C'est une véritable question que celle de la surpopulation carcérale.
Vous avez raison d'affirmer que la justice n'est pas laxiste, madame la sénatrice ; je ne cesse de le dire moi-même. Il semble que certains font leur miel de cet axiome ou de ce théorème ; je ne sais comment le qualifier. En réalité, les peines tant correctionnelles que criminelles ont augmenté considérablement – je rappelle d'ailleurs à cet égard que, en matière criminelle, c'est un jury populaire qui statue –, la Cour des comptes en a fait le constat et la surpopulation carcérale en est la démonstration époustouflante.
J'ai mis en place un mécanisme de libération sous contrainte qui consiste à envisager, sur le reliquat de la peine à subir, une décision judiciaire de libération en assortissant celle-ci d'un certain nombre de garanties afin d'éviter les sorties sèches. Ce mécanisme n'est pas uniformément appliqué et le delta observé fait même état d'un rapport d'un à dix entre les ressorts qui l'utilisent beaucoup et ceux qui y recourent peu : pour dix décisions de libération sous contrainte décidées dans certains ressorts, on en compte une seule dans d'autres.
J'ai alerté les procureurs sur cette forte disparité, qui demeure assez inexplicable à mes yeux : il est bien évident que je souhaite voir ce dispositif appliqué de façon plus homogène. Néanmoins, vous le savez, le garde des sceaux ne peut donner aucune directive et doit se contenter de publier des circulaires.
Au travers de la LOPJ, qui a été récemment adoptée – mais que, au demeurant, votre groupe n'a pas votée, madame la sénatrice –, nous avons renforcé l'assignation à résidence avec surveillance électronique (Arse), qui permet d'éviter les incarcérations. Par ailleurs, nous avons étendu les places de travail d'intérêt général (TIG) pour la délinquance de basse intensité, car, là aussi, nous avons constaté un certain nombre de difficultés. J'ai donc parfaitement conscience du problème.
Quant aux propositions issues des États généraux de la justice sur le seuil de criticité, elles ne me conviennent pas, car je pense qu'elles seraient injustes ; nous pourrions longuement débattre de cette question. De mon côté, je réfléchis à améliorer la situation qui, pour ne rien vous cacher, ne me satisfait pas.
Comme l'a dit très justement dit M. Brossat lors de la discussion générale, il faut envisager la réinsertion des détenus, mais encore faut-il que les conditions de détention soient dignes. Du reste, monsieur Brossat, l'administration pénitentiaire ne dit pas autre chose !
Il convient donc de réfléchir à tout cela et de mettre en place un certain nombre de mécanismes ; sachez que j'y travaille. Pour autant, il me semble paradoxal d'exiger du ministre – mais je ne remets nullement en cause votre à le faire – qu'il règle les difficultés auxquelles il est confronté sans lui donner un coup de main budgétaire. J'ai un peu de mal à comprendre, mais sans doute m'expliquerez-vous cela ultérieurement.