, tout particulièrement après les émeutes urbaines de l’été dernier ?
La hausse des crédits est en partie en trompe-l’œil. En effet, l’Agence nationale pour la rénovation urbaine (Anru) en bénéficie quasi exclusivement ; les moyens consacrés aux autres actions diminueront en euros constants, puisqu’ils augmenteront moins vite que l’inflation.
En outre, la contribution de l’État à l’Anru suscite trois sujets d’inquiétude.
Premièrement, l’État est loin du compte, si je puis dire, car l’essentiel de la charge financière a été reporté au prochain quinquennat.
Deuxièmement, à la suite de la hausse des coûts, les communes pauvres auraient besoin d’un soutien particulier, puisque le NPNRU est une enveloppe fermée.
Troisièmement, nous sommes inquiets de l’incapacité de l’État à augmenter sa contribution à l’Anru, de même qu’à d’autres actions, comme les cités éducatives, qui risquent de mettre en péril leur avenir. Le renouvellement urbain ne peut produire des résultats que s’il est suivi d’une politique tout aussi déterminée d’accompagnement humain.
Par ailleurs, au regard des émeutes de l’été, je trouve la réponse du Gouvernement tardive et inconstante.
Elle est tardive, parce que le comité interministériel des villes (CIV), qui était attendu de longue date après avoir été repoussé plusieurs fois, n’a fait qu’entériner des propositions souvent anciennes. Certes, le Président de la République a annoncé la généralisation des cités éducatives, mais il s’agissait d’une proposition du rapport de Jean-Louis Borloo sur la situation des quartiers prioritaires de la politique de la ville, qu’il a lui-même rejeté voilà cinq ans.
Mme Borne a annoncé la future publication du décret relatif aux résidences à enjeu de mixité sociale, mais celle-ci était attendue depuis plus de deux ans, pour mettre en œuvre cette disposition imposée par le Sénat dans la loi du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l’action publique locale, dite loi 3DS. Que de temps perdu !
Je trouve aussi que la réponse du Gouvernement est inconstante. En effet, les émeutes ont souligné le besoin d’éducateurs et de médiateurs le soir et le week-end dans les quartiers.
Comment, dès lors, expliquer l’arrêt des bataillons de la prévention, dispositif pourtant conforté lors du précédent CIV et dont j’ai vu les effets positifs à Nice ou à Reims ? Comment se satisfaire des difficultés de financement persistantes des petites associations, à l’instar de celles que rencontre l’association que j’ai visitée à Vaulx-en-Velin, dont l’action pour prévenir les rodéos urbains est remarquablement efficace ?
En conclusion, malgré la hausse des crédits, je ne trouve pas dans la politique menée la cohérence et l’ambition qui sont nécessaires pour répondre aux enjeux des quartiers prioritaires, laquelle passe par une programmation d’action et des moyens crédibles à moyen terme.
Aussi, la commission des affaires économiques a émis un avis défavorable sur les crédits de la mission « Cohésion des territoires ».