Intervention de Victorin Lurel

Réunion du 2 décembre 2023 à 14h00
Loi de finances pour 2024 — Investir pour la france de 2030

Photo de Victorin LurelVictorin Lurel :

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je ne m’attarderai pas sur l’évolution des crédits de cette mission, je vous ferai simplement part, au regard des sommes considérables en jeu, de cet amer constat : l’exécutif poursuit sa politique de dessaisissement du Parlement des affaires qu’il est en droit de connaître et d’apprécier.

S’il n’est pas question pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain de remettre en cause l’intérêt stratégique à long terme d’une telle mission, nous considérons que, malgré une gestion des crédits en amélioration, l’information apportée au Parlement sur ces dépenses reste bien lacunaire.

En additionnant les crédits du programme d’investissements d’avenir n° 4 (PIA 4) et ceux de France 2030, nous atteignons en effet la coquette somme de 54 milliards d’euros, dont pas moins de 34 milliards d’euros ont été votés à la hussarde, à la faveur d’un amendement gouvernemental au projet de loi de finances pour 2022 !

Au-delà de cet amendement à 34 milliards d’euros, la Cour des comptes note, dans son analyse de l’exécution budgétaire d’avril 2023, qu’« aucun des documents proposés (projet annuel de performance, “jaune”, rapport trimestriel) ne présente cependant une analyse consolidée et transversale des investissements effectivement réalisés et en cours ni de leurs conséquences sur l’économie ».

Au vu des retards pris dans la mise en œuvre des précédents PIA, le Gouvernement avait certes fait le choix de ne pas identifier précisément, dans les programmes 424 et 425, les secteurs appuyés en matière d’investissement et de transition.

Pour autant, l’efficacité des décaissements et des investissements ne doit pas se faire au détriment d’une dilution de la portée de l’autorisation parlementaire et d’une sous-information chronique du Parlement sur le choix des investissements et de l’affectation des crédits.

Je ne prendrai qu’un exemple de l’opacité entretenue, qui, hélas ! a des effets de bord importants dans nos territoires. En Guadeloupe, l’accord-cadre, signé en mars 2023, tendant à mettre en œuvre la mesure « renouvellement forestier » incluse dans le programme 424 « Financement des investissements stratégiques » de la mission « Investir pour la France de 2030 » du projet de loi de finances pour 2023 a tout bonnement exclu les forêts d’outre-mer. Ainsi les services outre-mer de l’Office national des forêts ont été privés des quelque 150 millions d’euros consacrés par l’État au renouvellement forestier !

Heureusement, depuis lors, les courriers d’alerte adressés aux ministres concernés ont permis d’envisager la réintégration des outre-mer ! Mais tout cela révèle combien le pilotage et les choix d’investissements opérés manquent encore de clarté.

Comme l’ont rappelé nos rapporteurs spéciaux en commission, les règles de gestion extrabudgétaire – et je dirais exceptionnelle – doivent nous amener à être particulièrement attentifs aux critères de sélection des projets utilisés par l’exécutif et aux modalités de gestion des enveloppes d’investissement.

Monsieur le ministre, vous l’aurez compris, le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain restera extrêmement vigilant quant au ciblage des bénéficiaires des aides et au risque de saupoudrage de l’aide publique.

Cela étant, comme chaque année, notre groupe votera ces crédits, tout en continuant de plaider pour plus de transparence et de lisibilité sur les investissements réalisés et programmés et sur leurs conséquences.

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