Intervention de Laurence Boone

Réunion du 13 décembre 2023 à 21h30
Débat préalable à la réunion du conseil européen des 14 et 15 décembre 2023

Laurence Boone :

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je me réjouis que nous nous retrouvions à moins d’un jour – douze heures exactement – de la prochaine réunion du Conseil européen ; et j’espère que le nouveau format décidé pour le présent débat nous donnera satisfaction.

Comme vous le savez, nous sommes à la veille d’un Conseil européen décisif. Les chefs d’État et de gouvernement des vingt-sept États membres de l’Union européenne vont se réunir demain et vendredi pour la dernière fois de ce semestre de présidence espagnole du Conseil et vont y aborder des sujets dont nous pouvons dire, me semble-t-il, qu’ils sont d’importance historique : le soutien à l’Ukraine et la question de l’élargissement ; la révision à mi-parcours du cadre financier pluriannuel ; le conflit toujours en cours au Proche-Orient ; et, dans ce lourd contexte, les questions de sécurité et de défense européennes.

D’autres sujets seront à l’ordre du jour : une discussion stratégique sur les migrations et la condamnation de leur instrumentalisation ; la COP28 ; la lutte contre les discours de haine.

C’est évidemment l’Ukraine qui sera au cœur des discussions, car nous vivons un moment où doivent être prises, dans les prochains jours et les prochaines semaines, des décisions qui, je le disais, sont d’importance historique.

Ces décisions s’imposent, en effet, si nous voulons démontrer que l’Union européenne sera aux côtés de l’Ukraine aussi longtemps qu’il le faudra et que nous préparons son avenir européen.

La Russie espère entrevoir les signes d’une division parmi les soutiens de l’Ukraine et capitaliser sur une prétendue fatigue de l’Union. Évidemment, il n’en est rien et il est indispensable que le Conseil envoie un signal très clair de notre détermination, que notre soutien à l’Ukraine soit inscrit dans la durée et que nous continuions de répondre aux besoins les plus urgents.

Des décisions courageuses sont nécessaires pour être à la hauteur des enjeux du moment.

L’Ukraine entre dans un nouvel hiver difficile, un nouvel hiver de guerre ; elle place des attentes élevées dans le Conseil européen. Comme le Président de la République l’a rappelé en mai dernier à Bratislava, il est nécessaire d’ancrer l’Ukraine dans l’Europe : c’est une nécessité stratégique et c’est notre intérêt.

Au cœur de cette réunion du Conseil se tiendra, vous le savez, une discussion sur l’élargissement de l’Union européenne. Comme chaque mois de décembre, le Conseil européen reviendra sur le paquet Élargissement, dont l’édition 2023 a été publiée par la Commission le 8 novembre dernier. Sur la base de ce rapport, nos chefs d’État et de gouvernement vont être invités à se prononcer sur l’ouverture des négociations d’adhésion avec l’Ukraine, la Moldavie et la Bosnie-Herzégovine, ainsi que sur l’octroi du statut de candidat à la Géorgie. Nous avons adopté hier, lors du conseil Affaires générales, des conclusions relatives aux progrès de ces pays et le Conseil européen sera appelé demain à en tirer les conclusions quant à l’ouverture de négociations.

À cet égard, la ligne de la France a toujours été très claire : d’une part, nous devons envoyer à chacun des pays concernés un signal qui soit à la hauteur des progrès qu’il a réalisés ; d’autre part, nous devons continuer d’avancer dans la réforme de l’Union européenne, car la perspective de l’élargissement nous oblige à réfléchir à nos objectifs de long terme et aux moyens de rendre l’Union plus forte.

La commission des affaires européennes du Sénat – je le dis sous le contrôle de M. le président Rapin – a du reste organisé, le 30 novembre dernier, une table ronde ayant pour thème l’élargissement de l’Union européenne, et j’espère que nous aurons l’occasion de revenir sur cette question au cours de nos échanges.

Le soutien à l’Ukraine passe non seulement par les décisions historiques que j’ai évoquées, mais aussi par un volet financier. La proposition de création d’une nouvelle facilité pour l’Ukraine est ainsi au centre de la révision à mi-parcours du cadre financier pluriannuel (CFP), sur laquelle les discussions sont toujours en cours.

Dans ces négociations, la France défend la nécessité que l’Union européenne se dote des moyens nécessaires à la mise en œuvre de nos priorités politiques, tout en limitant autant que possible les effets de la révision pour les finances publiques des États membres.

Le Président de la République rappellera donc, lors du Conseil européen, que l’enjeu est bien de démontrer la capacité de l’Union à répondre aux défis auxquels nous faisons face collectivement, à savoir le soutien à l’Ukraine, le renforcement de la souveraineté économique et la gestion efficace et équilibrée des migrations.

Pour ce qui est de ce cadre pluriannuel, de nouveaux chiffres ont été mis sur la table en début de semaine par le président du Conseil européen, Charles Michel. Nous ferons tout notre possible pour que, sur cette réforme, un consensus se dégage du Conseil, demain et vendredi, dans le respect des principes que je viens de rappeler.

Je rappelle par ailleurs, puisque nous parlons des questions budgétaires, que Mmes les sénatrices Blatrix Contat et Lavarde ont présenté, le 7 décembre, une communication sur la révision du pacte de stabilité et de croissance. Comme vous le savez, en la matière, les discussions sont toujours en cours, mais nous pourrons bien sûr y revenir durant nos échanges de ce soir.

Je dis quelques mots également de la négociation de l’agenda stratégique. Il s’agit d’ordinaire d’un exercice assez consensuel ; pour la prochaine période de cinq ans, néanmoins, il revêt une importance toute particulière. Il va permettre en effet de préciser dès 2024 la façon dont nous voulons construire une Europe plus forte et qui a vocation à s’élargir.

Depuis 2019, énormément de décisions qui sont à la fois inédites et de grande ampleur ont été prises avec rapidité et efficacité : plan de relance européen ; mutualisation de l’achat de vaccins ; financement par l’Union de l’achat d’armes pour soutenir l’Ukraine.

L’Europe a également opéré un profond changement de doctrine en assumant la nécessité de devenir plus souveraine, qu’il s’agisse d’énergie, d’industrie, d’économie numérique, de santé ou encore de défense. Nous devrons évidemment travailler, au cours des cinq prochaines années, à poursuivre et à amplifier ces efforts.

J’ai bien entendu pris connaissance de la proposition de résolution européenne présentée par Didier Marie et Jean-François Rapin sur le programme de travail de la Commission européenne pour 2024, adoptée par votre commission des affaires européennes le 7 décembre dernier. Je ne peux que partager pleinement, dans le contexte que je viens de décrire, votre diagnostic quant à l’importance d’un approvisionnement sûr et durable de l’Union européenne en matières premières critiques.

J’en viens à la discussion sur les migrations.

La pression migratoire vers l’Union se maintient à un niveau élevé sur les onze premiers mois de l’année 2023. Elle se concentre en particulier sur la route de la Méditerranée centrale, où l’on enregistre une augmentation de 63 % des flux migratoires irréguliers en comparaison avec la même période l’an dernier.

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