Intervention de Véronique Guillotin

Réunion du 5 décembre 2023 à 14h00
Loi de finances pour 2024 — Santé

Photo de Véronique GuillotinVéronique Guillotin :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, l’examen des crédits de la mission « Santé » du PLF revêt souvent un caractère politique, puisque la moitié de ceux-ci concernent l’AME. Cette réalité est particulièrement vive cette année, alors que le Sénat a remplacé ce dispositif par l’AMU et que l’examen du projet de loi pour contrôler l’immigration, améliorer l’intégration a commencé à l’Assemblée nationale.

Les crédits consacrés à l’AME en 2024 atteignent ainsi 1, 2 milliard d’euros, un chiffre stable par rapport à la loi de finances initiale pour 2023, mais en hausse de 5 % au regard aux dépenses réellement effectuées cette année. L’effort de sincérité budgétaire du Gouvernement est à saluer : il a même conduit en 2023 à une surestimation inédite de 65 millions d’euros.

Si notre groupe porte une vision différente de celle de la majorité sénatoriale, le sujet n’est pas pour autant pris à la légère au sein de nos rangs.

Le nombre de bénéficiaires, donc le coût total de l’AME, ne cesse d’augmenter avec les années.

Sur un plan sanitaire et budgétaire, le rapport de Claude Évin et Patrick Stefanini, paru hier, réaffirme que l’AME est non pas un facteur d’attractivité, mais un dispositif sanitaire utile et globalement maîtrisé.

Cette aide, qui représente moins de 0, 5 % des dépenses de l’assurance maladie, permet d’éviter des dépenses bien plus élevées en évitant l’aggravation de maladies et la propagation des infections. Elle répond à l’engagement des médecins de soigner tout le monde et assure aux hôpitaux le remboursement des frais engagés.

Attaché aux valeurs humanitaires et éthiques entourant l’AME, et suivant les conclusions du rapport susmentionné, particulièrement sévère vis-à-vis du projet d’AMU, le groupe du RDSE ne soutiendra pas l’amendement du rapporteur spécial visant à réduire de 410 millions d’euros les dotations AME pour tenir compte des gains attendus de l’AMU.

Toutefois, parce que l’on demande aussi à l’assurance maladie de réduire ses dépenses, la pertinence des soins et le contenu du panier de soins pourraient être réévalués de manière objective.

Le rapport Évin-Stefanini propose d’autres pistes de réforme intéressantes, notamment les contrôles, la prise en compte des revenus du foyer ou encore la restriction de la qualité d’ayant droit aux enfants mineurs.

J’en viens à l’instauration d’un droit d’entrée. La première tentative, en 2011, avait été peu concluante. Si elle avait permis de susciter des dépenses fiscales supplémentaires, elle avait aussi conduit à une augmentation du coût moyen des soins par bénéficiaire et à un report des prises en charge des soins urgents. Un équilibre est peut-être à trouver dans le cadre d’un travail de fond, sans tabou, sans polémique et sans posture.

Sur le reste de la mission, le caractère épars des crédits du programme 204, « Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins », est une nouvelle fois à déplorer. Si le programme est en hausse de 8 millions d’euros, certaines actions sont en baisse, alors qu’elles visent à améliorer la santé des personnes en difficulté et à prévenir les maladies chroniques.

L’augmentation de 2 % de l’action n° 15, « Prévention des risques liés à l’environnement et à l’alimentation », traduit quant à elle la portée insuffisante du programme national de santé environnementale, dont les enjeux sont pourtant cruciaux.

L’Institut national du cancer (INCa) dispose enfin d’un fonds de roulement important, mais, dans un contexte de prévalence des cancers et de mise en place de la stratégie décennale de lutte contre les cancers 2021-2030, la baisse de cette subvention de 6 millions d’euros nous paraît inappropriée. Je défendrai, avec Mme la rapporteure pour avis, un amendement visant à rétablir cette somme.

J’en termine en évoquant le programme 379, par lequel 6 milliards d’euros de fonds européens de relance destinés à l’investissement en santé seront transférés à l’assurance maladie.

Les investissements des établissements ont augmenté de manière significative et, pour la première fois en dix ans, le taux de vétusté des équipements s’est infléchi. Quelque 907 millions d’euros soutiendront donc, en 2024, un effort nécessaire, qui est engagé depuis plusieurs années et qui porte enfin ses fruits.

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