Séance en hémicycle du 21 septembre 2006 à 9h30

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

  • drogue
  • délinquance
  • injonction
  • intérieur
  • médecin
  • seine-saint-denis
  • stupéfiant
  • thérapeutique
  • usage

La séance

Source

La séance est ouverte à neuf heures trente.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n'y a pas d'observation ?...

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi relatif à la prévention de la délinquance (nos 433, 476, 477).

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

La parole est à M. Jean-Claude Peyronnet, pour un rappel au règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Peyronnet

Monsieur le président, mon rappel au règlement concerne aussi bien le déroulement de nos travaux que la situation dans nos banlieues.

Nos débats se déroulent de manière quelque peu surréaliste, presque psychédélique, comme dirait Doc Gynéco lorsqu'il voit des éléphants roses !

Le ministre d'État, ministre de l'intérieur, qui nous a présenté ce projet de loi comme majeur - il en est d'ailleurs en grande partie l'inspirateur - n'a pas daigné répondre aux orateurs. C'est M. Hortefeux qui, avec un grand talent, certes, a répondu aux orateurs, et même à ceux qu'il n'avait pas écoutés, ce qui prouve qu'il est vraiment très bon !

Nous sommes dans une situation curieuse. Pour nous, il s'agit de répression ; pour vous, monsieur le ministre, il s'agit de prévention. Or, depuis le début de la discussion de ce projet de loi, deux événements majeurs se sont produits.

D'une part, hier, deux fonctionnaires de police ont été agressés sauvagement et de façon inadmissible alors qu'ils patrouillaient dans la ville de Corbeil-Essonnes. Je leur rends hommage, ils font ce qu'on leur demande et, même si cette tâche est impossible, ils ne sont pas en cause. Je forme des voeux pour qu'ils se rétablissent au plus vite.

D'autre part, un journal du soir a publié mardi une note du préfet de la Seine-Saint-Denis, que la presse a largement commentée le lendemain. Plusieurs questions se posent et il serait intéressant que le ministre de l'intérieur vienne répondre à nos interrogations.

Tout d'abord, quelles sont les raisons de cette fuite ? Je n'ai pas mauvais esprit, mais la presse l'a peut-être. Les journalistes et la justice se demandent si cette fuite n'aurait pas été orchestrée dans le but de favoriser le déroulement de nos travaux dans le sens voulu par le ministre de l'intérieur, c'est-à-dire pour renforcer la répression. Je n'ose y croire.

Ensuite, nous avons regretté largement qu'il n'y ait pas d'évaluation des cinq lois répressives qui ont été votées depuis 2002. Le préfet de la Seine-Saint-Denis l'a bien sûr faite en ce qui concerne son département, dont la population est symptomatique de la situation dans nos banlieues.

Les élus reprennent les propos que nous avons tenus au cours de la discussion générale et de l'examen des premiers articles. Ils constatent que la situation s'est dégradée depuis 2002. On est donc en face d'un échec complet ; il y a même des quartiers dans lesquels on ne peut plus aller. L'agression sauvage d'hier, même si je n'en connais pas les détails, en est la preuve.

Notre collègue Christian Demuynck, qui appartient à l'UMP et ne peut donc être soupçonné de ne pas avoir des sympathies à droite, regrette que la police de proximité ait disparu. Il met en cause la façon dont les effectifs de police sont utilisés. Les chiffres sont d'ailleurs complètement divergents selon qu'ils proviennent du ministère de l'intérieur, du préfet ou des élus !

Nous aimerions comprendre comment le ministre de l'intérieur peut dire qu'il a augmenté les effectifs alors que, sur le terrain, on ne voit pas de changement. Un maire a ainsi pu constater qu'une seule voiture de police patrouillait certains soirs dans sa commune de 65 000 habitants. Nous sommes donc dans une situation délicate et difficile.

J'ajoute que, lorsque le ministre de l'intérieur s'en prend à la justice et que le garde des sceaux est obligé de répondre en défendant mollement ses magistrats, cette sorte de défausse montre un dysfonctionnement de nos institutions, qui est préoccupant.

Monsieur le président, je souhaiterais, si vous l'estimez nécessaire, une suspension de séance afin que le président du Sénat demande au ministre de l'intérieur de venir s'expliquer devant nous. Il appartient à M. Nicolas Sarkozy de le faire puisque c'est son projet de loi, quelle que soit la qualité, que je ne mets pas en doute, de M. Hortefeux.

L'honneur du Sénat est en cause : il est quand même inadmissible que le débat se déroule à l'extérieur de notre enceinte, dans les médias ! Il doit se dérouler d'abord ici pour que nous puissions reprendre la discussion sur le fond.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Monsieur Peyronnet, je vous donne acte de votre rappel au règlement. Mais chacun aura bien compris que le débat se passe bien au Parlement, en particulier au Sénat.

La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour un rappel au règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Monsieur le président, je tiens à m'associer à ce que vient de dire mon collègue du groupe socialiste. Je demande que la discussion de ce projet de loi soit suspendue en attendant que nous ayons une évaluation de la politique menée par le Gouvernement en matière de sécurité depuis 2002 - le moins que l'on puisse dire, c'est que les résultats ne sont ni probants ni partagés -, notamment des moyens mis à la disposition des forces de l'ordre dans le pays.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Madame Nicole Borvo Cohen-Seat, je vous donne acte de votre rappel au règlement. Depuis des années, jamais les représentants de la justice n'ont critiqué le ministre de l'intérieur ou le Parlement dans les décisions qui sont prises. Nous sommes heureux de le constater.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

M. Jean-Pierre Sueur. Lorsque le ministre de l'intérieur estime que la justice démissionne, il y a un vrai problème !

Protestations sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Mes chers collègues, dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus à l'amendement n° 120 rectifié bis, tendant à insérer un article additionnel avant l'article 25.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

L'amendement n° 120 rectifié bis, présenté par M. Zocchetto et les membres du groupe Union centriste - UDF, est ainsi libellé :

Avant l'article 25, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le septième alinéa de l'article 41-1 du code de procédure pénale, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« L'auteur des faits peut être assisté d'un avocat. »

La parole est à M. Yves Détraigne.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Détraigne

L'article 41-1 du code de procédure pénale prévoit une série de mesures que le procureur de la République ou son délégué peut proposer à l'auteur de l'infraction, s'il lui apparaît qu'une telle mesure est susceptible d'assurer la réparation du dommage causé à la victime, de mettre fin au trouble résultant de l'infraction ou de contribuer au reclassement de l'auteur des faits.

Il peut, par exemple, procéder au rappel à la loi auprès de l'auteur des faits, l'orienter vers une structure sanitaire, sociale ou professionnelle, lui demander de régulariser sa situation au regard de la loi ou des règlements, lui demander de réparer le dommage résultant des faits ou encore faire procéder, avec l'accord des parties, à une mission de médiation entre l'auteur des faits et la victime.

Cet amendement prévoit que, dans toutes ces hypothèses, l'auteur des faits pourrait se faire assister d'un avocat.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-René Lecerf

La commission des lois a été très dubitative devant l'amendement de notre collègue François Zocchetto, que vient de présenter Yves Détraigne. Elle constate que toutes ces mesures alternatives aux poursuites requièrent impérativement l'acceptation de la personne. Elle considère également que ces dispositions s'inscrivent en amont des poursuites.

Sans vouloir établir un parallèle, qui ne peut être absolu, nous avions par exemple prévu, pour le rappel à l'ordre, l'impossibilité de la présence d'un avocat. Certes, nous abordons ici la chaîne judicaire. Mais il nous semble que nous sommes malgré tout encore très en amont. Pour cette raison, la commission souhaite s'en remettre sur ce point à l'avis du Gouvernement.

Debut de section - Permalien
Brice Hortefeux, ministre délégué aux collectivités territoriales

Monsieur Détraigne, vous souhaitez rendre possible la présence d'un avocat lorsque le procureur de la République effectue un rappel à la loi.

M. Lecerf vient de nous donner une première précision qu'il convient de rappeler : en l'état actuel du droit, la présence d'un avocat est d'ores et déjà possible. Il n'apparaît pas forcément nécessaire ni même souhaitable de le prévoir dans un dispositif du code de procédure pénale.

Le rappel à la loi est une procédure alternative aux poursuites, qui repose sur le principe d'un contact direct entre le délinquant et le procureur. Je pense, et c'est d'ailleurs l'esprit du projet de loi, qu'il faut conserver une certaine souplesse sur ce point.

Enfin, le recours à l'avocat, et donc l'accès à l'aide juridictionnelle dans un certain nombre de cas, ne serait pas totalement neutre d'un point de vue budgétaire, ce qui pourrait a contrario affaiblir précisément le recours aux mesures alternatives.

Monsieur le sénateur, le Gouvernement souhaiterait le retrait de cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Détraigne

Je suis surtout sensible à deux éléments de réponse qui m'ont été apportés. Tout d'abord, à ce stade, nous ne sommes pas encore tout à fait dans la phase judiciaire, mais nous sommes plutôt dans une phase pré-juridictionnelle. Ensuite, comme vous l'avez rappelé, monsieur le ministre, la possibilité d'être assisté par un avocat est prévue.

Je retire donc cet amendement.

I. - Le cinquième alinéa de l'article 706-53-5 du code de procédure pénale est complété par la phrase suivante : « Si la dangerosité de la personne le justifie, la juridiction de jugement ou, selon les modalités prévues par l'article 712-6, le juge de l'application des peines peut ordonner que cette présentation interviendra tous les mois. Cette décision est obligatoire si la personne est en état de récidive légale. »

II. - Le dernier alinéa de l'article 706-53-10 du même code est complété par les mots suivants : « ou, lorsqu'elle devait se présenter une fois par mois, qu'une fois tous les six mois ».

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, sur l'article.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Monsieur le ministre, avant de légiférer de nouveau sur la récidive, il faudrait procéder à une évaluation sur les actions menées et les instructions données.

Ce texte concerne la prévention, mais aussi et surtout la récidive. Vous le présentez alors même que ne sont pas encore publiés tous les décrets d'application de la loi du 12 décembre 2005 relative au traitement de la récidive des infractions pénales et qu'il n'y a pas eu d'évaluation.

Il faut dire que le texte de l'époque, qui était pourtant particulièrement répressif, ne devait pas convenir au ministre de l'intérieur et qu'il fallait par ce projet de loi revenir sur un texte voté peu de temps auparavant.

Le texte qui nous est soumis vise non pas la prévention du premier acte, puisque le texte ne prévoit aucune disposition destinée à lutter contre les conditions du passage à l'acte, mais la prévention de la récidive après un premier acte : en témoignent la mise en place de nouveaux fichiers, le contrôle des délinquants sexuels après leur sortie de prison et, plus loin, l'article 26, qui tend à allonger les délais de réhabilitation pour les récidivistes.

Parallèlement, le Gouvernement ne donne pas les moyens nécessaires - voire en retire - pour mettre en oeuvre les mesures existantes. Par exemple, la loi du 17 juin 1998 relative à la prévention et à la répression des infractions sexuelles ainsi qu'à la protection des mineurs, qui a créé le suivi socio-judiciaire, n'a malheureusement pas pu donner tous ses effets, faute des moyens nécessaires, tels les médecins coordonnateurs, les psychiatres, etc. La fermeture du quartier intermédiaire sortant du centre pénitentiaire de Fresnes, l'une des rares structures participant à la réinsertion des détenus les plus vulnérables, comme les toxicomanes, et à la lutte contre la récidive, est même programmée.

Devant la mobilisation, la médiatisation et la menace du médecin-chef psychiatre d'user de son droit d'alerte pour obtenir des effectifs infirmiers, le ministre de la santé et des solidarités a reculé, mais il n'a pas enterré son projet de fermeture. Cela met au jour la réalité d'un projet de loi, qui est un texte d'affichage - nous l'avons déjà dit - et recèle aussi des dispositions très dangereuses.

Le projet de loi tend à faire croire que les récidivistes ne seraient punis que mollement alors que, dans la pratique, les peines qui leur sont appliquées sont d'ores et déjà plus sévères que pour les auteurs d'un premier acte, sévérité qui contribue d'ailleurs à la surpopulation pénitentiaire actuelle.

La récidive est diverse, nous le savons tous. Quelle similitude existe-t-il entre celle qui est motivée par des addictions fortes telles que l'alcoolisme ou la toxicomanie, celle qui découle de la participation à des activités de délinquance organisée, celle qui est liée à des perversions sexuelles, celle qui dépend de pathologies psychiatriques ou celle qui est imposée par la précarité ? Par hypothèse, un étranger en situation irrégulière récidive dès sa sortie de prison. Ces diverses situations exigent des réponses différentes pour chaque type de récidive, des réponses individualisées, qui sont à mille lieues de ce que prévoit ce projet de loi, lequel mise sur la peur plutôt que sur l'intelligence et sur les moyens.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'article 25 est relatif à des dispositions d'ordre judiciaire.

Mon collègue Jean-Claude Peyronnet vous a interrogé tout à l'heure, monsieur le président, sur le contexte de l'examen de ce projet de loi, et j'ai bien entendu la réponse que vous lui avez apportée. Cette dernière m'a paru pour le moins insuffisante.

En effet, des paroles très graves ont été prononcées, nul ne peut le contester.

M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire, a repris à son compte les propos de M. le préfet de la Seine-Saint-Denis, qui s'exprimait en ces termes au sujet du tribunal pour mineurs de Bobigny : « Sur 1 651 mineurs déférés au parquet, seuls 132 ont été écroués, ce qui donne une idée de la marge de progression que le parquet possède ».

Cette déclaration est tout à fait surprenante.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Elle laisse présupposer le fait que tous les mineurs déférés devant un tribunal devraient être incarcérés.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

À cet égard, je veux citer dans cet hémicycle la déclaration du président du tribunal de Bobigny, M. Philippe Jeannin : « S'agit-il de justifier les chiffres ? Ou bien de faire coïncider un constat avec l'examen du projet de loi sur la prévention de la délinquance ? Tout le monde s'interroge, [...] mais l'important n'est pas là. Il ne faut pas casser le travail que font les magistrats et les policiers. On a l'impression que la seule réponse à la délinquance des mineurs est la prison, mais la prison n'est pas toujours la réponse appropriée ! D'ailleurs la loi elle-même interdit l'incarcération de mineurs de moins de seize ans, à moins qu'ils aient commis un crime... ». En outre, ce président rappelle que « plus de 80 % des mineurs qui sont passés devant un juge et ont fait l'objet d'une mesure éducative sont sortis d'affaire ».

