Intervention de Jean-François Rapin

Réunion du 13 décembre 2023 à 21h30
Débat préalable à la réunion du conseil européen des 14 et 15 décembre 2023

Photo de Jean-François RapinJean-François Rapin :

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, notre débat porte sur la prochaine réunion du Conseil européen qui se tient demain, ce qui nous permet d’échanger utilement avec le Gouvernement. Je me réjouis que nous expérimentions un nouveau format pour ce débat, que j’espère ainsi plus interactif et vivant.

Nous sommes à la veille d’une réunion qui s’annonce stratégique à plus d’un titre pour l’Union européenne. Sans doute les chefs d’État et de gouvernement s’accorderont-ils aisément pour saluer ensemble l’accord intervenu à la COP28 de Dubaï ? Que la planète convienne d’abandonner les énergies fossiles et endosse les objectifs que l’Union s’est fixés pour 2030 en matière d’énergies renouvelables et d’efficacité énergétique est une bonne nouvelle pour le climat. Qu’elle range le nucléaire parmi les énergies propres est une bonne nouvelle pour la France !

L’unité entre les vingt-sept sera moins évidente sur les sujets à l’ordre du jour du Conseil européen : le temps compté me contraint à en retenir deux.

Le premier sujet sur lequel l’unité européenne ne saurait faillir est la continuité du soutien à l’Ukraine, au moment où la contre-offensive ne produit pas les fruits espérés et où les Européens n’arrivent pas à fournir autant d’obus que ce qui avait été initialement annoncé, comme l’a rappelé à juste titre Pascal Allizard. Durant ce « faux plat » éprouvant, ce n’est pas le moment de faiblir. Réitérer notre soutien serait contribuer au « cadeau de Noël » que le Président Zelensky, inquiet de la situation, est allé demander hier au président Biden et au Congrès américain, qui hésite et semble éprouver des doutes.

Pouvez-vous, madame la secrétaire d’État, nous confirmer que l’Union européenne restera ferme dans son soutien à l’Ukraine, qu’un compromis sera trouvé sur le douzième paquet de sanctions contre la Russie et qu’il pourra être recouru aux actifs immobilisés pour alimenter l’aide européenne à l’Ukraine ?

Il est en effet essentiel de mobiliser tous les moyens possibles de financement au bénéfice du soutien à l’Ukraine. La rallonge de 50 milliards prévue en ce sens dans la révision proposée du cadre financier pluriannuel se justifie, mais il faut absolument minimiser le ressaut sur les contributions nationales, et donc explorer toutes les possibilités de redéploiements budgétaires, sans porter atteinte aux priorités stratégiques et aux politiques d’avenir de l’Union. Peut-on espérer, madame la secrétaire d’État, que le Conseil européen parvienne à s’entendre sur une révision du cadre financier pluriannuel dans le respect de ces contraintes que nous jugeons essentielles ?

Le deuxième grand défi pour l’unité européenne lors du Conseil européen de demain est l’élargissement. Les chefs d’État et de gouvernement devront décider s’ils suivent la proposition que fait la Commission européenne d’ouvrir les négociations d’adhésion avec l’Ukraine, la Moldavie, voire la Bosnie-Herzégovine, et de reconnaître officiellement le statut de candidat à la Géorgie.

Cette décision est très attendue par l’Ukraine, très inquiète du veto que la Hongrie menace d’opposer. Dans le contexte géopolitique actuel, nous ne pouvons que souscrire à l’ouverture de négociations, à condition toutefois de rappeler ce qui fut convenu à Grenade il y a deux mois : élargir l’Union européenne implique de la réformer. À défaut, nous risquerions de l’affaiblir.

La France exigera-t-elle demain de ses partenaires un engagement clair pour lancer une revue des politiques européennes dans la perspective d’un possible élargissement et pour envisager, si besoin, les évolutions institutionnelles afin d’éviter la paralysie d’une Union à trente-cinq ?

Pourrez-vous aussi nous dire si les pays des Balkans occidentaux réunis en sommet avec les vingt-sept aujourd’hui trouvent dans le plan de croissance de 6 milliards d’euros que leur promet l’Union européenne une motivation suffisante pour soutenir leur élan sur la route des réformes en vue de l’adhésion ? La géopolitique a ses exigences, mais n’y sacrifions pas nos valeurs !

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