Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, alors que certains la voudraient repliée, égoïste, voire rabougrie, la France est belle, grande et forte quand elle est solidaire et fraternelle.
Les crédits de cette mission sont à bien des égards une illustration parmi d'autres du caractère fraternel et solidaire de notre pays. Près de 6 milliards d'euros sont un jeu, mais comme cela a été dit à plusieurs reprises, cela ne représente qu'une partie de la totalité du budget que notre pays consacre à l'aide au développement.
Dans une période de crise, alors que nos concitoyens ont de fortes attentes dans de nombreux domaines, l'on peut se demander s'il est réellement important et légitime d'apporter cette aide. Je crois que nous sommes tous d'accord pour dire que c'est effectivement important, et même essentiel à plusieurs titres.
La première raison est que le monde est de plus en plus instable et dangereux. Que ce soit en Ukraine, où je me suis rendu deux fois cette année, en Afrique, notamment au Sahel, en Éthiopie ou au Soudan, en Arménie et bien sûr à Gaza, après l'ignoble attaque terroriste dont Israël a été victime, la constante des nombreux conflits qui font rage dans le monde est que les populations civiles en sont systématiquement les victimes collatérales.
Par le biais de l'aide au développement, notre pays soutient les populations civiles, mais il contribue aussi à s'attaquer aux causes de ces conflits, parmi lesquelles on retrouve souvent la misère, le manque d'éducation ou encore les difficultés rencontrées pour manger à sa faim. Tel est l'objectif, mes chers collègues, qui doit étayer notre politique de développement.
Plusieurs de nos collègues, notamment Michel Canévet et Christian Cambon, ont insisté sur la nécessité de nous doter de mécanismes susceptibles d'améliorer le contrôle et le suivi des aides accordées par notre pays. Il y va non seulement d'un enjeu d'efficacité, mais aussi d'une nécessité au regard du contrôle démocratique qui doit être celui des assemblées parlementaires en général et du Sénat en particulier.
Nous avons constaté avec regret que l'arrêt de certaines aides – je pense au Sahel – a été décidé sans que le Parlement soit associé, madame la ministre.
De même, nous nous interrogeons sur le probable non-respect de la trajectoire que nous avons votée dans le cadre de la loi du 4 août 2021 de programmation relative au développement solidaire et à la lutte contre les inégalités mondiales, avec les conséquences que cela emporte.
Au-delà de ces difficultés, j'estime que nous devons être en mesure d'assumer le fait que l'aide publique au développement est aussi un outil au service de la stratégie d'influence de notre pays. Il nous faut assumer cette ambition sans naïveté, mes chers collègues, car d'autres pays le font.
Je pense en particulier aux enjeux économiques de l'aide au développement pour nos entreprises. Au regard des objectifs de développement durable, il est en effet essentiel, comme le rappelait Michel Canévet, d'accompagner les pays bénéficiaires dans le déploiement de leur stratégie de développement, au travers notamment du financement d'infrastructures. Il importe à tout le moins de ne pas nous l'interdire.
J'estime également que nous devons veiller – nous en avons d'ailleurs débattu lors de l'examen de ce qui est devenu la loi de programmation, en particulier au sujet de la francophonie – à éviter le saupoudrage, qui est trop souvent l'écueil de nos politiques publiques, afin d'être en capacité de soutenir les pays qui en ont le plus besoin, notamment dans l'arc africain.
Il nous faut enfin aborder les problématiques migratoires, auxquelles plusieurs orateurs ont fait allusion, avec un regard lucide et exigeant. Les personnes concernées ne quittent pas leur pays pour le plaisir de le quitter : elles en sont chassées, soit par un conflit, soit par la misère et la pauvreté.