Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, je ne reviendrai pas sur la situation internationale, celle-ci ayant été évoquée ce matin à propos de la mission « Action extérieure de l'État ». Mon intervention sur la mission « Aide publique au développement » que votre assemblée examine à présent n'est cependant pas sans lien avec celle-ci.
L'actualité internationale nous conforte en effet dans l'inflexion que nous donnons à nos efforts en matière de solidarité internationale. Nous devons, plus que jamais, nous placer dans une logique partenariale et d'influence mutuellement bénéfique, orientation qui s'inscrit dans la droite ligne de l'augmentation spectaculaire de l'aide publique au développement de la France, qui est passée de 10 milliards d'euros en 2017 à plus de 15, 3 milliards d'euros en 2022.
Jamais l'APD française n'a été aussi substantielle.
Le programme 209 « Solidarité à l'égard des pays en développement », qui relève de mon ministère, s'inscrit pleinement dans cette trajectoire. Il atteindra ainsi, hors dépenses de personnel, 3, 265 milliards d'euros en 2024.
Avec le programme 110 « Aide économique et financière au développement » piloté par le ministère de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, les crédits de la mission budgétaire « Aide publique au développement » s'établissent à 5, 91 milliards d'euros contre 2, 38 milliards d'euros en 2017.
Ces moyens considérablement renforcés ont permis à la France de devenir en 2022 le quatrième bailleur mondial. Ils nous obligent, mesdames, messieurs les sénateurs.
Le conseil présidentiel du développement, réuni au mois de mai, et le Cicid, réuni au mois de juillet, ont été l'occasion de mener ce chantier de méthode. Nous devons en effet à nos concitoyens, mais aussi aux bénéficiaires de notre aide, d'être plus efficaces, plus réactifs, plus transparents. Nous avons à cet effet amorcé des inflexions significatives.
En premier lieu, nous avons supprimé la démarche géographique au profit d'une nouvelle approche, plus partenariale, plus souple.
Soucieux de nos engagements internationaux et des besoins aigus des pays les moins avancés, nous avons, en parallèle, pris l'engagement de diriger au moins 50 % de notre effort financier bilatéral vers ces derniers. Ces partenaires font en effet trop souvent face à l'accumulation des défis et des crises, ayant difficilement accès à l'emprunt et n'attirant pas ou peu les investisseurs.
Ce faisant, nous signalons clairement notre détermination à continuer à lutter contre la pauvreté, tout en remettant la défense de nos intérêts et de nos valeurs au cœur du dialogue autour de nos moyens.
En deuxième lieu, nous avons mis en place dix objectifs prioritaires pour orienter notre action. Ces dix objectifs recouvrent plusieurs thèmes majeurs, tels que la transition énergétique, la préservation de la biodiversité, la santé, l'éducation, les droits des femmes, les droits humains ou la lutte contre l'immigration illégale.
Je ferai le point une fois par an avec Bruno Le Maire sur la mise en œuvre de ces objectifs, car nous devons pouvoir démontrer, chiffres à l'appui, que notre engagement emporte des résultats.
En troisième lieu, nous travaillons sur les instruments qui devront nous permettre d'atteindre nos objectifs. Ainsi, les crédits du programme 209 abonderont notamment les dons-projets de l'AFD, qui doivent permettre de déployer sur le terrain des projets dans des domaines aussi variés que les infrastructures, la santé, l'éducation, l'agriculture ou l'aide au secteur privé, pour n'en citer que quelques-uns.
Les crédits du programme 209 alimenteront également le Fonds Équipe France (FEF), nouveau dispositif de mon ministère, qui doit permettre à nos ambassades d'instruire et de mettre en œuvre des projets de petite taille, dont le coût est inférieur à 2 millions d'euros et qui répondent à la fois à une logique d'impact rapide, de visibilité de notre action, mais aussi de laboratoire, ce qui permettra, en cas de succès, un passage à l'échelle supérieure.
En dernier lieu, j'estime que la visibilité des financements français, qui constitue un autre enjeu, doit être améliorée.
Nous avons donc lancé le chantier d'une signature unique « France », permettant d'identifier immédiatement les actions menées grâce aux financements français. Notre objectif est de mieux valoriser notre action tant auprès de nos concitoyens que des bénéficiaires.
Vous le voyez, mesdames, messieurs les sénateurs, le programme 209 est le fer de lance de l'approche rénovée que nous mettons en œuvre pour notre politique de développement.
Pour être, comme le demande la loi de programmation du 4 août 2021, un pilier de notre politique étrangère, notre politique de développement doit servir notre approche en matière d'influence, sans naïveté et avec une exigence de résultats.
En ce qui concerne les enjeux globaux, que le Président de la République nous a clairement assignés comme prioritaires, la France continuera à contribuer à la définition et à la mise en œuvre des réponses internationales à leur apporter.
J'évoquerai d'abord le climat et l'environnement. La France s'est résolument engagée dans la mise en œuvre de l'accord de Paris sur le climat. Depuis 2021 et jusqu'en 2025, elle s'est notamment engagée à investir 6 milliards d'euros par an au titre de l'action climatique au bénéfice des pays en développement.
Pour faire face à la triple crise environnementale – relative à la fois au climat, à la biodiversité et à la pollution – et aux besoins de développement, la France a organisé, en juin dernier, le sommet de Paris pour un nouveau pacte financier mondial, lequel a arrêté une feuille de route qui a déjà été adoptée à ce jour par quarante-deux pays.
La santé reste quant à elle le premier poste de l'APD française. L'APD bilatérale allouée à ce secteur s'est élevée à 761 millions d'euros en 2022, tandis qu'au plan multilatéral nous engagerons plus de 2 milliards d'euros sur la période 2023-2025 au bénéfice de grandes initiatives mondiales.
L'éducation représente près de 10 % de notre APD, ce qui place la France au rang – qu'elle entend conserver – de troisième bailleur mondial pour ce secteur. Nos interventions soutiennent l'ensemble du continuum éducation-enseignement supérieur-formation.
Je dirai enfin quelques mots sur l'aide humanitaire, dont le montant avoisinera en 2024 les 900 millions d'euros. Ce montant comprend les 270 millions d'euros consacrés à la provision pour crise majeure, qui est maintenue à son niveau de 2023, ce qui nous paraît particulièrement nécessaire compte tenu de la situation internationale, sans même penser seulement au Proche-Orient.
Cette aide humanitaire permet de mettre en œuvre rapidement les engagements politiques non anticipés. Elle a largement prouvé son utilité et nous a permis de retrouver, puis de tenir notre rôle d'acteur de premier plan sur la scène internationale.
Comme vous le constatez, mesdames, messieurs les sénateurs, le programme 209 voit ses moyens consolidés au bénéfice d'une stratégie profondément rénovée et volontariste. §