J'ajoute que le président du tribunal pour enfants de Bobigny vient de déclarer ceci : « D'abord, on n'a pas le droit d'incarcérer les moins de seize ans, sauf en matière criminelle. En quoi la société sera-t-elle mieux protégée si l'on décide d'envoyer en prison 100 % des jeunes déférés ? »

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Je poursuis ma citation : « Si c'était aussi simple, cela se saurait depuis longtemps. Il ne suffit pas d'apposer les mains sur le front d'un enfant pour qu'il ne devienne pas un délinquant... La clé est ailleurs : elle n'est pas dans la prison, mais dans l'éducation. Si je mets un gosse en prison pour trois mois, effectivement pendant trois mois il n'agressera personne, ne volera rien. Mais, dans trois mois, qu'est-ce qu'il sera devenu ? »

Je viens de vous livrer les déclarations de certains magistrats.

Monsieur le président, il est très grave, dans une République, que le numéro deux du Gouvernement, ministre d'État, déclare que l'institution judiciaire, dont le responsable est le garde des sceaux, a démissionné ! Après de tels propos, il n'est pas possible de continuer à discuter benoîtement des différents articles de ce projet de loi.

Monsieur le président, puisqu'il vous paraît difficile de solliciter la présence de M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur, qui est d'ailleurs représenté ici par M. Brice Hortefeux, la moindre des choses serait de demander à M. le garde des sceaux de venir s'expliquer devant le Sénat ...

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

... pour nous indiquer quelles conclusions il tire ...

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

M. Jean-Pierre Sueur. ... des déclarations de M. le ministre d'État à l'égard de son ministère et des fonctionnaires dont il a la responsabilité.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Monsieur Sueur, je vous donne acte de votre rappel au règlement.

À titre personnel, je tiens à dire que, si le principe de la séparation des pouvoirs doit bien entendu être respecté, il doit y avoir réciprocité à cet égard : le respect de l'institution judiciaire à l'égard tant du Parlement et des lois votées que du Gouvernement, responsable de l'exécutif, est tout aussi nécessaire ...

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

... que le respect du législateur et de l'exécutif envers le travail de l'institution judiciaire.

Or - permettez-moi de vous le dire, mon cher collègue - il m'est arrivé à plusieurs reprises d'entendre des hauts responsables de la justice s'exprimer, à titre personnel, sur des textes relatifs à la justice et sur des propos tenus par des ministres. Votre intervention en est d'ailleurs l'illustration : certains responsables de la justice ne se privent pas de s'exprimer !

Applaudissements sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Il me semble important que, dans notre pays, chacun, à sa place, fasse son travail. Nous sommes ici pour légiférer ; nous devons examiner les textes qui nous sont soumis et les amendements qui sont déposés.

M. Brice Hortefeux, au banc des ministres, représente le Gouvernement, et il aura tout à l'heure l'occasion de donner son avis sur les amendements en discussion. De leur côté, le rapporteur et le président de la commission s'exprimeront également sur ces amendements. Ensuite, chacun, en son âme et conscience, pourra déterminer son vote. C'est tout simplement là le travail du Parlement.

C'est la raison pour laquelle je vous propose, mes chers collègues, de poursuivre nos travaux. Ce qui se déroule en dehors du Parlement n'est pas du ressort de ce dernier.

Vives exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Ben voyons ! On est coupé de l'extérieur, de la réalité, alors !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Quand le numéro deux du Gouvernement déclare que la justice démissionne, ce n'est pas anodin, monsieur le président !

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Nous voulons que le garde des sceaux donne son point de vue au Parlement !

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Je suis saisi de deux amendements identiques.

L'amendement n° 214 est présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.

L'amendement n° 278 est présenté par MM. Peyronnet, Godefroy, Badinter, Collombat, Dreyfus-Schmidt, C. Gautier, Mahéas et Sueur, Mme Campion, MM. Cazeau et Domeizel, Mmes Demontès et Jarraud-Vergnolle, M. Michel, Mme Schillinger, MM. Guérini, Lagauche, Madec, Mélenchon, Mermaz et Ries, Mmes Tasca, Boumediene-Thiery et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat, pour présenter l'amendement n° 214.

Debut de section - PermalienPhoto de Josiane Mathon-Poinat

L'article 25 vise à renforcer les obligations des personnes inscrites au fichier judiciaire automatisé des auteurs d'infractions sexuelles, le FIJAIS, créé par la loi du 9 mars 2004, dite loi Perben II.

Aux termes de cette loi, les personnes condamnées pour un crime ou pour un délit puni de dix ans d'emprisonnement doivent justifier de leur adresse une fois tous les six mois. Le projet de loi prévoit que cette obligation pourra être mensuelle dans deux hypothèses : d'une part, « si la dangerosité de la personne le justifie » et, d'autre part, en cas de « récidive légale ».

Notre amendement n° 214 vise à la suppression de cette disposition, et ce pour deux raisons.

En premier lieu, le Gouvernement demande au Parlement de modifier une loi qui a été adoptée il n'y a pas si longtemps, et ce sans qu'aucun bilan de son application ait été dressé. Ne pouvions-nous pas attendre quelque peu ?

En second lieu, nous ne sommes pas sur le terrain de la prévention de la délinquance puisque la disposition concerne des personnes déjà condamnées. Il peut éventuellement s'agir de prévenir la récidive mais, en l'espèce, le Parlement vient de légiférer en la matière avec la loi du 12 décembre 2005. Pourquoi donc une telle inflation législative ?

La disposition en cause est donc stigmatisante et humiliante, aussi absurde qu'inefficace, car elle n'empêchera pas les personnes inscrites à ce fichier de commettre une nouvelle infraction.

Et si, demain, malgré cette disposition, nous assistons à un fait divers sordide, devrons-nous rendre cette obligation hebdomadaire, voire journalière ? En réalité, vous infligez à l'individu concerné une deuxième peine qui risque d'empêcher sa réinsertion, d'autant qu'elle n'est pas limitée dans le temps. La peine de prison ne permet plus, en l'espèce, de s'amender du méfait commis. Quel est donc vraiment le sens de la peine ? Nous avons à chaque fois essayé d'aborder les tenants et les aboutissants de cette question, mais sans succès.

Cette mesure, qui participe à la surenchère entretenue sur ce type de délinquance, exonère le Gouvernement de toute action visant à enrayer la délinquance sexuelle, en combinant prévention et traitement adapté. Faut-il rappeler qu'il existe déjà des dispositifs de surveillance et d'accompagnement éducatif - sursis avec mise à l'épreuve, libération conditionnelle, suivi socio-judiciaire -, qui, assortis d'obligations, offrent une large palette de mesures de nature à prendre en charge ces délinquants ? Mais sont-ils seulement utilisés ? A-t-on les moyens et la volonté politique de les appliquer ?

La mesure tendant à obliger une personne à venir pointer au commissariat une fois par mois est certainement moins chère à court terme et électoralement plus payante que la mise en place d'un programme de soins psychiatriques en milieu pénitentiaire et d'un réseau de centres thérapeutiques à l'extérieur. Une réelle prévention de la récidive en matière de délinquance sexuelle exige néanmoins de mettre l'accent sur les soins thérapeutiques qui, lorsqu'ils sont dispensés durant la détention, puis à la sortie de prison, peuvent avoir de réels effets sur le taux de récidive. Une telle mesure exige bien sûr des moyens financiers, matériels et humains inédits, qu'il faudrait peut-être mettre en oeuvre.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

La parole est à M. Jean-Claude Peyronnet, pour défendre l'amendement n° 278.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Peyronnet

Monsieur le président, vous me faites penser à un canard : en effet, nos demandes de suspension de séance, à propos desquelles vous ne consultez pas l'assemblée, et nos souhaits répétés de voir le président du Sénat inviter le ministre de l'intérieur et le garde des sceaux à venir s'exprimer dans cette enceinte glissent sur vous, toujours serein, et restent sans réponse.

Par ailleurs, il est assez curieux de dire que ce qui se passe à l'extérieur ne nous intéresse pas. Lorsque l'on parle de délinquance, le fait que des CRS aient été sauvagement agressés doit intéresser le Parlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Peyronnet

Et je regrette que le ministre de l'intérieur ait choisi de s'expliquer à l'extérieur plutôt que devant nous. Mais vous portez la responsabilité de vos choix, monsieur le président !

L'amendement n° 278 est identique à celui que vient de présenter Mme Assassi.

En l'état actuel de notre droit, la personne condamnée pour un crime ou un délit puni de dix ans d'emprisonnement doit justifier de son adresse tous les six mois. Le projet de loi prévoit que cette obligation de « pointage » s'appliquera à la même catégorie de condamnés une fois par mois dans plusieurs hypothèses, notamment en cas de récidive.

La loi Perben II nous semble avoir déjà largement couvert ce champ. Nous étions d'ailleurs opposés à la constitution d'un fichier, lequel ne nous semblait pas nécessaire. À cet égard, nous n'avons aucune évaluation des effets de cette loi. Il nous semble donc parfaitement inutile d'en rajouter. Ce qui se passe actuellement montre d'ailleurs que cela ne sert à rien !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-René Lecerf

Je rappelle, d'une part, que cette obligation de pointage concerne certaines des personnes inscrites au fichier judiciaire national automatisé des auteurs d'infractions sexuelles et violentes, à savoir les personnes condamnées pour un crime ou pour un délit puni de dix ans d'emprisonnement, et, d'autre part, que l'autorité judiciaire aura toujours la possibilité d'adapter cette obligation, par exemple en cas d'impératifs de santé.

Pour toutes ces raisons, la commission est défavorable à la suppression de l'article 25.

Debut de section - Permalien
Brice Hortefeux, ministre délégué

J'ai bien écouté les interventions de M. Peyronnet, de M. Sueur et de Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, au début de la séance. Je reviendrai très rapidement sur quelques points.

Je tiens tout d'abord à remercier M. Peyronnet de ses encouragements personnels. J'y vois la marque d'une proximité régionale ! Je me dois toutefois de vous préciser que, si M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur n'est pas présent ce matin, de même d'ailleurs que M. le garde des sceaux, c'est parce que va débuter, dans quelques minutes à peine, le conseil des ministres ; le conseil de sécurité intérieure se réunira ensuite.

Vous vous êtes félicité les uns et les autres, lors de la discussion générale, du caractère transministériel de ce texte. De nombreux ministres auront en effet été présents lors de l'examen de ce texte par le Sénat : M. le ministre de la santé et des solidarités, M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille, M. le garde des sceaux, M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire, qui est intervenu dans la discussion générale, M. le ministre délégué à l'aménagement du territoire et moi-même.

Ensuite, vous soulignez à juste titre, les uns et les autres, la très grande qualité de la note du préfet Jean-François Cordet. Toutefois, il ne faut pas saucissonner cette note, n'évoquer que ce qui vous arrange et oublier ce qui vous dérange !

Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - Permalien
Brice Hortefeux, ministre délégué

Je rappellerai donc ce qu'a écrit le préfet Jean-François Cordet. Le mieux est en effet de le citer : il a souligné, évoquant le tribunal de Bobigny, que, « en 2005, sur 1 651 mineurs déférés au parquet, seuls 132 ont été écroués ». Je vous ai entendu, voilà quelques instants, évoquer le taux de 100 %. Reconnaissez avec moi que nous en sommes très loin !

S'agissant de la délinquance en Seine-Saint-Denis, je n'ai pas entendu de sénateur de ce département s'exprimer ce matin. Pourtant, des élus de Seine-Saint-Denis siègent au groupe socialiste, et j'imagine donc qu'il revenait à l'un de ceux-ci d'intervenir sur ce point. Mais puisque, par solidarité, vous évoquez la situation dans ce département, voici donc quelques éléments susceptibles de vous éclairer et d'éviter ainsi les jugements à l'emporte-pièce.

Il est exact que, sans tenir compte des problèmes survenus dans les banlieues, la délinquance a augmenté sensiblement entre le mois de janvier et le mois d'août 2006, par rapport à la même période de l'année 2005. Mais quand on observe bien l'évolution de ces dernières années - et cela devrait vous inciter à un peu plus de réserve, voire de modestie -, on se rend compte que, en 2001, le taux de délinquance a progressé de près de 10 %, puis qu'il a diminué de plus de 3 % en 2002, de 5, 5 % en 2003, de 5 % en 2004 et de 2, 8 % en 2005.

Debut de section - Permalien
Brice Hortefeux, ministre délégué

Cela mérite d'être rappelé.

Je ferai une seconde remarque concernant les effectifs, monsieur Sueur, car j'ai bien entendu votre interrogation. Je vous donnerai simplement les chiffres suivants : le 1er janvier 2002, il y avait 4 967 policiers en Seine-Saint-Denis ; le 1er septembre de cette année, il y en avait 5 575.

Debut de section - Permalien
Brice Hortefeux, ministre délégué

Et il y en aura 300 de plus avant la fin de cette année ! (Protestations sur les travées du groupe socialiste.)

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Monsieur Sueur, lors de votre intervention, nous vous avons écouté sans vous interrompre. Je souhaiterais que vous fassiez de même lorsque M. le ministre vous répond !

Debut de section - Permalien
Brice Hortefeux, ministre délégué

Je comprends que ces chiffres alimentent les conversations entre vous parce qu'ils démentent un certain nombre de vos propos !

Quant aux suites judiciaires, je vous précise que le nombre de personnes écrouées entre le mois de janvier et le mois de septembre a diminué de 10 %. Étant volontairement modéré, je me bornerai à constater que cette évolution est pour le moins préoccupante.

