Intervention de Philippe Folliot

Réunion du 14 décembre 2023 à 10h30
Comment le gouvernement compte-t-il appliquer au plus vite les mesures du comité interministériel des outre-mer — Débat organisé à la demande du groupe rassemblement des démocrates progressistes et indépendants

Photo de Philippe FolliotPhilippe Folliot :

Je souhaite que les outre-mer ne soient plus pas rattachés au ministère de l'intérieur, où l'on constate qu'ils ne sont pas prioritaires dans l'agenda du ministre, ce qui est regrettable.

Les soixante-douze mesures du Ciom sont intéressantes, même si certaines sont anecdotiques. Le point central en est la réforme de l'octroi de mer, qu'il faut entreprendre en étroite collaboration avec les collectivités, car elles seront les premières concernées par ses conséquences.

On peut toutefois regretter l'absence d'une stratégie globale dans la politique de l'État vis-à-vis de nos outre-mer : pas de grand souffle, pas de perspective.

Je citerai un exemple concret : l'OCDE a annoncé que, dans les dix ans à venir, la taille de l'économie bleue doublera à l'échelle mondiale. Pour la France, cela représente 90 milliards d'euros, 360 000 emplois directs et 500 000 emplois indirects. Si notre pays, déjà tourné vers la mer et les outre-mer, suivait la moyenne mondiale en termes de progression de l'économie bleue, cela permettrait de créer 300 000 emplois dans les dix prochaines années. Si l'État faisait montre de volontarisme, nous pourrions faire en sorte que 10 % à 20 % de ces emplois soient créés outre-mer : ce seraient 50 000 emplois nouveaux.

Certes, cette progression ne sera pas uniforme dans tous les secteurs d'activité. Personne n'envisage une progression similaire dans le secteur de l'énergie offshore, que ce soit le pétrole, le gaz ou autre, ou dans celui de la pêche, mais dans d'autres secteurs, comme les énergies marines renouvelables ou l'aquaculture par exemple, les perspectives sont intéressantes, notamment pour nos outre-mer.

On peut donc déplorer l'absence d'un cadre, d'un souffle, d'une volonté et d'objectifs visant à faire des outre-mer une chance exceptionnelle pour notre pays.

La France dispose du premier domaine maritime au monde, 97, 5 % se trouvent outre-mer. Comment le valoriser mieux pour offrir des perspectives à ces territoires ? Nous devons sortir des logiques d'accompagnement social de nos outre-mer pour aller vers de véritables stratégies de développement économique. Faire de nos outre-mer de petits Singapour francophones disposés aux quatre coins de la planète : voilà une perspective réellement positive ! Au-delà des enjeux quotidiens, nous devons fixer un cap et une vision pour les outre-mer.

Lors de l'examen de la loi relative à la programmation militaire pour les années 2024 à 2030 et portant diverses dispositions intéressant la défense, j'ai signalé que l'état de déshérence des forces de souveraineté, que l'on constatait parfois, était une problématique pour nos départements, collectivités et territoires d'outre-mer. La présence militaire a en effet des implications géostratégiques et économiques non négligeables.

La France fait partie des cinq pays de l'Union européenne qui ont des possessions outre-mer. Pour autant, pour les quatre autres – le Danemark, les Pays-Bas, l'Espagne et le Portugal –, celles-ci sont situées uniquement dans l'Atlantique. La France est la seule à être présente dans l'Indo-Pacifique. Partout où nos forces armées sont présentes outre-mer, cela crée des emplois directs ou induits. Pourtant, en trente ans, les effectifs des forces de souveraineté y sont passés de 15 000 à moins de 7 000, ce qui a des conséquences géostratégiques, mais aussi économiques.

On pourrait multiplier les exemples, mais la seule question qui vaille est la suivante. Quelle politique, quelle stratégie et quelle volonté réelle avons-nous vis-à-vis de nos outre-mer ? Voulons-nous en faire une chance pour notre pays, un élément positif et distinctif dans le concert des nations ?

Je partage la vision selon laquelle nos outre-mer sont non pas une charge, mais une formidable opportunité. Il faut mettre en place un cadre pour valoriser cette opportunité. En dehors des éléments discutés lors du Ciom, monsieur le ministre, nous attendons de vous et du Gouvernement que vous définissiez un cap, une stratégie, une volonté et une réelle ambition pour les outre-mer.

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