Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, articulée autour de programmes relatifs aux politiques d’hébergement, du logement, de l’urbanisme et de la ville, qui sont autant d’enjeux majeurs pour notre pays, la mission « Cohésion des territoires » connaît une réévaluation de ses crédits de paiement pour 2024 de 5 % en euros constants.
La question qui nous est posée est la suivante : est-ce suffisant ? La réponse est non, évidemment, les rapporteurs qui se sont succédé à la tribune l’ont montré.
Permettez-moi de souligner à quel point les difficultés d’accès au logement, qui varient selon les territoires ou les types d’offres de logement, sont en train de déstabiliser profondément la société française.
Nous attendons du Gouvernement et de l’ensemble des pouvoirs publics, y compris des collectivités territoriales, des réponses à la hauteur de cette déstabilisation. Or force est de constater que les crédits alloués ne sont pas à la hauteur des besoins que nous ressentons sur le terrain.
Je retiens quelques points importants.
Premièrement, nous faisons face à une urgence concernant le logement social. L’affaiblissement de la capacité des organismes HLM à produire suffisamment de logements sociaux a de multiples causes, mais les choix précédents, tels que la baisse des aides personnelles au logement (APL), en réduisant, par effet domino, leurs fonds propres, en sont l’une des raisons essentielles.
Les bailleurs sociaux considèrent que les différentes ponctions financières de l’État depuis 2017 ont grevé leurs budgets de 1, 3 milliard d’euros. Il faut donc les consolider de nouveau et renforcer le Fonds national des aides à la pierre (Fnap). Il y a urgence à financer les nombreuses opérations de développement et d’amélioration du parc de logements locatifs sociaux nécessaire pour répondre à la demande.
Nous appelons à la mise en place d’un programme quinquennal de production de logements sociaux en France métropolitaine, via un abondement de 1 milliard d’euros par an. Je sais dans quel contexte nous allons travailler ce soir, mais une telle mesure est absente du projet de loi de finances qui nous est soumis.
Deuxièmement, en France, près d’un logement sur cinq est une passoire thermique. Sur les 700 000 rénovations par an annoncées par Emmanuel Macron en mars 2022 – MaPrimeRénov’ sera examinée lundi prochain –, moins de 10 % sont des rénovations globales, les seules capables de garantir le label « basse consommation », qui devrait s’appliquer à tout le parc de bâtiments en moyenne d’ici à 2050.
Les logements sociaux et très sociaux souffrent particulièrement de cette situation de précarité énergétique. À l’occasion du 83e congrès HLM, qui s’est tenu à Nantes du 3 au 5 octobre dernier, le Gouvernement a annoncé la création d’un fonds de 1, 2 milliard d’euros, dédié à la rénovation du parc social pour les trois prochaines années, soit 400 millions d’euros par an. Cette disposition est bien incluse dans ce projet de loi de finances, mais à hauteur de 40 millions d’euros en crédits de paiement seulement, qui diffèrent donc grandement des autorisations d’engagement.
Si louable soit-elle, cette initiative gouvernementale ne suffira pas à couvrir les besoins financiers nécessaires à la rénovation du parc social, lesquels sont de l’ordre de 9 milliards d’euros par an, selon l’Union sociale pour l’habitat (USH).
C’est pourquoi le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires, en cohérence avec la recommandation n° 17 du rapport de la commission d’enquête sur la rénovation énergétique que nous avons conduite cette année et dont Guillaume Gontard était le rapporteur, propose d’allouer une enveloppe de 1, 5 milliard d’euros à la rénovation énergétique des logements sociaux.
Troisièmement, dans le contexte d’inflation et de réduction du reste à vivre que nous venons de connaître, le nombre de personnes en grande précarité a bondi. La première urgence est de leur fournir un toit, car il s’agit, là encore, d’un élément profond de déstabilisation de la société française.
Pour ce faire, nous proposons de créer 10 000 places d’hébergement d’urgence supplémentaires, 6 000 places pour conjurer le scandale que représentent les enfants à la rue et 1 000 places pour les femmes victimes de violences conjugales. En outre, nous souhaitons augmenter les crédits de l’hébergement d’urgence pour les personnes à mobilité réduite sur le territoire et les femmes sans-abri sortant de maternité.
Quatrièmement, sans vouloir être exhaustif, la mission « Cohésion des territoires » intègre quelques enjeux environnementaux.
Il importe ainsi d’affronter notre responsabilité collective dans le scandale environnemental et social du chlordécone, qui s’est poursuivi sous une succession d’acteurs et de gouvernements. Il nous faut donc allouer de nouvelles ressources à la recherche sur les impacts sanitaires de ce produit, qui a intoxiqué les Antilles, ainsi que sur ses effets sur la biodiversité. Nous proposerons d’augmenter le budget consacré à cette question.
Nous demanderons également la hausse des crédits du programme de lutte contre les algues vertes, en gardant à l’esprit que seule une mutation en profondeur du modèle agricole breton permettra de répondre à ce fléau.
Telles sont nos positions sur cette mission, dont il est toutefois probable que les crédits ne soient en définitive pas votés.