Intervention de Audrey BÉLIM

Réunion du 7 décembre 2023 à 10h30
Loi de finances pour 2024 — Demande de priorité

Photo de Audrey BÉLIMAudrey BÉLIM :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, les rapporteurs ayant déjà présenté les crédits de la présente mission et puisqu’ils seront examinés en détail au cours des prochaines heures, je me limiterai, pour ouvrir mon propos, à regretter qu’entre le texte déposé à l’Assemblée nationale et la version transmise au Sénat nos territoires ultramarins aient – fait très rare – perdu des ressources.

En effet, monsieur le ministre, si le Gouvernement a bel et bien retenu, dans le texte issu du 49.3, quelques crédits supplémentaires proposés par nos collègues députés, ces sommes ne suffisent pas à compenser les quelque 150 millions d’euros disparus à la suite de l’adoption de l’amendement du rapporteur général du budget de l’Assemblée nationale, rédigé sur le fondement d’un rapport peu probant, car on ne sait qui, du rapport ou de l’amendement, justifie l’autre.

Quoi qu’il en soit, ce rapport et cet amendement sont malheureusement symptomatiques de la façon dont Bercy considère nos territoires, nos élus et nos acteurs économiques. La réforme des aides économiques engagée dans le PLF pour 2019 était pourtant un cas d’école. Mais la leçon n’a manifestement pas été complètement retenue, et la généralisation du « réflexe outre-mer », évoquée depuis 2017, se fait attendre.

Il importe, monsieur le ministre, de prendre en compte la structure géographique de nos pays, mais aussi d’adapter les normes et les lois à chacun d’entre eux. Le « réflexe outre-mer », c’est considérer l’outre-mer dans sa singularité ; c’est aussi admettre que cette singularité s’apprécie territoire par territoire et non selon une logique globale.

L’éloignement et l’insularité restent des facteurs si aggravants des problèmes structurels de nos territoires que, pour les traiter, la transversalité s’avère primordiale.

Nous devons vous le rappeler, monsieur le ministre, pour qu’inlassablement vous le marteliez auprès de vos collègues du Gouvernement et qu’ainsi s’automatise le réflexe outre-mer.

Comment ne pas être désarçonné à la lecture de l’article 50, qui fait reposer le dispositif MaPrimeRénov’ sur un diagnostic de performance énergétique (DPE) strictement hexagonal, quand le Ciom, l’été dernier, a acté la mise en application des DPE ultramarins en 2028 ?

Procéder de la sorte, c’est priver quelque 2 millions de Français d’une aide bénéfique tant pour la transition écologique que pour le logement. MaPrimeRénov’ permet en effet de lutter contre la vacance dans le parc locatif privé, contre l’habitat indigne et, in fine, contre la crise du logement. C’est un levier évident ; et pourtant nous ne pouvons en bénéficier.

Les exemples de ce type ne manquent pas. Trop de lois et de décrets sont source de blocages qui entravent le travail de nos collectivités.

Le bâti est souvent vétuste, mais il est impossible de le rénover, car les normes hexagonales résistent mal au climat tropical.

Outre-mer, la loi Littoral s’applique parfois à plus de 2 000 mètres d’altitude, où elle doit donc se conjuguer avec la loi Montagne, quand elle ne la contredit pas.

De même, pour ce qui concerne les quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV), les zonages ultramarins sont bien souvent inadaptés, qu’il s’agisse du logement, de l’enseignement, du sport ou de la santé. C’est l’île de La Réunion toute entière, et même les cinq départements d’outre-mer, qui devraient être classés en QPV, voire bénéficier d’un soutien renforcé.

Le temps me manque pour évoquer les difficultés récurrentes de notre tissu économique. Je songe notamment à nos TPE et à nos PME, qui manquent de trésorerie et sont entravées par les délais de paiement ou par l’absence de capitaux.

En parallèle, nos outre-mer font face aux problématiques liées au choc démographique du grand âge : pour les Antilles ou pour La Réunion, ces bouleversements sont déjà là !

Enfin, il faut aborder avec sagacité et volontarisme la question centrale de la coopération à l’échelle du bassin régional. L’enjeu, à cet égard, est de libéraliser certaines activités et certains marchés pour favoriser la création d’emplois locaux. Il s’agit aussi, à titre expérimental, d’activer de nouveaux leviers pour lutter contre la vie chère.

L’examen des amendements nous donnera l’occasion de revenir plus en détail sur ces sujets et sur bien d’autres encore, je l’espère, comme la protection de la biodiversité.

Mes chers collègues, je sais pouvoir compter sur votre implication et sur votre absence de parti-pris pour lutter contre chaque menace et pour défendre chaque atout !

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