Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, les outre-mer, ce sont 2, 6 millions de Français, onze régions et collectivités territoriales réparties à travers trois océans, 95 % de notre espace maritime. C'est la présence de la France aux quatre coins du globe, un atout en matière de diplomatie et de défense, une dynamique évidente pour le tourisme, une diversité et une richesse culturelle indiscutables.
Les outre-mer sont confrontés aux mêmes défis que l'Hexagone, avec des intensités parfois encore plus fortes : le chômage et l'inflation, l'immigration clandestine et l'insécurité, le climat et les énergies, l'eau et le logement. Les sujets sont plus ou moins prégnants selon les territoires. Les traiter exige une bonne connaissance des réalités locales, requiert de s'appuyer sur les bons interlocuteurs et nécessite des actions bien ciblées, avec une meilleure coordination des politiques de l'État.
La mise en place du Ciom, qui fait suite aux Assises des outre-mer, était nécessaire. Elle traduit la volonté affichée par le Gouvernement de s'engager politiquement, donc budgétairement, dans ce dossier. Entre 2017 et 2022, plus de 120 milliards d'euros ont été investis dans la santé, les infrastructures, le logement ou la sécurité. Près de 1 300 fonctionnaires supplémentaires ont été déployés dans les forces de sécurité, 55 000 logements sociaux ont été construits ou réhabilités, 92 millions d'euros ont été consacrés à la lutte contre la pollution au chlordécone, 33 000 jeunes ont été accompagnés vers l'emploi grâce au service militaire adapté (SMA).
Il serait donc injuste de dire que rien n'a été fait en faveur des outre-mer lors du premier quinquennat. Nous constatons toutefois que les problèmes demeurent, en grande partie à cause de facteurs extérieurs et mondiaux, voire que les écarts se creusent.
Réuni au mois de juillet dernier, le Ciom affichait l'objectif ambitieux de proposer des solutions concrètes aux problématiques spécifiques dans les départements et régions d'outre-mer (Drom) et collectivités d'outre-mer (COM). Les élus ultramarins, tout comme nos concitoyens d'outre-mer, sont devenus prudents en la matière. Une simple volonté de bien faire ne leur suffit plus : ils craignent les coquilles vides.
C'est tout l'objet de notre débat aujourd'hui. Monsieur le ministre, comment comptez-vous mettre en œuvre les mesures du Ciom ? Selon quel ordre de priorité ? Sous quels délais ? Ce comité a adopté soixante-douze mesures, dont certaines avaient déjà été proposées par la délégation sénatoriale aux outre-mer. Nous avons eu l'occasion d'en examiner certaines la semaine dernière, en débattant des crédits de la mission correspondante dans le projet de loi de finances pour 2024.
Globalement comme dans le détail, les mesures issues du Ciom semblent adaptées aux défis : aides à la mobilité entre Hexagone et outre-mer, réforme de l'octroi de mer, renforcement du contrôle de la concurrence ou encore développement des centres de formation d'apprentis (CFA), pour ne citer que quelques exemples.
Ne pouvant parler de tous les sujets, je concentrerai mon propos sur l'évolution démographique aux Antilles. En Guadeloupe et en Martinique notamment, la population vieillit et diminue. Ce n'est pas seulement que sa croissance ralentit : c'est une baisse nette. En Guadeloupe, le nombre d'habitants diminue en moyenne de près de 1 % par an.
Cette baisse est en partie liée au recul du taux de natalité, qui touche l'ensemble des pays occidentaux. Elle est aussi et surtout due au départ des jeunes, qui partent étudier dans l'Hexagone et qui, par manque d'opportunités professionnelles ou par choix de vie, ne reviennent pas. Nous avons évoqué le sujet ce matin lors d'une réunion de la délégation aux outre-mer : il semblerait que le Québec attire nombre de jeunes.
Cela nous interroge sur l'attractivité et le développement économique des Antilles, comme sur la prise en charge de la dépendance à l'avenir. Actuellement, le système tient en partie grâce à la solidarité familiale, mais, si les enfants sont à plusieurs milliers de kilomètres, le problème sera d'une autre ampleur.
Monsieur le ministre, ma question est assez simple à formuler. Y répondre, j'en conviens, est beaucoup plus complexe. Comment comptez-vous créer les conditions qui feront que les jeunes resteront ou reviendront aux Antilles, voire que des Hexagonaux viendront s'y installer ?