Intervention de Rémi Féraud

Réunion du 8 décembre 2023 à 9h30
Loi de finances pour 2024 — Action extérieure de l'état

Photo de Rémi FéraudRémi Féraud :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, comme l'a indiqué ma collègue Nathalie Goulet, les crédits de la mission « Action extérieure de l'État » connaissent une hausse substantielle dans le projet de loi de finances pour 2024.

J'évoquerai pour ma part le programme 151, qui regroupe les moyens dédiés aux Français de l'étranger et au réseau consulaire.

En 2024, l'administration consulaire devrait poursuivre sa démarche de modernisation. Il s'agit notamment de finaliser la rénovation des outils numériques de nos administrations consulaires. La dématérialisation de l'état civil des Français nés à l'étranger ou concernés par un événement d'état civil à l'étranger, engagée en 2019, en est un bon exemple. Le ministère espère pouvoir engager en 2024 la dernière étape de ce projet, à savoir l'ouverture en ligne du registre électronique.

Le déploiement de la plateforme France Consulaire devrait également se poursuivre l'année prochaine. Ce centre d'appels vise à soulager les services consulaires des demandes téléphoniques. Il est pour l'instant limité à l'Europe, mais il devrait être étendu courant 2024 à l'Afrique, puis au reste du monde. Assurons-nous néanmoins que cette évolution représente une amélioration pour nos postes consulaires et ne se fasse pas au détriment de l'accueil physique.

Ensuite, l'année 2024 est, comme vous le savez, une année d'élections. Les services consulaires seront particulièrement sollicités à cette occasion. Le programme reçoit un abondement exceptionnel de 1, 1 million d'euros, en plus d'un transfert du ministère de l'intérieur.

Enfin, les bourses scolaires constituent les principales dépenses d'intervention du programme 151. Je sais que les élus représentant les Français établis hors de France sont très attentifs à ce sujet. Ces bourses, directement versées aux établissements, permettent de soutenir l'accès des familles les plus modestes à l'enseignement français à l'étranger.

En 2023, l'ensemble des crédits avaient été consommés, permettant de liquider la soulte de l'Agence française pour l'enseignement français à l'étranger (AEFE).

Pour 2024, le montant de l'enveloppe des bourses sera de 118 millions d'euros. Nous devrons être attentifs à la consommation de cette enveloppe, pour éviter la reconstitution d'une soulte, tout en nous assurant que le montant soit suffisant dans un contexte de difficultés sociales et de forte inflation.

Concernant le programme 185, le budget 2024 consolide les moyens de la diplomatie d'influence, puisque les crédits du programme progressent de 5, 7 %.

Premièrement, cette hausse des moyens vise à renforcer l'attractivité de la France dans les domaines culturel, scientifique et universitaire. Même si cela reste modeste par rapport à la politique d'influence d'autres pays, je veux saluer l'effort qui est enfin mené en faveur du développement de notre rayonnement.

L'enveloppe des bourses pour les étudiants étrangers est ainsi renforcée de 6 millions d'euros, pour atteindre 65 millions d'euros. L'objectif du ministère et de son opérateur, Campus France, est d'attirer en priorité davantage d'étudiants d'Afrique et d'Indopacifique. Pour ma part, je considère que cet effort est positif, d'autant que chaque étudiant étranger accueilli en France est un potentiel futur ambassadeur de notre pays, ce qui représente un atout majeur dans la mondialisation.

Cependant, comme je l'avais rappelé dans mon intervention l'année passée, nous devrons rester vigilants, car ces crédits sont régulièrement sous-exécutés. Certes, ce phénomène permet une certaine marge de manœuvre budgétaire, y compris pour encaisser les effets de l'inflation. Néanmoins, on peut regretter le manque de volontarisme politique en la matière.

De plus, le projet de loi de finances augmente les crédits d'intervention pilotés par les services de coopération et d'action culturelle.

Toutefois, leur emploi me paraît trop peu détaillé et interroge sur la doctrine de consommation de ces crédits. Certes, la logique de gestion au plus près du terrain est utile, mais elle ne peut se faire au prix de la redevabilité des comptes. Nous pouvons considérer qu'il est nécessaire de modérer la hausse de cette enveloppe ou bien – comme je le fais – conclure que l'exécution de ces crédits devra faire l'objet de travaux de contrôle.

Deuxièmement, il s'agit également de soutenir le développement de l'enseignement français à l'étranger. À cet égard, je voudrais souligner deux points d'attention.

D'une part, l'objectif de doublement du nombre d'élèves inscrits dans le réseau des établissements français à l'étranger d'ici à 2030 paraît inatteignable. Même si plusieurs initiatives intéressantes sont abondées par ce projet de loi de finances, la réalisation de cet objectif supposerait une croissance des effectifs de 5 % par an, contre 0, 5 % cette année.

D'autre part, il faut être vigilant quant à l'évolution de la subvention pour charges de service public versée à l'AEFE. Si elle est maintenue cette année à un niveau important, de l'ordre de 454, 9 millions d'euros, l'inflation reste encore élevée dans de nombreux pays et pourrait peser sur les frais de scolarité des établissements. Il apparaît indispensable que l'enseignement demeure pour les Français résidant à l'étranger un véritable service public, c'est-à-dire que la part de contribution des familles reste stable. Nous devrons y être attentifs cette année.

La question de la capacité de financement de ses projets de long terme par l'Agence reste ouverte, alors que ses capacités d'endettement sont limitées par le cadre budgétaire.

L'entretien lourd des établissements du réseau et la rénovation énergétique, en particulier, conduisent à des besoins d'investissement croissants. En ce sens, le rapport demandé par l'article 50 A du présent projet de loi devrait nous permettre d'envisager une évolution du mode de financement de l'AEFE.

Pour conclure, je veux exposer la position de la commission sur l'ensemble des crédits de la mission. La hausse des moyens qui est accordée à la diplomatie française est nécessaire et bienvenue. Les consultations menées dans le cadre des États généraux de la diplomatie ont eu pour premier effet de souligner la volonté des agents du ministère de prévenir la dégradation de notre outil diplomatique.

Ces dernières années, les mesures d'économies ont affaibli les capacités du Quai d'Orsay à mettre en œuvre la politique étrangère de la France et à assurer une présence consulaire et culturelle efficace, pour un gain budgétaire en faveur des finances de l'État extrêmement limité.

Or, dans le contexte géopolitique actuel, nous devons être en mesure de déployer une véritable diplomatie d'influence et d'apporter un réel soutien à nos concitoyens résidant à l'étranger.

La commission des finances vous invite, mes chers collègues, à approuver les crédits de la mission « Action extérieure de l'État » et à adopter l'article 50 A rattaché à la mission.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion