Intervention de Daniel Salmon

Réunion du 2 décembre 2023 à 14h00
Loi de finances pour 2024 — Budget annexe : publications officielles et information administrative

Photo de Daniel SalmonDaniel Salmon :

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous examinons cet après-midi trois missions qui revêtent chacune un intérêt particulier : « Pouvoirs publics », « Conseil et contrôle de l’État » et « Direction de l’action du Gouvernement ».

Je profite tout d’abord de l’examen de ces crédits pour rappeler l’excellente proposition de loi encadrant l’intervention des cabinets de conseil privés dans les politiques publiques, déposée par le groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky à la suite du rapport de la commission d’enquête sur l’influence croissante des cabinets de conseil privés sur les politiques publiques.

Cette commission avait révélé l’influence croissante de ces consultants, qui interviennent sur des pans entiers des politiques publiques, en lieu et place des fonctionnaires, qui se sont sentis dépossédés de leurs missions : gestion de la crise sanitaire, stratégie nationale de santé, avenir du métier d’enseignant, mise en œuvre de la réforme des aides personnalisées au logement (APL)… Il est donc nécessaire de limiter les périmètres et de rendre plus transparents ces recours.

Le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires appelle de ses vœux la fin de ces pratiques d’externalisation, afin de redonner pleine confiance aux fonctionnaires et aux agents publics qui œuvrent au quotidien à l’élaboration et au pilotage des politiques publiques.

Cette parenthèse fermée, je m’attarderai sur les crédits de la mission « Direction de l’action du Gouvernement », qui connaissent cette année une hausse de 3, 7 % en autorisations d’engagement et de 8, 5 % en crédits de paiement par rapport à l’année 2022.

Nous saluons la nette augmentation des crédits consacrés au Comité d’indemnisation des victimes des essais nucléaires (Civen), qui permettra de faire face à l’augmentation des demandes. Ces crédits affectés, qui augmentent de 16 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement, prennent en charge les indemnisations versées sous forme de capital aux victimes, ainsi que les frais d’expertise médicale y afférents. Compte tenu des pathologies graves qui ont été recensées chez les populations locales, nous saluons les efforts de l’exécutif pour accélérer le traitement des indemnisations.

Toujours sur les enjeux de santé publique, nous nous étonnons de la très faible hausse des crédits accordés à la mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives (Mildeca), alors même que la compréhension des mécanismes et la prévention constituent un des axes majeurs pour enrayer les conduites à risque. Seule une mobilisation des pouvoirs publics, moins axée sur la répression, permettrait de répondre réellement aux difficultés persistantes posées par les phénomènes d’addiction aux drogues, mais force est de constater que le budget n’est pas à la hauteur des enjeux.

Ce budget est également caractérisé par un manque de moyens consacrés aux autorités administratives indépendantes alors que celles-ci sont devenues essentielles pour la préservation des libertés fondamentales. Je pense notamment au Défenseur des droits et au Contrôleur général des lieux de privation de liberté.

Le nombre de saisines du Défenseur des droits a augmenté de 9 % en 2022. Plus de 82 000 de ces réclamations portaient sur des problèmes d’accès aux services publics. Et les indicateurs témoignent, pour 2023, d’un nombre de sollicitations déjà supérieur à 80 000. La prévision pour l’année entière 2023 laisse entrevoir une nouvelle augmentation, de l’ordre de 12 %, des réclamations traitées par l’institution.

Les réclamations en matière de défense des droits des enfants ont augmenté de 20 % et celles qui concernent l’orientation et la protection des lanceurs d’alerte de 50 %. Les moyens proposés sont en deçà du travail réalisé. Des efforts budgétaires à destination des autorités administratives indépendantes sont nécessaires pour renforcer leurs moyens dans l’exercice des indispensables missions qui leur sont attribuées.

Enfin, le budget alloué au Haut Conseil pour le climat (HCC) et au Secrétariat général à la planification écologique est nettement insuffisant au regard des enjeux de la planification écologique et de la crise climatique que nous subissons de plein fouet.

Le Gouvernement doit agir dans l’urgence pour améliorer la planification écologique. Nous appelons donc de nos vœux la création d’un ministère consacré aux risques : nous avons connu, ces dernières années, un enchevêtrement de crises écologique, sanitaire, sociale et désormais géopolitique, économique et énergétique.

En ce qui concerne la santé, nous constatons l’augmentation du nombre d’affections de longue durée due à notre mode de vie sédentaire, à notre alimentation inadaptée et à l’absence de prévention globale. Ces crises, nombreuses, affectent notre économie, la cohésion sociale, le pouvoir d’achat et le quotidien de nos concitoyens.

De tels risques pourraient être pris en compte et anticipés par ce nouveau ministère. Il s’agirait de considérer les impacts différenciés des crises en fonction de la catégorie socioprofessionnelle, de l’âge ou encore de la répartition géographique des personnes, afin de les prévenir ou d’y répondre plus efficacement.

Je conclurai en rappelant que ce budget, dans son ensemble, demeure insuffisant pour faire face aux enjeux majeurs de la société, tant sur le plan de la santé publique, de la planification écologique que de la préservation des libertés. Il trahit un manque de vision globale et à long terme de la part du Gouvernement.

Pour toutes ces raisons, nous nous abstiendrons.

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