Enfin, vous vous interrogez sur la position de M. le garde des sceaux, dont, par ailleurs, vous attendez l'arrivée. Je vous précise par conséquent que M. Pascal Clément sera là cet après-midi. Sachez qu'il a d'ores et déjà fait une déclaration très intéressante et frappée au coin du bon sens : « Je regrette, a-t-il dit, qu'on ait laissé le tribunal de Bobigny à l'abandon pendant tant d'années ». Voilà quelle est sa position.

Applaudissements sur les travées de l'UMP. - Protestations sur les travées du groupe CRC.

Debut de section - Permalien
Brice Hortefeux, ministre délégué

J'en viens maintenant aux amendements n° 214 et 278.

Il est vrai que l'article 25 du projet de loi tend à compléter les dispositions concernant le fichier judiciaire national automatisé des auteurs d'infractions sexuelles et violentes. Il est vrai également - je pense qu'il y a un consensus à cet égard - que ce fichier est un instrument indispensable pour lutter contre ce type d'infractions. Il impose aux auteurs de ces dernières de justifier de leur adresse une fois par an ou, dans les cas les plus graves, tous les six mois.

L'observation de l'activité du service gérant ce fichier permet de conclure à un fonctionnement globalement satisfaisant depuis la récente mise en oeuvre - elle remonte au 30 juin 2005 - de ce dispositif. Fin août 2006, 32 139 personnes étaient inscrites à ce fichier, un peu plus de 20 000 étant soumises à l'obligation de justification d'adresse tous les six mois et non tous les ans.

L'article 25 du projet de loi prévoit un contrôle renforcé des condamnés les plus dangereux, notamment les récidivistes, qui, il est vrai, devront se présenter tous les mois parce qu'ils constituent un problème essentiel. C'est la juridiction qui décidera de ce contrôle renforcé, soit parce qu'elle constatera la dangerosité du condamné, soit parce qu'elle relèvera l'état de récidive. Le condamné, je le précise, aura ensuite la possibilité de demander à bénéficier d'un contrôle assoupli lui permettant de se présenter tous les six mois ou tous les ans, et non plus tous les mois.

Pour toutes ces raisons, qui, encore une fois, me paraissent à la fois frappées au coin du bon sens et modérées, je suis évidemment défavorable à ces amendements de suppression.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

La parole est à Mme Éliane Assassi, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

M. le ministre ayant interpellé les sénateurs de la Seine-Saint-Denis, c'est en tant que sénatrice de ce département que je m'exprimerai sur les extraits - il ne s'agit en effet que d'extraits - de la note adressée par le préfet de la Seine-Saint-Denis à M. le ministre de l'intérieur.

On peut d'ailleurs se demander à qui profite le crime ! Qui a divulgué ces extraits ? §Nous n'en savons rien, de même que nous ne disposons pas du contenu intégral de cette note, monsieur Pasqua !

Debut de section - Permalien
Un sénateur de l'Ump

Elle a été publiée dans la presse !

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

Sincèrement, je me félicite qu'un préfet, en l'occurrence celui de la Seine-Saint-Denis, interpelle ainsi le Gouvernement sur une question aussi fondamentale que celle de la recrudescence de la délinquance dans ce département, alors que toutes les annonces qui nous sont faites sur ce sujet depuis la nomination de l'actuel ministre de l'intérieur méconnaissent ce phénomène ! À cet égard, je n'ose rappeler ce que j'avais dit ici au moment de ce que certains appellent les « émeutes des banlieues ».

Je me félicite aussi de ce que le préfet de la Seine-Saint-Denis évoque dans cette note le sort des jeunes, qui sont les principales victimes du chômage. C'est une réalité en Seine-Saint-Denis ! Cela fait des années que les élus de ce département demandent le bénéfice de mesures d'urgence et/ou de rattrapage, que ce soit dans le domaine de la formation, du logement, de la sécurité ou tout simplement de l'emploi.

Oserai-je rappeler qu'un ancien préfet de la Seine-Saint-Denis siège dans cet hémicycle ? Je pense qu'il se souvient des nombreuses sollicitations que nous lui avons adressées à l'époque sur ces questions.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

Non, ce n'est pas invraisemblable, c'est une réalité, monsieur Cambon !

Je rappelle aussi que le Président de la République, dans un courrier adressé au président du conseil général de la Seine-Saint-Denis, a reconnu le travail de terrain des élus de ce département. Il a également admis que la Seine-Saint-Denis devait faire l'objet de mesures de rattrapage.

Enfin, je rappelle que M. de Villepin, Premier ministre, a absolument tenu à rencontrer tous les parlementaires de la Seine-Saint-Denis, le 15 novembre dernier. Au-delà des clivages politiques, nous avons tous fait état de l'urgence à donner à ce département des moyens à la hauteur des besoins de la population et des réalités vécues.

Mais depuis, rien ! Strictement rien, si ce n'est un constat, que je peux partager mais qui ne suffit pas. Je réaffirme ici que la population de Seine-Saint-Denis a besoin d'effectifs policiers, notamment de policiers de proximité, ainsi que de logements, d'emplois, d'écoles et de formations de qualité.

Donnons également des moyens à la justice afin de ne pas apporter comme seule réponse l'enfermement. La justice doit avoir les moyens d'assumer ses missions en amont et en aval. N'imaginons pas que la prison permette aux jeunes gens que l'on y enferme de se transformer miraculeusement en anges à leur sortie !

Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

La parole est à M. Josselin de Rohan, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Josselin de Rohan

Je voterai naturellement contre les amendements n° 214 et 278, parce que toutes les dispositions de l'article 25 relèvent, comme l'a très bien expliqué M. le rapporteur, du contrôle du juge, lequel dispose d'un pouvoir d'appréciation. Par conséquent, il n'est en aucune manière liberticide d'exercer un contrôle renforcé sur des individus extrêmement dangereux.

Je ferai également une remarque sur le propos que vient de tenir notre collègue Jean-Pierre Sueur.

À entendre ce dernier, il serait au fond absolument insupportable de porter des critiques sur le fonctionnement de l'institution judiciaire. Les juges bénéficieraient d'une sorte d'immunité, tout simplement parce qu'ils rendent la justice au nom du peuple français ! Et M. le ministre d'État n'aurait pas le droit, parce qu'il est ministre, de s'étonner de la manière dont fonctionne une juridiction. Or, comme l'a fort bien expliqué M. le président, les juges ne s'interdisent pas, eux, de porter des jugements sur la manière dont fonctionne le pouvoir législatif !

Permettez-moi d'aller plus loin, monsieur Sueur, et de vous rafraîchir la mémoire : récemment, les auteurs d'un rapport parlementaire ont dénoncé en des termes très forts les dysfonctionnements de l'institution judiciaire dans une affaire extrêmement grave. Ils sont allés très loin dans leurs recommandations et dans leurs critiques tant du fonctionnement des juridictions concernées que du comportement de certains magistrats. Je vous rappelle, monsieur Sueur, que le président de cette commission d'enquête parlementaire - il s'agit de M. André Vallini - était socialiste. Vous feriez bien de vous inspirer de ses réflexions !

Applaudissements sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

La parole est à M. Jean-Claude Peyronnet, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Peyronnet

Je reviendrai sur l'intervention de M. le ministre, qui va bien au-delà de l'objet des amendements.

Nous ne contestons pas l'augmentation des effectifs de police en Seine-Saint-Denis, mais regrettons le détournement de ces derniers vers des missions autres que le renforcement de la sécurité en Seine-Saint-Denis, telles la surveillance du Stade de France, de l'aéroport de Roissy-Charles-de-Gaulle, la police des airs et des frontières, ainsi que la visite des ministres, dont les opérations coup-de-poing sont nombreuses en Seine-Saint-Denis.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Les ministres sont très bien protégés, c'est sûr !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Peyronnet

Nous ne contestons donc pas l'augmentation des effectifs, mais regrettons le détournement de ces derniers pour des missions autres que le renforcement de la sécurité en Seine-Saint-Denis.

Par ailleurs, vous nous dites - c'est un coup bas, monsieur le ministre ! - qu'il n'y a pas de représentant de ce département parmi nous aujourd'hui. Cela signifie-t-il que nous ne sommes pas des élus nationaux et que nous ne pouvons pas parler des problèmes des départements autres que les nôtres ?

Ce problème ne concerne pas seulement, hélas ! la Seine-Saint-Denis. Dois-je reprocher à M. Serge Dassault de ne pas être présent aujourd'hui ? A-t-il une responsabilité dans ce qui s'est passé à Corbeil-Essonnes ? Je pense que non, mais le maire ayant de plus en plus de responsabilités, peut-être, après tout, M. Dassault aurait-il dû éviter ces incidents ? Telle est la logique de votre texte.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Monsieur le président, vous avez indiqué que la parole était libre dans cet hémicycle et dans ce pays ; je vous en remercie. M. Josselin de Rohan l'a également dit, mais il a ajouté que les parlementaires, et même les citoyens, pouvaient émettre des opinions, des avis et des jugements. Vous avez parfaitement raison, mon cher collègue, et je vous en donne acte.

Nous sommes le pouvoir législatif. Mais quand, au sein de l'exécutif, le numéro deux du Gouvernement dit que l'institution dont M. le garde des sceaux a la responsabilité démissionne, ...

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

...c'est une réalité politique incontestable qui pose problème.

Comme il revient au Parlement, en vertu de la Constitution, de contrôler le pouvoir exécutif, nous sommes parfaitement dans notre rôle quand nous demandons des explications.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

La parole est à M. le président de la commission des lois.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

Nous aurons certainement l'occasion aujourd'hui, puisque plusieurs dispositions concernent la justice des mineurs, d'approcher ces questions d'une manière plus sereine.

En ce qui concerne la délinquance des mineurs, mes chers collègues, je vous renvoie au rapport de la commission d'enquête, à laquelle beaucoup d'entre vous ont participé. Il a été déposé au mois de juin 2002.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

Madame Borvo Cohen-Seat, je vous assure que nous avions pointé nombre de difficultés qui n'ont fait que croître ces dernières années. Nous avions proposé un certain nombre de changements, auxquels contribue d'ailleurs le projet de loi que nous examinons.

J'ai entendu un jour le représentant d'une organisation professionnelle de magistrats - il ne devrait pas, selon moi, exister de syndicat dans la magistrature - dire que, si la loi ne lui plaisait pas, il ne l'appliquerait pas. C'est très grave !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

C'est inacceptable ! Mais il ne s'agit pas non plus du ministre de l'intérieur !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

Par ailleurs, mes chers collègues, il nous revient non seulement de voter les lois, mais aussi de contrôler la manière dont elles sont appliquées dans notre pays.

L'évaluation est une donnée importante, et même indispensable avec la nouvelle charte financière. Nous avons également le droit d'interroger, non pas le juge sur ses décisions individuelles, mais l'institution judiciaire sur son fonctionnement.

Il est vrai, et tout le monde le reconnaît, que le tribunal de Bobigny a connu beaucoup de difficultés, pour de multiples raisons, pendant de nombreuses années. Alors il faut réaliser une évaluation sereine et nous découvrirons qu'il a rencontré beaucoup de difficultés qu'il aurait peut-être fallu tenter de résoudre avant...

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Cela fait tout de même cinq ans que vous êtes au pouvoir !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

La situation a été redressée depuis.

Pour en revenir à l'article 25, monsieur le président, s'agissant de criminels et de délinquants sexuels dangereux, il ne me paraît pas disproportionné que certaines mesures de prévention et de contrôle soient prises.

Les amendements ne sont pas adoptés.

L'article 25 est adopté.

I. - Le code pénal est ainsi modifié :

1° L'article 133-13 est complété par deux alinéas ainsi rédigés :

« Les délais prévus au présent article sont doublés lorsque la personne a été condamnée pour des faits commis en état de récidive légale.

« Lorsqu'il s'agit d'une condamnation assortie du sursis ou du sursis avec mise à l'épreuve, les délais de réhabilitation courent à compter de la date à laquelle la condamnation est non avenue. » ;

2° L'article 133-14 est complété par deux alinéas ainsi rédigés :

« Les délais prévus au présent article sont doublés lorsque la personne a été condamnée pour des faits commis en état de récidive légale.

« Lorsqu'il s'agit d'une condamnation assortie du sursis, les délais de réhabilitation courent à compter de la date à laquelle la condamnation est non avenue. » ;

3° L'article 133-16 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« La réhabilitation n'interdit pas la prise en compte de la condamnation, par les seules autorités judiciaires, en cas de nouvelles poursuites, notamment pour l'application des règles sur la récidive légale. »

II. - Le code de procédure pénale est ainsi modifié :

1° Au deuxième alinéa de l'article 706-53-10, les mots : « subsistent au bulletin n°1 du casier judiciaire de l'intéressé ou » sont supprimés et l'alinéa est complété par les mots : « ou tant que la personne n'a pas été réhabilitée » ;

2° Au deuxième alinéa de l'article 769, les mots : « par la réhabilitation de plein droit ou judiciaire » sont supprimés ;

3° Le septième alinéa () de l'article 769 est abrogé ;

4° Le 5° de l'article 775 est rétabli dans la rédaction suivante :

«  Les condamnations ayant fait l'objet d'une réhabilitation de plein droit ou judiciaire. »

III. - Les dispositions du présent article entreront en vigueur le premier jour du sixième mois suivant la publication de la présente loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Michel

L'article 26 vise à modifier la procédure de réhabilitation, qui relève du code pénal.

Je sais que M. Hortefeux, qui apporte d'ailleurs à ces débats la compétence et la sérénité indispensables, a vocation à représenter l'ensemble du Gouvernement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Michel

Je m'étonne néanmoins que le garde des sceaux ne soit pas présent lorsque nous modifions le code pénal ou le code de procédure pénale, ce qui, dans des temps pas très anciens, n'aurait guère été envisageable. On peut se demander s'il existe encore un garde des sceaux au sein du Gouvernement... Certes, un conseil des ministres est prévu ce matin ; mais j'ai vu, dans d'autres occasions importantes, des ministres présents au Parlement malgré la réunion du conseil des ministres.

Pour le reste, je viens d'écouter les propos qui ont été tenus ici ou là, et nous sommes, me semble-t-il, en pleine confusion.

Qu'une note adressée à M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur, par le préfet Jean-François Cordet ait été rendue publique par une fuite, c'est une chose dont nous avons l'habitude, mais que le préfet critique le fonctionnement de l'institution judiciaire, c'est inadmissible en raison de la séparation des pouvoirs.

