Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, donné en sursis l'année dernière, le cinéma a réalisé en 2023 un comeback – vous me pardonnez l'anglicisme – qui n'est pas sans évoquer un scénario à rebondissements avec une fin heureuse.
C'est en effet la bonne nouvelle de l'année : avec 175 millions de spectateurs, peut-être même 185 millions d'ici la fin de l'année, le septième art a retrouvé un public que le déferlement du streaming n'aura pas détourné des salles.
La fin des restrictions liées à la pandémie a ainsi eu raison de la morosité ambiante de l'année dernière, avec l'aide d'une programmation, notamment de films français, fortement attractive pour tous les publics.
C'est avec une grande joie que je constate donc que les aides publiques consenties au secteur ont permis à notre cinéma de relever très rapidement la tête, même s'il faut bien entendu se garder de relâcher nos efforts.
Avec mes collègues Sonia de La Provôté et Céline Boulay-Espéronnier, nous avons mené cette année un travail intense d'écoute et d'analyse du secteur, qui a donné lieu à la publication, en mai dernier, d'un rapport au nom de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication.
Nous y montrons que la France, bien plus que ses voisins européens, entretient de longue date un lien très fort avec son cinéma. Que ce lien particulier en soit la cause ou la conséquence, il reste que depuis soixante-quinze ans, notre pays a mis en place un cadre unique de régulation et de protection du secteur qui s'appuie à la fois sur la protection des artistes et sur le respect de l'équilibre économique de toute la filière.
Le cinéma fait partie de notre histoire, et il fait aussi notre histoire.
Il nous faut toutefois demeurer vigilants et adapter sans cesse nos outils aux évolutions technologiques. En transposant la directive SMA – Services de médias audiovisuels – de manière volontariste, la France a déjà œuvré en ce sens au niveau européen.
Dans quelques semaines, avec Sonia de La Provôté, nous vous proposerons d'examiner une proposition de loi visant à conforter la filière cinématographique en France, notamment en facilitant le quotidien des exploitants de salles qui font vivre le cinéma dans nos territoires. J'espère pouvoir compter sur votre soutien et sur celui du Gouvernement, d'autant que ce texte constituera l'une des trop rares occasions qui nous sont données de légiférer sur le cinéma.
Avant de conclure, je tiens à indiquer que je déplore fortement, dans ce paysage enfin apaisé, l'adoption d'un amendement de suppression de l'article 5 duovicies et, partant, de la prorogation du crédit d'impôt pour dépenses de production d'œuvres phonographiques (CIPP).
Les crédits d'impôt dont bénéficie le secteur du cinéma font l'objet d'évaluations très régulières, qui toutes font état de bilans très positifs sur la production comme en termes de retombées économiques. L'absence de visibilité à moyen terme quant à l'avenir de ce dispositif pourrait avoir de très fâcheuses conséquences sur toutes les industries artistiques, mais aussi techniques, qui, dans un marché désormais internationalisé, s'efforcent d'accueillir de grands tournages internationaux entraînant de fortes retombées économiques pour nos territoires.
Je puis en témoigner personnellement, car la société Provence Studios, installée dans notre département et sur le site de laquelle nous nous sommes rendus à l'occasion de notre rapport, a pu développer – comme d'autres, du reste – une infrastructure mondialement reconnue à Martigues. Cette société serait toutefois fragilisée si les conditions économiques d'accueil des tournages venaient à être dégradées.
Je souhaite donc vivement que le crédit d'impôt soit prorogé dans le présent projet de loi de finances.
Sous cette réserve, qu'il me paraissait important de mentionner, la commission de la culture a émis un avis favorable à l'adoption des crédits pour 2024.