Intervention de Cédric Vial

Réunion du 7 décembre 2023 à 21h30
Loi de finances pour 2024 — Compte de concours financiers : avances à l'audiovisuel public

Photo de Cédric VialCédric Vial :

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, les médias audiovisuels sont en pleine transformation et connaissent une véritable révolution de leurs usages.

Avec la multiplication des écrans et le succès des plateformes internationales, particulièrement auprès des jeunes, le temps des programmes de télévision linéaires partagés en famille ou entre amis est quasiment révolu.

La massification des fausses informations et les progrès de l’intelligence artificielle amplifieront encore demain le phénomène des bulles numériques, déjà à l’œuvre.

Ces réalités alternatives progressent au détriment de notre culture commune. Ces bouleversements sont autant de défis pour notre secteur audiovisuel public.

Comme ce fut le cas historiquement après-guerre ou encore dans les années 1980, un tournant stratégique est aujourd’hui nécessaire.

Notre pays a la chance de disposer d’un audiovisuel public fort qui reste présent dans le quotidien d’une grande majorité de Français. Son rôle est majeur pour résister à la vague que je viens d’évoquer. Des médias de services publics indépendants, modernisés et dotés d’une stratégie claire et d’un financement pérenne sont plus que jamais nécessaires.

Or que nous propose le Gouvernement dans ce projet de loi de finances ? Une trajectoire pluriannuelle d’augmentation des crédits adossée à une stratégie floue, voire hésitante, élaborée en dehors de tout débat démocratique.

Cette trajectoire financière s’inscrit sur la durée des prochains COM des entreprises de l’audiovisuel public, sur lesquelles les commissions parlementaires et l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom) seront consultées pour avis.

Ces COM auraient dû nous parvenir avant le projet de loi de finances, mes chers collègues. Nous n’en serons toutefois saisis que l’an prochain, alors qu’ils seront déjà engagés, comme si la consultation du Parlement n’était qu’une simple formalité.

Telle n’est pas notre conception du rôle du Parlement. Il aurait évidemment fallu discuter d’abord des objectifs, de la méthode et de l’évaluation des résultats pour que nous puissions nous prononcer en toute connaissance de cause sur la trajectoire financière proposée.

En nous demandant de voter les moyens avant de connaître et de discuter des objectifs, on nous demande d’« acheter un chat dans un sac », selon l’expression auvergnate consacrée.

C’est d’autant plus vrai et flagrant que ce projet de loi de finances comporte un nouveau programme, dit de transformation, dont les crédits sont alloués sous conditions et pourront être retirés aux opérateurs. Comment accepter dès lors que les objectifs ne soient pas clarifiés et que la méthode d’évaluation des résultats ne soit pas explicitée devant la représentation nationale ?

À cela s’ajoute une absence de perspective sur le mode de financement de l’audiovisuel public après 2025. Si la Lolf n’est pas rapidement modifiée, nous nous dirigeons vers une budgétisation de l’audiovisuel public. Ce choix par défaut serait regrettable. C’était le projet initial du Gouvernement, mais ce serait un contresens historique.

Vous nous avez indiqué votre position à titre personnel, madame la ministre. Pouvez-vous aujourd’hui nous donner la position du Gouvernement sur le sujet ? Et sinon, qui le peut ?

Le Sénat a formulé des propositions en matière de gouvernance. Il a notamment adopté, en juin dernier, la proposition de loi relative à la réforme de l’audiovisuel public et à la souveraineté audiovisuelle, déposée par le président Laurent Lafon et rapportée par Jean-Raymond Hugonet. Ces propositions sont restées à ce jour sans suite.

En définitive, la méthode n’est donc pas satisfaisante.

En dépit des évolutions positives des différents acteurs de l’audiovisuel public, la commission de la culture déplore une absence de direction claire. Elle a donc émis un avis défavorable à l’adoption de ces crédits.

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