J'ajoute d'ailleurs que les chiffres transmis par M. le préfet ne me paraissent pas choquants : au cours de l'année 2005, 1 651 mineurs ont été déférés devant le tribunal et 132 ont été écroués.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Michel

Ce n'est pas rien, d'autant que la détention est l'exception, plus encore pour les mineurs, et que nous ne connaissons pas la situation de ces 1 651 mineurs : pourquoi ont-ils été écroués, étaient-ils en état de récidive, quel âge avaient-ils - douze ans, seize ans, dix-sept ans ?

La proportion est conséquente : est-ce trop, pas assez ? Je ne sais pas, mais le déplorer en soi me paraît totalement hors de propos.

Il est certes toujours hasardeux, pour des magistrats, de s'exprimer à titre personnel sur les lois et le Gouvernement ; j'en suis tout à fait convaincu. En revanche, lorsque le ministre d'État, ministre de l'intérieur, critique l'institution judiciaire, c'est tout à fait différent ! Sur ces travées siège un ancien ministre de l'intérieur, très critiqué en son temps par les magistrats ; je n'ai pas entendu qu'il mette ainsi en cause l'institution judiciaire.

Je me souviens qu'en 1968 le Premier ministre de l'époque, Georges Pompidou, avait déclaré : « J'ai fait libérer les manifestants. » Cette parole fit un énorme scandale. De même, les propos du secrétaire général du RPR d'alors, René Tomasini, dont la gravité était pourtant bien moindre que ceux de M. Sarkozy, provoquèrent des grèves de magistrats, des manifestations.

Or, aujourd'hui, on semble accepter que le ministre d'État, ministre de l'intérieur, qui est le représentant de l'exécutif, critique ouvertement l'institution judiciaire : c'est très grave en démocratie, compte tenu du principe de la séparation des pouvoirs.

Le président du groupe UMP du Sénat ajoute encore à la confusion en évoquant un rapport parlementaire !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Michel

Mais, monsieur de Rohan, c'est tout à fait différent !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Michel

Le Parlement a le droit et même le devoir, comme l'a rappelé le président de la commission des lois, d'apprécier le fonctionnement des institutions dont il vote le budget. Aujourd'hui, il est même tenu d'évaluer la façon dont les missions sont rendues.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Michel

Il ne me paraît donc pas choquant qu'une commission parlementaire critique l'institution...

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Michel

...ou même le comportement de tel magistrat dans telle affaire qui a défrayé la chronique : cela n'a rien à voir avec les propos du ministre de l'intérieur.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

M. le président du groupe UMP sait tout cela, mais il est en service commandé, comme d'habitude !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Michel

Une telle situation est grave pour la démocratie, surtout s'agissant de celui qui a prononcé ces propos et qui aspire, paraît-il, à de très hautes fonctions. Si un jour, par malheur, il les occupait, ...

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Michel

M. Jean-Pierre Michel. ...il serait pourtant constitutionnellement le garant de l'indépendance de la justice. Nous pouvons avoir les plus vives inquiétudes à ce sujet.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

Les deux premiers sont identiques.

L'amendement n° 215 est présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.

L'amendement n° 279 est présenté par MM. Peyronnet, Godefroy, Badinter, Collombat, Dreyfus-Schmidt, C. Gautier, Mahéas et Sueur, Mme Campion, MM. Cazeau et Domeizel, Mmes Demontès et Jarraud-Vergnolle, M. Michel, Mme Schillinger, MM. Guérini, Lagauche, Madec, Mélenchon, Mermaz et Ries, Mmes Tasca, Boumediene-Thiery et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat, pour présenter l'amendement n° 215.

Debut de section - PermalienPhoto de Josiane Mathon-Poinat

Les dispositions de l'article 26 relèvent de la prévention de la récidive et auraient donc dû figurer dans la loi du 12 décembre 2005 sur la récidive plutôt que dans le présent texte.

Ainsi, sous prétexte que l'actuel système de la réhabilitation légale, qui a pour effet d'effacer la condamnation ainsi que toutes les interdictions, les incapacités et les déchéances qui peuvent l'accompagner, affaiblirait l'application des dispositions concernant la récidive, on nous propose d'en modifier les règles. Ce qui était encore valable il y a quelques mois ne le serait donc plus aujourd'hui !

Permettez-moi de m'interroger sur l'opportunité de cette nouveauté, mais certains démontreront sans doute son utilité en citant un fait divers sordide comme un cas général.

Si la réhabilitation légale est automatique, en contrepartie, elle ne joue actuellement déjà que tardivement : trois ans après l'exécution de la peine pour les amendes ; cinq ans à compter de l'exécution d'une peine unique d'un an d'emprisonnement ; dix ans à compter de l'exécution d'une condamnation à un emprisonnement qui n'excède pas dix ans et, s'il y a plusieurs peines d'emprisonnement, à compter de l'exécution de celles qui ne dépassent pas cinq ans.

La réhabilitation n'est donc pas possible pour les peines correctionnelles supérieures à dix ans et, bien évidemment, pour les peines criminelles.

Elle n'est de surcroît envisageable que si l'intéressé a effectivement purgé sa peine et s'il n'a pas été condamné durant ces délais à une autre peine criminelle ou correctionnelle.

On le voit, les règles entourant la réhabilitation sont suffisamment strictes. Alors, pourquoi en rajouter, stigmatiser des personnes au risque d'entraver leur réinsertion dans la société une fois leur peine exécutée ?

Faut-il rappeler que la réhabilitation, par l'effacement de la mention de la condamnation au bulletin n°1 du casier judiciaire qu'elle induit après un certain délai, permet l'oubli, l'amendement de la personne pour une meilleure réinsertion ?

Je tiens tout de même à souligner que l'enjeu de l'oubli ou de la mémoire dans la pratique du casier judiciaire est loin d'être anodin.

Le choix opéré entre oubli et mémoire détermine, en effet, la nature de la politique pénale voulue. Dans le premier cas, elle sera préventive, contribuant à la réinsertion du condamné et, dans le second, elle sera répressive, stigmatisant la carrière de l'individu.

Pour toutes ces raisons, nous estimons qu'il convient d'en rester au droit actuel et nous demandons la suppression de cet article.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

La parole est à M. Jean-Claude Peyronnet, pour présenter l'amendement n° 279.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Peyronnet

Je ne reprendrai pas l'argumentation développée par ma collègue du groupe CRC, elle vaut également pour notre amendement.

L'article 26 tend, d'une part, à doubler les délais de réhabilitation pour les personnes condamnées pour des faits commis en état de récidive légale et, d'autre part, à modifier certaines dispositions relatives à la réhabilitation.

Ces dispositions n'ont pas vraiment leur place dans un texte consacré à la prévention de la délinquance, puisqu'il s'agit de la prévention éventuelle de la récidive. De surcroît, cette surenchère sécuritaire ne donne aucun résultat. Que fera-t-on la prochaine fois ? Va-t-on, comme au temps de Louis XIV, marquer les délinquants au fer rouge ?

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

L'amendement n° 38, présenté par M. Lecerf, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :

Dans le texte proposé par le 3° du I de cet article pour l'article 133-16 du code pénal, supprimer le mot :

notamment

La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 38 et pour donner l'avis de la commission sur les amendements identiques n° 215 et 279.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-René Lecerf

Bien que cet amendement prévoie la suppression du simple adverbe « notamment », il ne s'agit pas, à proprement parler, d'un amendement rédactionnel.

L'article 26 prévoit que la réhabilitation ne doit plus conduire à l'effacement de la mention de la condamnation au bulletin n°1 du casier judiciaire. Le maintien de la mention de la condamnation se justifie pour la prise en compte des règles en matière de récidive légale. Il est souhaitable toutefois de préciser qu'il ne doit pas avoir d'autres fins, d'où la suppression de l'adverbe « notamment ».

En effet, si le passé pénal de l'intéressé était pris en compte systématiquement quel que soit le temps écoulé depuis la condamnation précédente, cela affaiblirait de beaucoup la portée de la réhabilitation.

En ce qui concerne les amendements identiques n° 215 et 279, je voudrais indiquer à nos collègues communistes et socialistes quelle est l'utilité de l'article 26.

Les mesures actuellement en vigueur en matière de réhabilitation, tant légale que judiciaire, affaiblissent l'application des dispositions concernant la récidive. Je ne prendrai qu'un exemple à cet égard : une personne condamnée pour viol à dix ans de réclusion qui commet un nouveau viol onze ans après l'exécution de sa peine ne sera pas en état de récidive légale, puisque, dans l'intervalle, la condamnation aura été effacée par les effets de la réhabilitation.

L'article 26, qui vise à allonger les délais de réhabilitation pour les récidivistes, nous paraît donc très utile. C'est pourquoi la commission des lois est défavorable à sa suppression.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Quel est l'avis du Gouvernement sur les trois amendements ?

Debut de section - Permalien
Brice Hortefeux, ministre délégué

En ce qui concerne les amendements n° 215 et 279, je rappelle que l'article 26 du projet de loi a pour objet de doubler les délais de réhabilitation pour les récidivistes et de maintenir l'inscription au bulletin n° 1 du casier judiciaire des condamnations ayant fait l'objet d'une réhabilitation, afin notamment qu'elles puissent être prises en compte pour déterminer l'état de récidive.

L'objectif est simple, clair et net : il s'agit de renforcer l'efficacité de notre droit pénal en supprimant les incohérences entre les règles relatives à la réhabilitation et celles qui concernent la récidive : elles sont actuellement contradictoires et incompatibles.

Le doublement des délais de réhabilitation pour les récidivistes répond à la logique du doublement des peines encourues.

Quant au maintien de l'inscription de la condamnation au bulletin n° 1 du casier judiciaire, il évitera que la justice ignore qu'une personne poursuivie a déjà été condamnée par le passé et permettra une meilleure individualisation de la sanction.

Pour être tout à fait complet, je précise que seules les autorités judiciaires connaîtront la condamnation ayant fait l'objet d'une réhabilitation, puisqu'elle sera effacée des bulletins n° 2 et 3. Il n'y aura donc aucun obstacle à la réinsertion du condamné, ce qui est également l'un de nos objectifs.

Les dispositions du projet de loi étant tout à fait justifiées et équilibrées, le Gouvernement émet un avis défavorable sur les amendements de suppression.

Concernant l'amendement n° 38, j'ai bien entendu les interrogations de la commission : faut-il que la condamnation maintenue au bulletin n° 1 ne puisse être prise en compte que pour la constatation de la récidive ? Il est vrai que c'est l'objectif principal, et je comprends donc que la commission ait déposé cet amendement.

Toutefois, parallèlement, faudrait-il interdire à la juridiction, lorsque les conditions de la récidive ne sont pas remplies, de prendre en compte la condamnation ayant fait l'objet d'une réhabilitation, afin d'adapter au mieux la peine prononcée ? Cette question mérite d'être posée.

Sur cet amendement, le Gouvernement s'en remet donc à la sagesse du Sénat.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

La parole est à M. Josselin de Rohan, pour explication de vote sur les amendements identiques n° 215 et 279.

Debut de section - PermalienPhoto de Josselin de Rohan

Je partage tout à fait l'analyse de M. le rapporteur et de M. le ministre sur les amendements déposés par nos collègues socialistes et communistes.

Tout à l'heure, M. Michel m'a interpellé. Je lui ferai observer que si les parlementaires peuvent parfaitement porter un jugement sur le fonctionnement de l'institution judiciaire, et ils ne s'en privent d'ailleurs pas, je ne vois pas au nom de quoi on interdirait à un ministre de faire état des dysfonctionnements qu'il a pu constater. Il est parfaitement dans son rôle !

Cela étant dit, je rappellerai à nos collègues socialistes et communistes que, en 2002, au terme d'une période de cinq ans au cours de laquelle ils ont exercé les responsabilités gouvernementales, on dénombrait 700 000 délinquants de plus qu'en 1996, tandis que l'incidence de la délinquance s'était accrue, en Seine-Saint-Denis, à concurrence de 22 % pendant le même temps ! Ces chiffres sont incontestables ! À l'inverse, des chiffres tout aussi objectifs font apparaître que, depuis 2002, on déplore un million de victimes en moins.

Debut de section - PermalienPhoto de Josselin de Rohan

M. Josselin de Rohan. Par conséquent, Mme Royal -qui est cependant un peu plus encline à la répression que vous, monsieur Michel, si j'en crois ses déclarations du moment

Sourires sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Josselin de Rohan

-, M. Fabius et M. Hollande nous semblent frappés d'une singulière amnésie : ils devraient faire preuve d'un peu plus de décence dans l'expression de leur indignation très fabriquée !

Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

C'est vous qui devriez être un peu plus décents !

Les amendements ne sont pas adoptés.

L'amendement est adopté.

L'article 26 est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

L'amendement n° 302 rectifié, présenté par M. Fillon, Mme Debré et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :

Après l'article 26, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article 90-1 du code de procédure pénale est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Si la partie civile le demande, l'information relative à l'évolution de la procédure prévue par le présent article intervient tous les quatre mois et la partie civile est convoquée et entendue à cette fin par le juge d'instruction. »

Cet amendement est-il soutenu ?...

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Le groupe de l'UMP est troublé par les déclarations du ministre d'État !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-René Lecerf

L'information régulière de la partie civile sur l'évolution de la procédure constitue une demande récurrente des associations d'aide aux victimes.

Compte tenu de la durée d'un certain nombre d'informations judiciaires, le traumatisme subi par les victimes à l'occasion de la commission d'infractions se trouve accru. Pour atténuer cette souffrance, il est nécessaire que les victimes aient conscience que leur affaire est suivie avec méthode par le juge d'instruction.

La mesure présentée est de nature à apaiser les parties civiles et à donner à l'instruction un caractère plus serein. Cet amendement vise à permettre l'information de la partie civile tous les quatre mois, en la limitant toutefois aux cas où cette dernière demandera elle-même à bénéficier de cette disposition. L'audition semestrielle prévue par la loi du 9 mars 2004 demeurera de règle lorsque la partie civile ne formulera pas une telle requête.

