Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je commencerai par rendre hommage au travail d’Éliane Assassi et d’Arnaud Bazin, respectivement rapporteure et président de la commission d’enquête sur l’influence croissante des cabinets de conseil privés sur les politiques publiques. J’espère que la proposition de loi que nous avons adoptée sur ce sujet fera l’objet d’un vote conforme à l’Assemblée nationale.
La mission « Pouvoirs publics », qui couvre les dotations allouées à la Présidence de la République, aux assemblées parlementaires, au Conseil constitutionnel, ainsi qu’à la Cour de justice de la République, comporte en 2024 une augmentation de 12 millions d’euros pour le budget de la Présidence de la République. Cela représente une hausse de 11 %, bien supérieure au taux de l’inflation. Le trou de 12 millions d’euros dans l’exécution du budget 2023, qui justifie cette hausse, serait lié à la « très forte activité présidentielle », sans qu’on nous donne davantage de précisions.
Cette hausse est peu acceptable, alors que nos collectivités territoriales et nos services publics sont mis à rude épreuve du fait d’un manque de moyens structurel qui affecte considérablement l’exercice de leurs missions. Elle reflète une pratique de plus en plus verticale du pouvoir présidentiel, qui se traduit non seulement par une augmentation des contournements du Parlement, au sein duquel la majorité présidentielle est en minorité, mais également par une multiplication des effets d’annonces, qui ne sont suivis d’aucun acte concret. Le grand débat national ou, plus récemment, les rencontres de Saint-Denis en ont été des illustrations.
Nous souhaitons surtout attirer votre attention sur les mesures de la mission « Direction de l’action du Gouvernement », qui regroupe les crédits d’une dizaine d’autorités administratives indépendantes, dont la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) et le Défenseur des droits.
Auditionné au Sénat en juillet dernier, le président de la HATVP faisait état du budget modeste de l’institution, alors que ses compétences ont été élargies, puisqu’elle doit désormais contrôler les mobilités, réguler le lobbying et le pantouflage.
Après avoir envisagé une dotation en baisse par rapport à l’année dernière, en deçà des besoins exprimés par la HATVP, le Gouvernement a finalement concédé la création de quatre nouveaux postes. Il en faudrait pourtant bien davantage pour permettre à la HATVP d’absorber ses missions renforcées de contrôle de l’éthique en politique. Finalement, sa dotation globale n’atteint même pas 10 millions d’euros, soit un montant inférieur à la hausse des crédits alloués à l’activité présidentielle.
La situation du Défenseur des droits doit également nous alerter. Si les crédits qui lui sont alloués sont en hausse, avec la création de dix postes, cette augmentation est trois fois moins importante que les besoins répertoriés pour gérer la progression constante des saisines. Alors que le Gouvernement rechigne à lui accorder les moyens nécessaires, nous tenons pour notre part à lui assurer notre soutien dans la réalisation de ses missions essentielles à la protection des droits de toutes et tous.
Enfin, au sein de la mission « Conseil et contrôle de l’État », ce sont les effectifs des tribunaux administratifs et de la Cour nationale du droit d’asile (CNDA) qui nous interpellent. Les premiers ne se voient accorder que 25 postes supplémentaires quand le stock des affaires enregistrées augmente d’environ 5 % chaque année. Pis, aucun crédit supplémentaire n’est accordé à la CNDA, comme c’est le cas depuis 2021.
À l’heure où les réformes successives du Gouvernement ont pour seul objectif la réduction des délais ou la simplification des procédures afin de réduire la masse contentieuse, nous considérons qu’il faut stopper ces logiques de rationalisation, qui se déploient au détriment de la garantie des droits de toutes et tous, et augmenter le nombre de fonctionnaires chargés de la politique d’accueil des personnes étrangères.
En somme, mes chers collègues, vous l’aurez compris, nous ne pourrons pas soutenir ces crédits, parce qu’ils n’accordent pas les moyens nécessaires au bon fonctionnement de plusieurs institutions cruciales dans notre société.