Mes chers collègues, nous recevons aujourd'hui la secrétaire d'État auprès de la ministre de l'Europe et des affaires étrangères, chargée des affaires européennes qui va nous rendre compte du Conseil européen des 26-27 octobre dernier, en amont duquel nous avions débattu très précocement en plénière : c'était il y a déjà presque un mois !... Sur l'organisation de ces débats en séance, j'espère que nous trouverons moyen de les tenir au plus près des dates de réunion du Conseil européen et de les rendre plus dynamiques. Nous avons fait des propositions en ce sens. Je vais échanger cet après-midi à ce sujet avec M. Franck Riester, ministre chargé des relations avec le Parlement.
Je rappelle donc les sujets majeurs qui étaient à l'ordre du jour du Conseil européen : l'Ukraine, la révision du cadre financier pluriannuel, l'économie et les migrations. À ces sujets déjà difficiles, s'est ajouté celui du Proche-Orient, trois semaines après le terrible assaut terroriste du Hamas sur Israël. C'est finalement lui qui aura mobilisé le plus les chefs d'État ou de gouvernement et mis à rude épreuve leur unité. Pourriez-vous à ce propos nous confirmer que le Premier ministre espagnol, malgré sa position théoriquement neutre de président du Conseil, a plaidé pour que l'Union demande un cessez-le-feu, et finalement obtenu que les 27 États membres appellent à l'organisation d'une prochaine conférence internationale sur la paix ? Deux semaines plus tard, les belligérants semblent sourds à cet appel et l'organisation, demain en France, d'une conférence humanitaire brouille un peu plus le message : le Conseil européen est-il finalement en mesure, d'une part, de définir le rôle que devrait jouer l'Union européenne dans le drame qui se joue à Gaza et, d'autre part, de préciser qui est légitime à déployer ce rôle, alors que la présidente de la Commission européenne ne cesse de prendre des initiatives diplomatiques au nom de l'Union, encore une fois il y a 48 heures ? Par ailleurs, sur ce même sujet, j'ai pu lire ce matin un tweet du ministère de l'Europe et des affaires étrangères, réagissant à l'arrachage d'affiches des otages par une ancienne collaboratrice du ministère. Ces faits sont inquiétants. Une procédure a-t-elle été lancée ?
Concernant la révision du cadre financier pluriannuel, les 27 n'ont pu se mettre d'accord : nombre d'entre eux sont réticents à l'égard de la rallonge budgétaire que la Commission européenne réclame pour elle-même, et deux États, la Hongrie et la Slovaquie, refusent d'accorder à l'Ukraine une nouvelle enveloppe de 50 milliards d'euros. Comment sortir de cette impasse budgétaire d'ici le prochain Conseil européen, dernière échéance envisageable puisque l'aide à l'Ukraine expire à la fin de l'année ? De même, sur la révision des règles de gouvernance économique, les divergences persistantes rendent peu probable un accord avant la fin de l'année, ce qui signifierait un retour dès le 1er janvier prochain aux règles du pacte suspendues depuis la pandémie...
Sur le sujet migratoire, le Conseil européen n'a pas non plus permis de percée décisive. L'Union parviendra-t-elle, selon vous, à conclure le nouveau pacte sur la migration et l'asile avant l'interruption des trilogues dès février prochain ?
Je souhaiterais enfin vous poser deux questions sur l'actualité des deux semaines écoulées depuis la réunion du Conseil européen. J'aimerais d'abord vous entendre sur l'initiative qu'a prise la France d'assigner la Commission européenne devant la Cour de justice pour avoir recruté des fonctionnaires sur des épreuves exclusivement en langue anglaise. Notre commission, qui a déjà réclamé haut et fort un meilleur respect du multilinguisme par la Commission européenne, se félicite de cette démarche qui vise à faire sanctionner une telle discrimination qui favorise les anglophones, en violation des traités. Est-ce à dire que le Gouvernement estime désormais que la pression politique ne suffit plus et que seule la voie contentieuse peut permettre d'enrayer le recul de l'usage du français dans les institutions européennes ?
Enfin, un mot du paquet élargissement qu'a publié ce matin la Commission et sur lequel se fondera le Conseil européen de mi-décembre pour répondre aux attentes des Balkans occidentaux, de l'Ukraine, de la Moldavie et de la Géorgie : quelle appréciation portez-vous sur ce rapport de la Commission, et notamment sur ses préconisations concernant la Géorgie et la Bosnie-Herzégovine ? Par ailleurs, pouvez-vous nous rendre compte des échanges que vous avez eus jeudi dernier avec vos homologues, conviés à Berlin pour envisager les réformes internes de l'Union qui s'imposent, en parallèle du processus d'élargissement ?