Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la mission « Économie » est devenue un ensemble de crédits disparates et ne représente plus les politiques économiques menées dans notre pays.
Ces politiques économiques sont désormais largement financées par des crédits d’autres missions et des mesures extrabudgétaires, ce qui nuit à la clarté des débats et au contrôle parlementaire du budget de l’État.
Parmi cet ensemble de crédits sans grande cohérence, je relève toutefois quelques points d’intérêt en matière de régulation des postes, des télécommunications et de l’économie numérique.
Je souhaite d’abord faire un point d’actualité sur l’application du projet de loi visant à sécuriser et réguler l’espace numérique (Sren), qui est toujours en cours d’examen parlementaire.
En tant que corapporteur de ce projet de loi, je peux me satisfaire de l’anticipation du déploiement du filtre antiarnaques, auquel est dédiée une enveloppe de 4, 5 millions d’euros : plus tôt ce filtre sera opérationnel, mieux nous nous protégerons des actes de cybermalveillance en ligne, qui sont en forte hausse.
Toutefois, je m’inquiète de l’absence de budget alloué à l’Arcep pour faire face à ses nouvelles obligations en matière de régulation des marchés d’informatique en nuage et de services d’intermédiation des données.
Ces nouvelles missions, très éloignées du cœur de métier historique de l’Arcep, sont pourtant essentielles à l’atteinte de notre souveraineté numérique.
Cet oubli budgétaire est d’autant plus préjudiciable que les autres autorités de régulation chargées d’appliquer les nouveaux règlements européens sur le numérique bénéficient, dans le cadre de ce projet de loi de finances, d’un renforcement de leurs moyens.
Il me semble donc indispensable, dans le souci de la bonne application de la loi que nous votons, de rectifier cet oubli : un gendarme qui dispose seulement de son uniforme pour faire respecter la loi n’ira pas bien loin, vous en conviendrez…
Des oublis, dans le cadre de la mission « Économie », il y en a malheureusement d’autres, qui sont plus ou moins préjudiciables.
Je pense en particulier à la mission d’aménagement du territoire à laquelle contribue La Poste, sous-compensée a minima de 15 millions d’euros – ou de plus 190 millions d’euros selon l’estimation de l’Arcep !
Les effets de la poursuite de la réforme des impôts de production sur le financement de cette mission de service public ne sont pas entièrement pris en compte – et une nouvelle fois, c’est le Sénat qui le remarque…
Cet oubli est d’autant plus dommageable que c’est cette mission de service public qui permet le maintien de 17 000 points de contact sur notre territoire. Si une juste compensation n’est pas assurée, alors c’est directement le budget des commissions départementales de présence postale territoriale qui sera réduit.
Certains d’entre vous siègent peut-être au sein de ces commissions. Elles sont aujourd’hui le principal levier d’action des élus locaux en matière postale. Nous devons préserver leur capacité d’action.
Les collectivités territoriales ne sauraient être la variable d’ajustement de ce budget et de celui des années à venir. Leur capacité d’investissement doit donc être préservée.
C’est pourquoi je m’inquiète, comme nombre d’entre vous, de l’avenir du financement accordé aux conseillers numériques des maisons France Services. Ce dispositif essentiel pour favoriser l’inclusion numérique a été initié à juste titre par l’État, et son soutien financier doit perdurer.
De façon générale, les moyens alloués en faveur de l’inclusion numérique me paraissent largement insuffisants et ne sont pas de nature à permettre une politique ambitieuse et inclusive en la matière.
Enfin, je ne saurais m’exprimer ici sans évoquer la réalisation du plan France Très Haut Débit.
Nous partageons tous ici ce constat : la généralisation de la fibre optique d’ici à la fin de 2025 est encore loin d’être acquise. Nous le constatons chaque semaine dans nos territoires.
Les réseaux de fibre optique se déploient peut-être trop vite, au détriment de leur qualité et de leur pérennité. Il y a quelques mois, le Sénat a voté à l’unanimité ma proposition de loi sur le sujet. Nous ne pouvons que regretter son absence d’inscription à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale, même si les pratiques des opérateurs sont en train d’évoluer dans le bon sens sur le terrain.
Des parties entières de notre territoire demeurent en marge du plan France Très Haut Débit, en particulier le département de Mayotte. Avec mon collègue Thani Mohamed Soilihi, nous rappelons chaque année que Mayotte a plus que jamais besoin du soutien du Sénat face aux réticences incompréhensibles du Gouvernement à soutenir le déploiement de son réseau d’initiative publique – bien que, si j’en crois les récents échos, …