La version rectifiée de l'amendement paraît encore plus satisfaisante que la rédaction initiale. Elle semble plus cohérente avec les dispositions de l'article 90-1 du code de procédure pénale, qui dispose que le juge avise tous les six mois la partie civile de l'état d'avancement de l'information.

La commission ne peut donc qu'émettre un avis favorable.

Debut de section - Permalien
Brice Hortefeux, ministre délégué

Je souscris totalement aux propos de la commission.

L'amendement vise en fait à donner aux victimes exactement les mêmes droits qu'aux prévenus ; le Gouvernement ne peut qu'être favorable à ce principe.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 26.

CHAPITRE VI

DISPOSITIONS TENDANT À PRÉVENIR LA TOXICOMANIE ET CERTAINES PRATIQUES ADDICTIVES

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

L'amendement n° 155, présenté par M. Goujon et Mme Hermange, est ainsi libellé :

Avant l'article 27, insérer un article additionnel rédigé comme suit :

I - Après le chapitre II du titre IV du livre V de la deuxième partie du code de l'éducation, il est inséré un chapitre ainsi rédigé :

« Chapitre III

« La prévention de la toxicomanie et des conduites à risques

« Art. L. 543-1 - Tous les élèves des classes de CM2 reçoivent une éducation à la prévention des conduites à risques.

« Cette éducation à la prévention des conduites à risques vise à leur apporter une information complète sur les dangers réels que fait encourir la consommation de drogues illicites sur l'individu et la société ainsi que sur les raisons et les modalités selon lesquelles une telle consommation est strictement encadrée sur un plan législatif et pénalement sanctionnée. À cette occasion, est également délivrée une information sur le fonctionnement neurologique et psychique de l'individu.

« Réalisée sous la forme de trois séances de deux heures réparties sur l'ensemble de l'année scolaire, cette éducation est conjointement délivrée par les professeurs des écoles et les associations agréées en application de l'article L. 3410-5 du code de la santé publique.

« Art. L. 543-2 - Tous les élèves des classes de cinquième et de troisième reçoivent une information complète sur les dangers réels que fait encourir la consommation de drogues illicites sur l'individu et la société ainsi que sur les raisons et les modalités selon lesquelles une telle consommation est strictement encadrée sur un plan législatif et pénalement sanctionnée.

« Réalisée sous la forme d'une séance de deux heures durant l'année scolaire, cette information est conjointement délivrée par les enseignants, et en particulier les professeurs principaux, et les associations agréées en application de l'article L. 3410-5 du code de la santé publique.

« Art. L 543-3 - Un programme de sensibilisation aux conduites à risques, commun à l'ensemble des académies, est intégré au temps scolaire et étalé sur l'ensemble de la scolarité, de la première année d'école primaire à la deuxième année d'université.

« Un décret fixe les conditions d'application de cet article.

« Art. L. 543-4 - Les médecins, les personnels médicaux et paramédicaux intervenant en milieu scolaire, les travailleurs sociaux et les enseignants reçoivent une formation initiale et continue propre à leur permettre de détecter les problèmes liés aux conduites addictives et de délivrer aux élèves une information complète sur les dangers réels que fait encourir la consommation de drogues illicites sur l'individu et la société ainsi que sur les raisons et les modalités selon lesquelles une telle consommation est strictement encadrée sur un plan législatif et pénalement sanctionnée.

« Cette formation est dispensée dans les conditions fixées par voie réglementaire.

« Art. L. 543-5 - Les programmes des Instituts universitaires de formation des maîtres intègrent des modules de formation portant sur les conduites à risques et les pratiques addictives. »

II -Un décret fixe les conditions d'application de cet article.

La parole est à M. Philippe Goujon.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Goujon

J'ai trouvé tout de même assez savoureux d'entendre nos collègues de gauche pousser des cris d'orfraie pendant presque une heure à propos de l'insécurité. Leur attitude frisait même l'obstruction.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Goujon

En effet, à l'instar de M. de Rohan, je considère qu'ils ont été les véritables fossoyeurs de la sécurité dans notre pays entre 1997 et 2002. C'était le temps de la « naïveté » !

Nos collègues se plaignent maintenant de l'insécurité dans notre pays, notamment en Seine-Saint-Denis, mais tous leurs amendements, depuis le début de nos travaux, contredisent leurs déclarations de ce matin. C'est au contraire par l'adoption du texte que nous examinons aujourd'hui que nous renforcerons la sécurité dans notre pays !

J'en viens à la présentation de l'amendement.

Nous considérons qu'il convient de donner la priorité à une politique de prévention ayant pour objectif de prémunir les jeunes contre la consommation de drogues et les dommages sanitaires et sociaux qu'elle cause. Pour cela, il faut généraliser l'information sur la nocivité des drogues, en particulier celle du cannabis.

Nous estimons que l'école, dès la classe de cours moyen deuxième année, doit être le fer de lance de cette prévention. De nombreuses expériences ont d'ailleurs été menées en ce sens : il est démontré que c'est à cet âge que les enfants assimilent le mieux les messages de prévention.

Aujourd'hui, la prévention existe dans les collèges et les lycées. Cela va dans le bon sens, mais il faut pousser plus loin. C'est pourquoi Marie-Thérèse Hermange et moi-même proposons que tous les élèves des classes de CM2 reçoivent une éducation à la prévention des conduites à risque, laquelle sera conjointement délivrée par les professeurs des écoles et les associations agréées.

Tous les élèves des classes de troisième recevront, quant à eux, une information complète sur les dangers que fait courir la consommation de drogues illicites, sur les raisons pour lesquelles une telle consommation est strictement encadrée sur le plan législatif et pénalement sanctionnée, ainsi que sur les modalités de cet encadrement.

Enfin, un programme de sensibilisation aux conduites à risque sera intégré à l'emploi du temps scolaire. Dans cette perspective, les enseignants bénéficieront d'une formation initiale et continue adaptée.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-René Lecerf

L'amendement de M. Goujon est tout à fait intéressant, et je suis convaincu que le Gouvernement a écouté sa présentation avec beaucoup d'attention.

Toutefois, aussi pertinentes soient-elles, ces mesures nous semblent relever du domaine réglementaire. À ce titre, elles présentent un risque d'inconstitutionnalité. C'est la seule raison pour laquelle la commission demande à M. Goujon de bien vouloir retirer son amendement.

Debut de section - Permalien
Brice Hortefeux, ministre délégué

Monsieur le sénateur, comme à l'accoutumée, vous posez de vraies questions sur un sujet essentiel pour notre société.

Votre amendement vise à rendre obligatoire, pour les élèves des classes de CM2, de cinquième et de troisième, une information la plus complète possible sur les dangers et les conséquences de la consommation de drogues illicites.

Votre préoccupation est certes justifiée, mais des mesures préventives à destination des plus jeunes ont déjà été prises. C'est là une priorité constante de la politique de santé publique du Gouvernement. Ainsi, voilà deux ans, par le biais de la loi relative à la politique de santé publique, une disposition a été insérée dans le code de l'éducation, selon laquelle une information sur les conséquences de la consommation de drogue sur la santé est délivrée à raison d'au moins une séance par an à l'ensemble des élèves.

Il me semble souhaitable que l'on continue à s'appuyer sur cette disposition. C'est pourquoi le Gouvernement vous demande lui aussi de bien vouloir retirer votre amendement, monsieur Goujon.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Goujon

Je ne suis pas persuadé que les dispositions présentées relèvent du domaine réglementaire, car le code de l'éducation contient déjà des mesures de cet ordre. Quoi qu'il en soit, je n'entends pas polémiquer sur ce sujet avec M. le rapporteur, d'autant que je connais l'attachement de la commission des lois au strict respect de la distinction entre domaine législatif et domaine réglementaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Goujon

Quant aux arguments de M. le ministre, ils m'ont bien évidemment convaincu. Je relèverai toutefois que l'information n'est peut-être pas diffusée sur tout le territoire de façon uniforme. Mon amendement tendait précisément à rendre plus homogène la mise en oeuvre des actions de prévention dans l'ensemble des établissements scolaires de notre pays.

Néanmoins, je retire bien entendu mon amendement.

Le chapitre III du titre Ier du livre IV de la troisième partie du code de la santé publique est remplacé par les dispositions suivantes :

« CHAPITRE III

« PERSONNES SIGNALÉES PAR L'AUTORITÉ JUDICIAIRE

« Art. L. 3413-1. - Chaque fois que l'autorité judiciaire enjoint à une personne ayant fait un usage illicite de stupéfiants de se soumettre à une mesure d'injonction thérapeutique qui consiste en une mesure de soins ou de surveillance médicale, elle en informe l'autorité sanitaire compétente.

« L'autorité sanitaire fait procéder à l'examen médical de l'intéressé par un médecin habilité en qualité de médecin relais.

« La personne bénéficiaire de l'injonction thérapeutique rend compte à l'autorité judiciaire qui a diligenté la mesure de l'exécution de celle-ci.

« Art. L. 3413-2. - Le médecin relais est chargé de la mise en oeuvre de la mesure d'injonction thérapeutique, d'en proposer les modalités et d'en contrôler le suivi sur le plan sanitaire.

« Le médecin relais fait connaître à l'autorité judiciaire son avis motivé sur l'opportunité médicale de la mesure.

« Si le médecin relais estime qu'une prise en charge médicale n'est pas adaptée, il en informe l'autorité judiciaire, après avoir rappelé à l'intéressé les conséquences sanitaires de l'usage de stupéfiants.

« Art. L. 3413-3. - Si l'examen médical prévu à l'article L. 3413-1 confirme l'état de dépendance physique ou psychologique de l'intéressé, le médecin relais invite ce dernier à se présenter auprès d'un établissement agréé ou d'un médecin de son choix ou, à défaut, désigné d'office, pour suivre un traitement médical ou faire l'objet d'une surveillance médicale adaptés.

« Dès la mise en place de la mesure, l'intéressé adresse au médecin relais un certificat médical indiquant la date du début des soins, la durée probable de la mesure et le nom de l'établissement ou l'identité du médecin chargé de sa mise en oeuvre.

« Le médecin relais contrôle le déroulement de la mesure.

« Il informe l'autorité judiciaire de l'évolution de la situation médicale de l'intéressé.

« En cas d'interruption du suivi à l'initiative de l'intéressé, ou de tout autre incident survenant au cours de la mesure, le médecin relais en informe immédiatement l'autorité judiciaire.

« Art. L. 3413-4. - Les modalités d'application des dispositions du présent chapitre sont précisées par décret en Conseil d'État. »

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Michel

Les articles 27 et suivants tendent à apporter des modifications importantes aux dispositions de la loi de 1970 relative à la lutte contre la toxicomanie.

Encore une fois, comme ce fut le cas au cours de nos débats de jeudi dernier, quand il a été question des malades mentaux, la méthode employée est absolument détestable.

Sur la forme, tout d'abord, on considère les malades mentaux et les simples usagers de drogue comme des délinquants en puissance, puisque c'est dans un texte relatif à la prévention de la délinquance que l'on insère des modifications partielles des dispositions régissant les internements d'office ou, dans le cas qui nous occupe ce matin, la répression et la prévention de la toxicomanie.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Michel

Sur le fond, ensuite, chacun le sait, la loi de 1970 est, en fait, inappliquée et inapplicable aujourd'hui.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Michel

Le fait que plus de cinq cents circulaires ont été diffusées par les ministères chargés de la santé, de la justice et de l'intérieur depuis que ce texte est entré en vigueur et qu'un nombre considérable de rapports officiels ont été rédigés sur ce sujet, à l'échelon tant national qu'européen, montre en effet que d'importants problèmes d'application se posent.

D'ailleurs, toutes les associations et tous ceux qui sont engagés dans la prévention de la toxicomanie demandent depuis longtemps une révision et une remise à plat complète de la loi du 31 décembre 1970.

Je n'engagerai pas ici le débat sur ce qu'il convient ou non de faire. Néanmoins, il me semble qu'il aurait été utile de remettre ce texte sur le métier. Le ministre d'État, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire, avait d'ailleurs affirmé, en début de législature, que ce sujet l'intéressait, mais il n'est pas parvenu à convaincre ses collègues de s'atteler à la tâche.

Or, aujourd'hui, que fait-on ? On entend accentuer l'aspect sécuritaire du dispositif, au détriment des soins et de la prévention.

Pourtant, la loi de 1970 présente déjà l'inconvénient de considérer comme des délinquants non seulement les personnes qui font le commerce des substances illicites, mais également celles qui se bornent à les consommer, sans se livrer à la revente. Cela est clair et net ! Par conséquent, ils doivent en principe être poursuivis et condamnés, sauf s'ils se soumettent à une injonction thérapeutique.

Depuis un certain nombre d'années, les ministres de la santé successifs, notamment Mme Barzach et M. Kouchner, ont pris un certain nombre de circulaires relatives aux soins et à la prévention des risques. Nous savons tous, en effet, que certains consommateurs de drogue sont des malades, qu'il convient de soigner. Il arrive d'ailleurs qu'ils se portent volontaires pour suivre un traitement.

Certains d'entre nous, au sein de cette assemblée, militent dans des associations oeuvrant pour la prévention et la réduction des risques. Nous connaissons des centres de soins où l'on délivre de la méthadone ou du Subutex - on souhaite aujourd'hui, soit dit par parenthèse, renoncer à ce dernier produit - ...

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Michel

... à des malades venant volontairement se faire soigner pour essayer de sortir de l'addiction dans laquelle ils sont plongés.

Or c'est sur le profil de ces volontaires qu'il existe une confusion totale dans les débats et les conversations, ainsi d'ailleurs que dans la circulaire du 8 avril 2005, qui est la plus récente en la matière : il ne s'agit absolument pas de jeunes des cités qui fument du « shit » !

Ce sont en fait généralement des adultes, plus ou moins bien intégrés dans la société - plutôt moins que plus, car ils ont souvent connu des difficultés, notamment professionnelles ou familiales -, qui essaient de sortir de leur addiction, sur le conseil de leur médecin traitant. Or, si l'on appliquait la loi à la lettre, un commissaire de police pourrait très bien aller les attendre à la sortie du centre de soins pour les arrêter. Cela s'est d'ailleurs produit dans le passé, à Nîmes, où un commissaire de police particulièrement zélé allait arrêter les malades qui se faisaient soigner dans le car de Médecins du monde !

