Monsieur le ministre, avant de légiférer de nouveau sur la récidive, il faudrait procéder à une évaluation sur les actions menées et les instructions données.
Ce texte concerne la prévention, mais aussi et surtout la récidive. Vous le présentez alors même que ne sont pas encore publiés tous les décrets d'application de la loi du 12 décembre 2005 relative au traitement de la récidive des infractions pénales et qu'il n'y a pas eu d'évaluation.
Il faut dire que le texte de l'époque, qui était pourtant particulièrement répressif, ne devait pas convenir au ministre de l'intérieur et qu'il fallait par ce projet de loi revenir sur un texte voté peu de temps auparavant.
Le texte qui nous est soumis vise non pas la prévention du premier acte, puisque le texte ne prévoit aucune disposition destinée à lutter contre les conditions du passage à l'acte, mais la prévention de la récidive après un premier acte : en témoignent la mise en place de nouveaux fichiers, le contrôle des délinquants sexuels après leur sortie de prison et, plus loin, l'article 26, qui tend à allonger les délais de réhabilitation pour les récidivistes.
Parallèlement, le Gouvernement ne donne pas les moyens nécessaires - voire en retire - pour mettre en oeuvre les mesures existantes. Par exemple, la loi du 17 juin 1998 relative à la prévention et à la répression des infractions sexuelles ainsi qu'à la protection des mineurs, qui a créé le suivi socio-judiciaire, n'a malheureusement pas pu donner tous ses effets, faute des moyens nécessaires, tels les médecins coordonnateurs, les psychiatres, etc. La fermeture du quartier intermédiaire sortant du centre pénitentiaire de Fresnes, l'une des rares structures participant à la réinsertion des détenus les plus vulnérables, comme les toxicomanes, et à la lutte contre la récidive, est même programmée.
Devant la mobilisation, la médiatisation et la menace du médecin-chef psychiatre d'user de son droit d'alerte pour obtenir des effectifs infirmiers, le ministre de la santé et des solidarités a reculé, mais il n'a pas enterré son projet de fermeture. Cela met au jour la réalité d'un projet de loi, qui est un texte d'affichage - nous l'avons déjà dit - et recèle aussi des dispositions très dangereuses.
Le projet de loi tend à faire croire que les récidivistes ne seraient punis que mollement alors que, dans la pratique, les peines qui leur sont appliquées sont d'ores et déjà plus sévères que pour les auteurs d'un premier acte, sévérité qui contribue d'ailleurs à la surpopulation pénitentiaire actuelle.
La récidive est diverse, nous le savons tous. Quelle similitude existe-t-il entre celle qui est motivée par des addictions fortes telles que l'alcoolisme ou la toxicomanie, celle qui découle de la participation à des activités de délinquance organisée, celle qui est liée à des perversions sexuelles, celle qui dépend de pathologies psychiatriques ou celle qui est imposée par la précarité ? Par hypothèse, un étranger en situation irrégulière récidive dès sa sortie de prison. Ces diverses situations exigent des réponses différentes pour chaque type de récidive, des réponses individualisées, qui sont à mille lieues de ce que prévoit ce projet de loi, lequel mise sur la peur plutôt que sur l'intelligence et sur les moyens.