Intervention de Gérard Lahellec

Réunion du 7 décembre 2023 à 14h30
Loi de finances pour 2024 — Compte de concours financier « avances à l'audiovisuel public

Photo de Gérard LahellecGérard Lahellec :

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, les crédits de cette mission sont marqués par une certaine faiblesse dans la prise en compte de l'inflation et de la hausse du coût de l'énergie.

La crise de la presse écrite s'aggrave sous les effets dévastateurs de la hausse du prix du papier, passé de 400 euros la tonne en 2021 à plus de 800 euros en 2023.

S'y ajoute une vive préoccupation sur l'accélération spectaculaire de la concentration des médias. Trois des industriels qui les contrôlent sont des acteurs majeurs de la téléphonie, ce qui accroît encore la dimension globale de ces concentrations.

Pourtant, la majeure partie des aides directes à la presse est captée par ces groupes de médias, et le même problème se pose dans la presse quotidienne régionale, où un nombre restreint de groupes capte l'essentiel des aides. Le dernier exemple en date d'un journal en difficulté est celui du Quotidien de La Réunion.

L'accélération en cours de la mainmise des grands groupes industriels sur les médias doit nous alerter sur le contrôle politique de l'information. La course à l'info spectaculaire se fait souvent au détriment de la qualité, ce qui affecte aussi les métiers et le pluralisme de l'information.

Il devient donc urgent d'engager une réforme profonde, afin que les aides tiennent compte de la situation économique des groupes auxquelles ces titres appartiennent. Elles doivent évoluer en fonction de critères, notamment de gouvernance des titres.

Cette concentration est aussi de mise dans l'audiovisuel privé, secteur où l'on a pu constater le traitement hasardeux que certaines chaînes ont réservé à des événements récents, sans parler des atteintes inacceptables portées contre certaines productions cinématographiques avant même leur sortie en salle.

Cette logique, que je qualifierai de « ségrégationniste » à l'égard d'une partie de la population de notre pays, ou encore contre la liberté de création et de diffusion des œuvres, nous montre à quel point il est absolument primordial d'avoir un audiovisuel public fort. C'est aussi le bon moyen pour contenir les offensives de la parole extrémiste que certains se complaisent parfois à relayer sur des plateaux privés.

J'en viens au cinéma. Il nous semble également pertinent d'envisager dès à présent la mise en œuvre de dispositions visant à lutter contre toutes les formes de piratage.

Si l'on peut reconnaître que la dotation à l'audiovisuel public ne se traduit pas par de nouvelles coupes claires, il faut tout de même remarquer que les moyens qui y sont consacrés ne compensent pas les coups de rabot des années précédentes.

En outre, on peut s'interroger sur l'absence de solution pérenne pour compenser la fin de la redevance, comme certains de mes collègues l'ont déjà rappelé avant moi.

Enfin, le CNM est l'autre grand oublié de cette mission, alors qu'il est nécessaire d'en consolider le budget, les besoins de financement supplémentaires étant évalués entre 30 millions d'euros et 40 millions d'euros.

Telles sont les raisons qui nous conduiront à soutenir la proposition d'instauration d'une taxe sur le streaming, destinée à financer le Centre national de la musique.

Au demeurant, en raison d'un budget bien trop fragile à nos yeux, pour des secteurs absolument essentiels, nous ne voterons pas les crédits de cette mission. §

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