En tout état de cause, ce projet de loi accentue encore la tendance sécuritaire, au détriment du développement de la prévention et des soins. C'est la raison pour laquelle, sur le fond, les dispositions qui nous sont ici présentées ne sont pas acceptables à nos yeux.

J'observe d'ailleurs que ces mesures sont en complète contradiction avec la pensée sur ce point du Président de la République, qui a tenu les propos suivants en juin 1998, devant l'Assemblée générale des Nations unies consacrée à la lutte contre la drogue : « Les toxicomanes cherchent à sortir de l'enfer. Ils ont besoin d'entendre un langage qui ne soit pas seulement celui de la répression, mais un langage d'attention humaine. »

Je constate que M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire, et le Gouvernement ne suivent pas les préconisations du Président de la République !

Exclamations sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Michel

Je constate également que M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire, appuie la répression, alors que...

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Michel

M. Jean-Pierre Michel. Soit, monsieur le président, mais je reprendrai tout à l'heure la parole pour explication de vote !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

Les deux premiers sont identiques.

L'amendement n° 216 est présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.

L'amendement n° 270 est présenté par MM. Godefroy et Peyronnet, Mme Campion, MM. Cazeau et Domeizel, Mmes Demontès et Jarraud-Vergnolle, M. Michel, Mme Schillinger, MM. Badinter, Collombat, Dreyfus-Schmidt, C. Gautier, Mahéas, Sueur, Guérini, Lagauche, Madec, Mélenchon, Mermaz et Ries, Mmes Tasca, Boumediene-Thiery et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Guy Fischer, pour présenter l'amendement n° 216.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Notre amendement vise à supprimer l'article 27.

En effet, cet article prévoit des modifications de la procédure de l'injonction thérapeutique, or nous nous opposons à certaines d'entre elles.

Ainsi, il est proposé de créer une fonction nouvelle de médecin relais, ce qui nous paraît à la fois inutile et défavorable au patient.

Cette initiative est d'abord inutile, car sa mise en oeuvre alourdira encore les procédures, sans que le texte précise quoi que ce soit pour autant. Surtout, au regard des moyens attribués à la justice ou aux administrations oeuvrant dans le domaine de l'action sociale, on est légitimement en droit de penser que cette disposition restera inapplicable.

Par ailleurs, ce médecin relais deviendra le référent de la personne soumise à l'injonction thérapeutique et son unique interlocuteur dans presque toute la procédure. Cela n'est pas souhaitable, à notre avis, avant tout parce que, de fait, se trouveront tenues à l'écart les structures médicales, collectives et publiques existantes - ces structures qui, au long de ces dernières années, se sont d'ailleurs vues privées d'une part importante de leurs moyens.

Jusqu'à présent, c'était la structure d'accueil de la personne recevant le traitement qui servait d'interlocuteur. Or le fonctionnement collectif de telles structures garantissait certainement un plus juste diagnostic et un suivi plus précis.

Les structures sanitaires et sociales se trouveront ainsi mises de côté, voire contournées, par le biais de cette nouvelle procédure. J'en parle d'expérience, en tant que conseiller général des Minguettes, puisque nous avons très régulièrement, dans l'agglomération lyonnaise, à traiter des problèmes d'addiction. Ils me sont donc familiers depuis plusieurs années, pour ne pas dire plusieurs décennies !

C'est d'ailleurs le même principe qui prévaut lorsqu'il s'agit de supprimer l'enquête familiale, professionnelle et sociale, traditionnellement conduite par les services sociaux. Cette enquête permettait une plus juste adaptation du traitement du malade, ce que souligne d'ailleurs la commission des affaires sociales.

Ainsi, par le biais des modifications proposées, l'injonction thérapeutique deviendra une mesure avant tout judiciaire, le suivi médical se trouvant soumis au bon vouloir d'un médecin relais sur lequel nous ne disposons d'aucune indication.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Pour toutes ces raisons, nous demandons la suppression de l'article 27.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

La parole est à M. Jean-Pierre Michel, pour présenter l'amendement n° 270.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Michel

Comme je l'ai indiqué en m'exprimant sur l'article, nous considérons que les dispositions présentées durcissent le volet répressif de la loi du 31 décembre 1970. Ce n'est vraisemblablement pas ce qu'il convient de faire !

Le dispositif, après trente-cinq années d'application, devait être envisagé de façon plus globale. Il aurait surtout fallu éviter de présenter les consommateurs de substances illicites comme des criminels en puissance. Telle est pourtant la philosophie de ce projet de loi !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Michel

Personnellement, bien entendu, je suis entièrement favorable à la prévention et au traitement médical des toxicomanes, car j'estime qu'il s'agit de personnes qui souffrent et qu'il faut soigner.

Pour autant, je ne partage pas l'avis de Doc Gynéco, personnalité bien connue à l'UMP, puisqu'il participe à ses congrès et qu'il est devenu un grand zélateur de M. le ministre d'État, son « petit maître à penser », paraît-il !

Dans son dernier ouvrage, Doc Gynéco s'exprime de la manière suivante : « Il y avait du shit. On pouvait se faire arrêter pour quelques barrettes. On dealait un peu - il n'était donc pas seulement un usager ! -, pour s'acheter des baskets. » Plus loin, il ajoute que « la drogue douce, il n'y a que ça qui est bon », et que « fumer, ce n'est pas nocif ». Par respect pour nos collègues femmes, je vous ferai grâce du passage où M. Bruno Beausir, puisque tel est son véritable nom, évoque la façon dont il consommait de la « coke » pour faciliter les rapports sexuels avec ses multiples partenaires...

Tout cela ne correspond pas à notre philosophie ni à ce que nous voulons ! Ce que nous voulons, très clairement, c'est une remise à plat de la loi de 1970.

Nous voulons en particulier que l'on poursuive, peut-être plus activement qu'on ne le fait à l'heure actuelle, ceux qui vendent de la drogue, notamment à la plus grande échelle.

Nous voulons aussi que l'on passe des accords avec les pays producteurs, car la culture de la drogue permet à des paysans de vivre, en Amérique du Sud, en Asie, dans le Sud marocain. Que fait-on de ce point de vue ? Comment s'y prend-on pour stopper l'irrigation du marché français et européen ?

Ensuite, on pourra apprécier la situation des simples usagers de drogue d'une tout autre manière que ne l'ont fait les auteurs de la loi de 1970 et que vous ne le faites aujourd'hui, monsieur le ministre, au travers du texte que vous nous présentez, lequel durcit encore le volet répressif !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Michel

En effet, les médecins et le personnel des services sociaux seront placés dans une situation qui leur sera absolument intolérable. Nous y reviendrons encore tout à l'heure. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

L'amendement n° 39 rectifié, présenté par M. Lecerf, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :

Rédiger comme suit cet article :

Le chapitre III du titre Ier du livre IV de la troisième partie du code de la santé publique est ainsi rédigé :

« Chapitre III

« Personnes signalées par l'autorité judiciaire

« Art. L. 3413-1. - Chaque fois que l'autorité judiciaire enjoint à une personne ayant fait un usage illicite de stupéfiants de se soumettre à une mesure d'injonction thérapeutique qui consiste en une mesure de soins ou de surveillance médicale, elle en informe l'autorité sanitaire compétente.

« L'autorité sanitaire fait procéder à l'examen médical de l'intéressé par un médecin habilité en qualité de médecin relais.

« Le médecin relais fait connaître à l'autorité judiciaire son avis motivé sur l'opportunité médicale de la mesure.

« Si le médecin relais estime qu'une prise en charge médicale n'est pas adaptée, il en informe l'autorité judiciaire, après avoir rappelé à l'intéressé les conséquences sanitaires de l'usage de stupéfiants.

« Art. L. 3413-2. - Si l'examen médical prévu à l'article L. 3413-1 confirme l'état de dépendance physique ou psychologique de l'intéressé, le médecin relais invite ce dernier à se présenter auprès d'un centre spécialisé de soins aux toxicomanes ou d'un médecin de son choix ou, à défaut, désigné d'office, pour suivre un traitement médical ou faire l'objet d'une surveillance médicale adaptés.

« Dès la mise en place de la mesure, l'intéressé adresse au médecin relais un certificat médical indiquant la date du début des soins, la durée probable de la mesure et les coordonnées du centre spécialisé ou l'identité du médecin chargé de sa mise en oeuvre.

« Art. L. 3413-3. - Le médecin relais est chargé de la mise en oeuvre de la mesure d'injonction thérapeutique, d'en proposer les modalités et d'en contrôler le suivi sur le plan sanitaire.

« Il informe l'autorité judiciaire de l'évolution de la situation médicale de l'intéressé.

« En cas d'interruption du suivi à l'initiative de l'intéressé, ou de tout autre incident survenant au cours de la mesure, le médecin relais en informe immédiatement l'autorité judiciaire.

« Art. L. 3413-4. - Les modalités d'application des dispositions du présent chapitre sont précisées par décret en Conseil d'État. »

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-René Lecerf

Il s'agit d'un amendement rédactionnel, qui vise à éviter d'inutiles redondances.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Le sous-amendement n° 272, présenté par MM. Godefroy et Peyronnet, Mme Campion, MM. Cazeau et Domeizel, Mmes Demontès et Jarraud-Vergnolle, M. Michel, Mme Schillinger, MM. Badinter, Collombat, Dreyfus-Schmidt, C. Gautier, Mahéas, Sueur, Guérini, Lagauche, Madec, Mélenchon, Mermaz et Ries, Mmes Tasca, Boumediene-Thiery et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

I. - A- Dans la première phrase du deuxième alinéa du texte proposé par l'amendement n° 39 rectifié pour l'article L. 3413-1 du code de la santé publique remplacer les mots :

habilité en qualité de médecin relais

par les mots :

coordinateur de la direction des affaires sanitaires et sociales

B- Dans les troisième et quatrième alinéas du texte proposé par l'amendement n° 39 rectifié pour l'article L. 3413-1 du code de la santé publique, remplacer les mots :

médecin relais

par le mot :

coordinateur

II. - Dans les premier et deuxième alinéas du texte proposé par cet amendement pour l'article L. 3413-2 du code de la santé publique, remplacer les mots :

médecin relais

par le mot :

coordinateur

III - A- Dans le premier alinéa du texte proposé par l'amendement n° 39 rectifié pour l'article L. 3413-3 du code de la santé publique, remplacer les mots :

médecin relais

par le mot :

coordinateur

B- Dans le deuxième alinéa du texte proposé par l'amendement n° 39 rectifié pour l'article L. 3413-3 du code de la santé publique après les mots :

situation médicale

ajouter les mots :

et sociale

C- rédiger ainsi le troisième alinéa du texte proposé par l'amendement pour l'article L. 3413-3 du code de la santé publique :

« En cas d'interruption du suivi de l'initiative de l'intéressé, le coordinateur en informe immédiatement l'autorité judiciaire. »

La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Godefroy

L'article 27 tend à modifier les conditions d'application de l'injonction thérapeutique et à en confier le suivi à un médecin relais.

Outre l'élargissement de la définition de l'injonction thérapeutique, qui sera désormais une mesure de soins ou de surveillance médicale et non plus une cure de désintoxication, outre l'ouverture à l'ensemble de l'autorité judiciaire de la possibilité de mettre en oeuvre cette alternative thérapeutique, l'article 27 prévoit, ce qui n'est pas le moins grave, un dessaisissement de l'autorité sanitaire dans ce domaine.

En effet, l'émergence d'un nouveau personnage, le médecin relais, éclipsera totalement l'autorité sanitaire : c'est lui qui deviendra le seul interlocuteur de l'autorité judiciaire et qui l'informera de l'évolution de la situation médicale de l'intéressé. Il sera également chargé de mettre en oeuvre la mesure d'injonction thérapeutique, d'en proposer les modalités et d'en contrôler le suivi sur le plan sanitaire.

Sur ce point, une question se pose : que devient le médecin de la direction départementale des affaires sanitaires et sociales, la DDASS, qui, à l'heure actuelle, contrôle le suivi de la mesure, choisit la structure de soins après avoir procédé à l'examen médical de l'intéressé ? Le médecin relais se substituera-t-il à lui ou coexistera-t-il avec lui ?

On ne s'étonnera pas que l'aspect sanitaire soit encore une fois laissé pour compte, tant c'est une constante dans ce projet de loi. On fera néanmoins remarquer que le fait de durcir les contrôles, comme le prévoit le projet de loi, et d'instituer, à côté des médecins de la DDASS, des médecins auxiliaires de justice procure un illusoire sentiment de maîtrise du soin par la justice. Cela ne peut que compliquer inutilement les choses, ou pis encore se révéler contre-productif !

On peut d'ailleurs s'interroger sur la situation de ce médecin, qui n'aura pas la qualité d'expert judiciaire, mais dont on attendra « un avis motivé sur l'opportunité d'un suivi médical » et qui sera chargé d'informer l'autorité judiciaire de « l'évolution de la situation médicale de l'intéressé » !

En outre, qui lèvera la mesure lorsque ce médecin conclura qu'une prise en charge médicale n'est ni nécessaire ni adaptée ? Et quel incident, autre que l'interruption du suivi du traitement, pourra bien justifier une information immédiate de l'autorité judiciaire ?

Dans un souci de simplification et en vue de préserver autant que possible le volet sanitaire et social devant accompagner une mesure d'injonction thérapeutique, nous vous demandons, mes chers collègues, d'adopter notre sous-amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Le sous-amendement n° 93 rectifié, présenté par M. About, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

Compléter le deuxième alinéa du texte proposé par l'amendement n° 39 rectifié pour l'article L. 3413-1 du code de la santé publique par une phrase ainsi rédigée :

Elle fait également procéder, à la demande de ce dernier, à une enquête sur la vie familiale, professionnelle et sociale de l'intéressé.

La parole est à M. le rapporteur pour avis.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

Cet amendement vise à maintenir l'enquête sur la vie familiale, professionnelle et sociale du toxicomane menée par la DDASS.

La commission des affaires sociales estime, en effet, que cette enquête permet aux services sociaux de disposer des informations nécessaires au choix d'une mesure adaptée aux besoins de réinsertion de chacun, de manière complémentaire avec les résultats de l'examen médical.

En outre, il nous semble illusoire de penser que les médecins relais procéderont eux-mêmes à une telle enquête. En son absence, la prise en charge des toxicomanes risque d'être réduite à sa seule dimension sanitaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Le sous-amendement n° 273, présenté par MM. Godefroy et Peyronnet, Mme Campion, MM. Cazeau et Domeizel, Mmes Demontès et Jarraud-Vergnolle, M. Michel, Mme Schillinger, MM. Badinter, Collombat, Dreyfus-Schmidt, C. Gautier, Mahéas, Sueur, Guérini, Lagauche, Madec, Mélenchon, Mermaz et Ries, Mmes Tasca, Boumediene-Thiery et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Compléter le deuxième alinéa du texte proposé par l'amendement n° 39 rectifié pour l'article L. 3413-1 du code de la santé publique par une phrase ainsi rédigée :

Elle fait également procéder à une enquête sur la vie familiale, professionnelle et sociale de l'intéressé.

La parole est à M. Jean-Pierre Michel.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Michel

Ce sous-amendement procède de la même philosophie que le sous-amendement n° 272, que vient de présenter M. Jean-Pierre Godefroy : il s'agit de préserver autant que possible le volet sanitaire et social qui doit accompagner une mesure alternative telle que l'injonction thérapeutique.

Nous proposons donc que, en complément de l'examen médical initial du patient, il soit procédé, comme c'est le cas actuellement, à une enquête sur la vie familiale, professionnelle et sociale de l'intéressé.

En effet, en matière de toxicomanie, situation sanitaire et situation sociale sont souvent très imbriquées, comme on peut le constater lorsque l'on se penche sur des cas concrets.

La connaissance de l'ensemble de ces données est particulièrement importante si l'on veut appréhender au mieux la situation réelle du patient et répondre de manière adaptée à ses besoins de réinsertion.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Quel est l'avis de la commission sur les amendements identiques n° 216 et 270, ainsi que sur les trois sous-amendements à son amendement n° 39 rectifié ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-René Lecerf

Je souhaite tout d'abord rappeler à M. Michel que l'usager de produits stupéfiants n'est pas un délinquant potentiel, mais un délinquant tout court, en tout cas au regard de notre droit, notamment de l'article L. 3421-1 du code de la santé publique, qui n'a été modifié ni par l'actuelle majorité ni par la précédente.

Les amendements identiques n° 216 et 270 visent à supprimer la réforme de l'injonction thérapeutique. Or le dispositif présenté nous semble au contraire de nature à garantir une prise en charge socio-sanitaire aux usagers de drogue dépendants, à tous les stades de la procédure pénale.

Cette mesure permet souvent une première prise de contact avec le milieu médical et peut constituer un déclic salutaire, ainsi que l'a observé, lors de son audition, le directeur du centre Marmottan, spécialisé dans la prise en charge des toxicomanes.

La commission a donc émis un avis défavorable sur les amendements identiques n° 216 et 270.

En ce qui concerne le sous-amendement n° 272, la commission avoue son embarras, s'agissant de la terminologie employée et de la substitution au médecin relais d'un coordinateur de la DDASS. Elle s'en remettra donc à l'avis du Gouvernement et de la commission des affaires sociales.

Par ailleurs, la commission est favorable au sous-amendement n° 93 rectifié. La disposition présentée par M. About paraît intéressante pour traiter les problèmes de dépendance aux produits stupéfiants dans leur globalité. De plus, ce sous-amendement apporte un élément de souplesse, en prévoyant que l'enquête n'interviendra qu'à la demande du médecin relais.

À l'inverse, la commission est défavorable au sous-amendement n° 273, le dispositif présenté manquant précisément de souplesse.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Quel est l'avis du Gouvernement sur l'ensemble des amendements et sous-amendements ?

Debut de section - Permalien
Brice Hortefeux, ministre délégué

Les amendements identiques n° 216 et 270, qui tendent à supprimer l'article 27, me donnent l'occasion de revenir sur l'économie générale des dispositions du chapitre VI du projet de loi concernant la toxicomanie. Il me semble en effet utile de rappeler un certain nombre de vérités.

Tout d'abord, après avoir entendu les différents orateurs, je relève qu'une évidence s'impose : la loi de 1970 n'est plus adaptée à la lutte contre la toxicomanie, personne ne peut le contester. Je me réjouis de ce constat unanime.

Il y a en France 3, 5 millions de consommateurs de cannabis. Quelque 850 000 personnes seraient des usagers réguliers, dont 450 000 usagers quotidiens. Parmi les usagers de cannabis interpellés, 67 % ont entre dix-huit et vingt-cinq ans, et 13 % sont mineurs.

Or il est prouvé, malheureusement, que cette consommation n'est pas anodine, contrairement à ce que certains ont voulu faire croire, même s'ils ont pu évoluer sur cette question. Je fais ici allusion à l'auteur cité tout à l'heure par M. Michel... Cette consommation entraîne même des conséquences graves, depuis l'échec scolaire jusqu'à l'augmentation du risque d'accident ou, pis encore, le passage à l'acte agressif déclenché par une euphorie artificielle.

Aujourd'hui, la sanction est, théoriquement seulement, très dure : l'usage simple de stupéfiants est un délit réprimé par un an d'emprisonnement et 3 750 euros d'amende. Il est évidemment, en pratique, presque impossible de poursuivre les 90 000 personnes interpellées chaque année pour usage de cannabis. Le résultat est que cette mesure n'est aujourd'hui pratiquement plus appliquée, hélas ! et que l'interdit social devant la drogue - force est, là aussi, de le reconnaître - a malheureusement disparu.

M. Philippe Goujon acquiesce.

Debut de section - Permalien
Brice Hortefeux, ministre délégué

Il ne faut évidemment pas « dépénaliser » l'usage de stupéfiants, notamment parce que - j'imagine que cet argument fera l'unanimité sur l'ensemble des travées de la Haute Assemblée -, s'agissant d'un délit, il convient de pouvoir recourir à la garde à vue, indispensable aux enquêtes et à la remontée des filières. Cela étant, il faut aussi prendre acte des évolutions et établir des sanctions qui soient adaptées, à tous les stades de la procédure pénale.

C'est la raison pour laquelle le projet de loi prévoit d'étendre la procédure de l'ordonnance pénale au délit d'usage de stupéfiants et d'élargir le registre des peines de substitution.

Le recours à l'ordonnance pénale pour les majeurs pour la sanction de l'usage de drogue aurait l'avantage de rendre plus effectif le dispositif pénal et de permettre un meilleur respect du principe de proportionnalité : le juge pourra proposer des stages de citoyenneté ou des stages de sensibilisation aux dangers de l'usage des produits stupéfiants, comparables aux stages de sécurité routière.

L'orientation sociale, sanitaire et thérapeutique est également une dimension essentielle.

Le projet de loi prévoit d'étendre le champ de l'injonction thérapeutique, mesure que seul pouvait décider jusqu'à présent le procureur de la République. Nous voulons qu'elle puisse être mise en oeuvre à tous les stades de la procédure.

Nous sommes cependant confrontés à une réalité dont on doit mesurer toutes les conséquences, à savoir le faible succès des injonctions thérapeutiques. Leur nombre est passé de 8 000 en 1990 à 4 500 seulement en 2004. La principale explication de cette situation tient sans doute à la réticence des magistrats à recourir à une procédure pour laquelle ils n'ont aujourd'hui aucun « retour », aucune garantie.

C'est à cette difficulté que nous avons voulu remédier en instituant le médecin relais, qui doit être un véritable partenaire de confiance du juge.

Ce médecin relais aura un double rôle, monsieur Fischer.

D'abord, il pourra donner son avis sur l'opportunité médicale de la mesure ; cela permettra, par exemple, de « retourner à l'autorité judiciaire » une personne convaincue d'usage de stupéfiants, mais qui s'avérerait être un dealer.

Ensuite, il proposera les modalités de mise en oeuvre de l'injonction thérapeutique et en contrôlera le suivi sur le plan sanitaire. Il informera régulièrement l'autorité judiciaire et la préviendra sans délai en cas d'interruption du suivi ou de tout autre incident. L'autorité judiciaire qui aura décidé de recourir à la mesure bénéficiera ainsi d'un « retour », ce qui répond très concrètement à une demande des magistrats.

Voilà pourquoi, mesdames, messieurs les sénateurs, le Gouvernement est défavorable aux amendements identiques n° 216 et 270.

L'amendement n° 39 rectifié tend à réorganiser la rédaction de l'article 27 et à la rendre plus lisible, notamment pour ce qui concerne le rôle du médecin relais. Le Gouvernement y est naturellement favorable.

S'agissant du sous-amendement n° 272, vous nous proposez, monsieur Godefroy, de remplacer la notion de « médecin relais » par celle de « coordinateur », en prévoyant que celui-ci relèverait de la DDASS.

Il me semble que deux arguments s'opposent à cette proposition, dont je comprends bien l'origine.

D'abord, il est important que, par son appellation même, le responsable de la mise en oeuvre de l'injonction thérapeutique puisse être clairement identifié comme un médecin, quel que soit d'ailleurs son statut. Il ne doit pas y avoir d'ambiguïté sur ce point.

En outre, je crois que les débats que nous avons eus, à l'article 5, sur le coordonnateur doivent nous inciter à éviter toute confusion entre ces deux dispositifs.

Au travers du sous-amendement n° 93 rectifié, vous posez, monsieur About, la question du maintien de l'enquête sociale.

Cette enquête est-elle utile ? Incontestablement, oui. Est-elle toujours nécessaire ? Sans doute pas, lorsque le médecin dispose de suffisamment d'éléments pour apprécier le contexte familial, professionnel et social dans lequel s'inscrira la mesure d'injonction thérapeutique. Doit-elle être systématique ? Non, car cela risquerait de retarder la mise en place de la mesure.

La solution que vous préconisez est de bon sens, le Gouvernement y est donc favorable.

Enfin, le Gouvernement est défavorable au sous-amendement n° 273, puisque vous entendez, monsieur Michel, rendre l'enquête sociale systématique.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

La parole est à M. Jean-Pierre Michel, pour explication de vote sur les amendements identiques n° 216 et 270.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Michel

Tout d'abord, même si l'excellent M. Brice Hortefeux a vocation à représenter ici l'ensemble du Gouvernement, je m'étonne, comme nombre de mes collègues, de ce que M. le ministre de la santé n'ait pas jugé utile de venir écouter ce que nous avons à dire sur ce texte, ...

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Michel

... qui est tout de même très important au regard de la santé publique.

Pourquoi avons-nous déposé un amendement de suppression de l'article ? Nous ne voulons évidemment pas supprimer l'injonction thérapeutique, mais nous considérons, comme je l'ai dit tout à l'heure, qu'un tel article n'a pas sa place dans ce projet de loi. De façon subsidiaire, bien entendu, nous présentons des amendements qui visent à améliorer le texte.

J'indique que si nous maintenons l'amendement n° 270, nous retirons en revanche le sous-amendement n° 273 et nous nous rallions au sous-amendement n° 93 rectifié, qui est presque identique au nôtre mais permet de ménager davantage de souplesse. Nous faisons nôtres les observations de M. le ministre à cet égard.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Le sous-amendement n° 273 est retiré.

La parole est à M. Guy Fischer, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Je partage tout à fait le point de vue de M. Michel.

Monsieur le ministre, en matière de lutte contre la toxicomanie, les moyens mis en oeuvre aujourd'hui sont insuffisants. Plusieurs articles de presse viennent d'ailleurs de rendre compte de la réalité des grands réseaux de trafiquants, notamment de drogues dures.

Aux Minguettes, où je suis présent depuis 1969, soit à titre professionnel, soit en qualité d'élu, je suis bien placé pour savoir que les moyens consacrés à la lutte contre les grands dealers, ceux qui relèvent du grand banditisme, ne sont pas à la hauteur des besoins. De toute évidence, les résultats pourraient être améliorés.

Par ailleurs, sur le plan médical, notamment en ce qui concerne les consommateurs de drogues douces, telles que le haschich, il est difficile d'assurer une véritable prise en charge, un suivi continu des intéressés, afin de les aider à recouvrer un bon état de santé et à se dégager de l'emprise des dealers.

Cela nécessite l'intervention de structures de proximité. Aux Minguettes, il existe une structure de ce type, le centre Nemo, où des médecins jouent déjà le rôle de médecins relais. Or nous devons nous battre comme des chiens pour obtenir que soient reconduits, d'une année sur l'autre, les budgets lui permettant de fonctionner !

De plus, les jeunes concernés ont bien souvent besoin d'un soutien psychiatrique. Malheureusement, les deux principaux établissements psychiatriques de l'agglomération lyonnaise, que ce soit l'hôpital Saint-Jean-de-Dieu ou l'hôpital du Vinatier, sont cruellement dépourvus des moyens qui permettraient de faire face à l'explosion du nombre des jeunes consommateurs de drogues douces - je ne parle pas, ici, de l'addiction à la cocaïne ou à l'héroïne.

Telle est la réalité à laquelle nous sommes confrontés en tant qu'élus de terrain. Une loi a été votée en 1970, des centaines de décrets d'application ont été mis en oeuvre, mais quid de la médecine scolaire ou universitaire ? Elle est naufragée, alors qu'elle pourrait permettre de se rapprocher des situations concrètes !

Telles sont donc les raisons qui nous ont conduits à déposer un amendement de suppression de l'article 27.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

M. le rapporteur ayant sollicité l'avis de la commission des affaires sociales sur le sous-amendement n° 272, je souhaiterais apporter quelques précisions.

Au-delà du choix des termes, retenir l'appellation « coordinateur » n'étant pas souhaitable, je comprends le souci de M. Godefroy de réintroduire la DDASS au sein du dispositif. C'est d'ailleurs à cette fin que j'avais moi-même déposé le sous-amendement n° 93 rectifié.

En revanche, substituer, comme le propose M. Godefroy, un médecin coordinateur de la DDASS au médecin relais reviendrait à se priver, dans un certain nombre d'endroits, du concours de médecins extérieurs particulièrement qualifiés dans le domaine considéré, ce qui réduirait nos capacités de répondre au défi qui nous est lancé.

Par conséquent, il est, me semble-t-il, préférable de retenir un dispositif plus large, intégrant bien entendu aussi des médecins de la DDASS, qui pourraient apporter leur soutien.

Je souhaiterais donc que M. Godefroy accepte de retirer le sous-amendement n° 272, dans la mesure où je ne pense pas que son intention soit de gêner la bonne application de la mesure.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Le sous-amendement n° 272 est retiré.

Je mets aux voix les amendements identiques n° 216 et 270.

Les amendements ne sont pas adoptés.

Le sous-amendement est adopté.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

La parole est à M. Jacques Mahéas, pour un rappel au règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mahéas

M. le ministre délégué m'a mis personnellement en cause ce matin, en me reprochant de ne pas être présent dans l'hémicycle.

Debut de section - Permalien
Brice Hortefeux, ministre délégué

Mais non !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mahéas

Lorsque je ne suis pas physiquement présent, je me tiens informé du déroulement de la séance.

Quoi qu'il en soit, je trouve indécent, monsieur le ministre, que vous puissiez reprocher à un sénateur de l'opposition de ne pas être toujours assis sur ces travées pour participer au débat.

Pour ma part, je ne reproche pas leur absence à M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire, ou à M. le garde des sceaux, notamment quand des difficultés se manifestent dans le département de la Seine-Saint-Denis ou dans la ville de Corbeil-Essonnes. En effet, je comprends parfaitement qu'ils puissent alors privilégier le terrain, au détriment du débat démocratique. Je le dis avec simplicité, mais aussi avec fermeté.

Monsieur le ministre, je vous ai connu beaucoup plus fair-play. Ce changement de comportement est sans doute dû au fait que vous défendez aujourd'hui un texte qui ne vous convient pas vraiment... D'ailleurs, je le comprends très bien. Si tant de vos collègues du Gouvernement ne participent pas à ce débat, ...

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mahéas

...c'est probablement qu'ils sont conscients du fait que ce projet de loi n'est qu'un simple texte d'affichage, puisqu'il ne sera pas réellement appliqué !

Cela dit, certaines déclarations sur la délinquance qui ont été faites dans les médias, notamment dans le journal Le Monde, ne font que confirmer les propos que j'ai pu tenir ici.

Ainsi, le préfet de Seine-Saint-Denis affirme avoir constaté « une recrudescence de la délinquance peu connue jusqu'ici depuis de nombreuses années », les chiffres étant en hausse de 7, 64 % pour le premier trimestre de l'année 2006.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mahéas

En outre, les violences contre les personnes, les vols avec violence et les vols avec arme blanche ont respectivement progressé de 14, 11 %, de 22, 62 % et de 16, 19 % par rapport à 2005. Quant à la part des mineurs dans la délinquance de voie publique, elle est passée de 44, 23 % à 47, 67 %.

Lorsque le préfet évoque les nombreuses vacations que les services de sécurité publique doivent effectuer au tribunal de grande instance et au centre de rétention de Bobigny, ou les quelque 150 visites ministérielles annuelles dans le département, il met en exergue, comme moi, le manque d'effectifs sur le terrain, de telles sujétions mobilisant un nombre important de policiers.

Lorsque j'ai rappelé qu'il manquait 500 policiers en Seine-Saint-Denis, vous ne m'avez pas cru ! M. Sarkozy s'est borné à promettre d'affecter 300 policiers de plus dans le département.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mahéas

Mais je n'ai pas dit que c'est mal, j'ai simplement dit que c'est insuffisant : il nous manque en réalité 500 policiers !

Par ailleurs, nous avons insisté sur l'importance d'affecter des personnels expérimentés en Seine-Saint-Denis. Or, lorsqu'il fait référence à « l'extrême jeunesse des commissaires qui sont nommés dans ce département », le préfet ne dit pas autre chose.

Au-delà, le préfet souligne la paupérisation de la population de la Seine-Saint-Denis, département qui accueille à lui seul 35 % des populations pauvres de la région d'Île-de-France. Il évoque en outre la situation des jeunes, qui sont les principales victimes du chômage, ainsi que l'emprise croissante des mouvements religieux sur la vie politique.

Tous ces éléments sont exacts ; ils ont été rapportés par un grand commis de l'État, que je salue à cet instant.

En revanche, je suis plus réservé quant à son analyse sur la justice. De ce point de vue, je partage tout à fait l'opinion de M. Rosenczveig, président du tribunal pour enfants de Bobigny.

Incarcérer un jeune pour trois mois, est-ce une mesure féconde ?

Exclamations sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mahéas

Certes, il ne commettra pas d'autre délit pendant cette période, mais, au-delà, le souci éducatif est loin de prévaloir dans les prisons.

À cet égard, l'élaboration de ce texte aurait pu être l'occasion d'engager une réflexion sur la prévention de la délinquance.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mahéas

J'en termine, monsieur le président, mais je tiens à répondre au reproche qui m'a été adressé.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Votre nom n'a jamais été cité, monsieur Mahéas ! Je souhaite simplement que vous terminiez votre rappel au règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mahéas

En conclusion, je souhaite que la réalité de la situation de la Seine-Saint-Denis fasse l'objet d'une réflexion collective, au-delà des clivages politiques traditionnels. C'est la représentation nationale dans son ensemble qui doit être saisie.

Pour ma part, je suis un homme de dialogue. Vous le savez, monsieur le ministre : vous l'avez d'ailleurs souligné à plusieurs reprises. Par conséquent, si nous pouvions dégager des points de convergence sur ce dossier, nous serions prêts à travailler avec tout le monde.

Alors, de grâce, ne nous attaquez pas comme vous l'avez fait ! La Seine-Saint-Denis est un département difficile. Le Premier ministre a été bien heureux de pouvoir compter sur l'ensemble des maires de ce département lors des violences urbaines de la fin de l'année dernière. À cette occasion, nous avons joué les pompiers, et non les pyromanes. Nous n'avons pas voulu exploiter politiquement les difficultés, je vous demande d'observer la même retenue.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - Permalien
Brice Hortefeux, ministre délégué

Monsieur le sénateur, je ne voudrais pas qu'il y ait d'ambiguïtés.

Ce matin, j'ai effectivement évoqué votre absence. Il s'agissait d'un constat, presque d'un regret. En effet, vous l'avez souligné à juste titre, j'ai rendu hommage à plusieurs reprises à l'esprit d'ouverture et à la volonté de dialogue que vous avez manifestés à l'occasion de l'examen du projet de loi relatif à la fonction publique territoriale. Un certain nombre de vos collègues ici présents peuvent en témoigner.

Cela étant rappelé, je ne puis, monsieur le sénateur, laisser passer sans réagir certaines contrevérités que vous avez énoncées.

En ce qui concerne tout d'abord l'état réel des effectifs de police dans votre département, celui-ci sera doté, à la fin de cette année, de 900 policiers de plus qu'en 2002.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mahéas

Venez voir ce qui se passe dans nos commissariats !

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Monsieur Mahéas, laissez M. le ministre s'exprimer, comme vous avez pu le faire !

Debut de section - Permalien
Brice Hortefeux, ministre délégué

C'est un constat, monsieur le sénateur !

S'agissant ensuite de l' « extrême jeunesse » des commissaires nommés dans votre département, c'est là aussi une contrevérité.

Debut de section - Permalien
Brice Hortefeux, ministre délégué

À vous entendre, on pourrait croire que les trente-deux commissaires que compte la Seine-Saint-Denis ont tous à peine atteint l'âge de la maturité, voire de la majorité ! En réalité, sur ces trente-deux fonctionnaires, seulement quatre sont âgés de trente ans ou moins. Par conséquent, les vingt-huit autres sont précisément dans l'âge de la maturité professionnelle et de l'expérience.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Dites-le donc au préfet de la Seine-Saint-Denis !

Debut de section - Permalien
Brice Hortefeux, ministre délégué

Enfin, monsieur Mahéas, il faut faire très attention à ne pas tomber dans la caricature, car la caricature, c'est l'excès, et l'excès ne permet pas de faire progresser le débat démocratique.

Si vous vous avancez sur ce terrain, vous nous incitez forcément à faire quelques rappels et à poser certaines questions essentielles. Y a-t-il aujourd'hui plus de délinquants qu'il n'y en avait entre 1997 et 2002 ? Non, ils sont moins nombreux qu'à cette époque !

Debut de section - Permalien
Brice Hortefeux, ministre délégué

Mais si ! Je ne rappellerai pas tous les chiffres, mais la délinquance générale a régressé de 8, 8 % entre 2002 et aujourd'hui, alors qu'elle avait augmenté de 14, 4 % entre 1997 et 2002 !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Peyronnet

Parce que les mains courantes déposées ne sont plus comptabilisées dans les chiffres de la délinquance !

Debut de section - Permalien
Brice Hortefeux, ministre délégué

De même, la délinquance sur la voie publique a reculé de près de 24 % depuis 2002, alors qu'elle avait augmenté de plus de 10 % lorsque vous étiez aux responsabilités !

Debut de section - Permalien
Brice Hortefeux, ministre délégué

M. Brice Hortefeux, ministre délégué. Enfin, le nombre des homicides a diminué de 12 %, et les chiffres de la délinquance « en col blanc » marquent également une baisse !

Exclamationssur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Goujon

C'est à votre époque que la délinquance s'est aggravée !

Debut de section - Permalien
Brice Hortefeux, ministre délégué

Par conséquent, excusez-moi de le souligner, mais si l'on compare point par point les statistiques de la délinquance pour la période comprise entre 1997 et 2002 à celles de la période allant de 2002 à aujourd'hui, on constate que la situation s'est améliorée dans tous les secteurs.

Debut de section - Permalien
Brice Hortefeux, ministre délégué

Si vous persévérez dans votre attitude, vous nous obligerez à vous poser une nouvelle fois la question suivante : comment pouvez-vous regretter le manque d'effectifs policiers, alors que vous n'avez voté ni le projet de loi pour la sécurité intérieure, ...

Debut de section - Permalien
Brice Hortefeux, ministre délégué

...ni l'augmentation des effectifs, ni le projet de loi d'orientation et de programmation pour la justice ? Soyez donc cohérents !

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Et vous, quand vous étiez dans l'opposition, vous votiez tous les textes soumis au Parlement ?

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Acte est donné de ce rappel au règlement.

Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à onze heures trente, est reprise à onze heures trente-cinq.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

La séance est reprise.

Nous reprenons la discussion du projet de loi relatif à la prévention de la délinquance.

Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus à l'examen d'un amendement tendant à insérer un article additionnel avant l'article 28.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

L'amendement n° 217, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Avant l'article 28, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Les entreprises de transport public de voyageurs organiseront des formations obligatoires à destination des salariés afin de les sensibiliser aux problèmes de santé et de sécurité.

Les salariés ont la possibilité de consulter la médecine du travail chaque fois qu'ils le souhaitent, notamment afin d'assurer un suivi médical régulier.

En cas d'inaptitude provisoire ou définitive d'un salarié, les entreprises de transport public de voyageurs devront prévoir des règles de reclassement maintenant le revenu du salarié.

La parole est à M. Guy Fischer.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Notre amendement a pour objet d'apporter une réponse concrète au problème de l'usage des drogues - cela soit dit sans prétention, tant le problème est vaste et grave -, s'agissant en particulier des personnes travaillant dans le secteur des transports publics de voyageurs.

En effet, l'article 28, que nous examinerons ensuite, tend à apporter une réponse exclusivement répressive à ce problème, en aggravant les sanctions pénales applicables aux salariés des entreprises concernées pris en infraction.

Pour notre part, nous estimons au contraire que toute conduite addictive, qu'il s'agisse d'ailleurs de drogues ou d'alcool, relève de la santé publique, et donc de la médecine. C'est pourquoi nous préconisons la mise en place de différents dispositifs de dépistage et d'aide, seuls outils d'une véritable politique de prévention.

Nous proposons donc que les entreprises de transport public organisent des formations obligatoires à destination des salariés sur le thème de la santé et de la sécurité. Cela se pratique déjà, certes, mais il faut que ces formations soient vraiment à la hauteur des enjeux.

Nous voudrions en outre que les salariés puissent consulter la médecine du travail aussi souvent qu'ils le souhaitent, et non pas uniquement au moment de la visite annuelle.

Enfin, les salariés dépendants d'une drogue sont, à notre sens, les premières victimes de ce qui leur arrive ; ils ne doivent en aucun cas être sanctionnés ou pénalisés pour un comportement qui relève, selon nous, de la maladie. À cet égard, il faut faire confiance à tous ceux qui sont confrontés à ces problèmes, notamment les médecins, pour savoir véritablement discerner les cas relevant d'un traitement médical.

Il faudrait pouvoir envisager, pour ces salariés, des possibilités de reclassement ou d'aménagement de leurs conditions de travail, en cohérence avec leur traitement ou leur prise en charge médicale, et non pas les vouer au licenciement, comme c'est malheureusement la plupart du temps le cas. Il convient, à mon avis, après un dialogue avec le salarié portant sur ses responsabilités et sur les enjeux de la situation, de lui donner une chance, afin que l'issue puisse être médicale et non pas pénale.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-René Lecerf

Sur le fond, je me garderai bien de contester l'intérêt des dispositions présentées par M. Fischer.

Cependant, je constate qu'elles ne sont pas codifiées, que leur champ excède largement celui du présent projet de loi et qu'elles devraient, de toute manière, faire l'objet d'une concertation préalable avec les partenaires sociaux.

C'est pourquoi la commission émet un avis défavorable sur l'amendement.

Debut de section - Permalien
Brice Hortefeux, ministre délégué

Monsieur Fischer, je vous rappelle que l'article 28 du présent projet de loi tend à permettre, sur réquisitions du procureur de la République, de procéder à un dépistage de la consommation de produits stupéfiants auprès des employés des sociétés de transport public de voyageurs.

Vous souhaitez, en réalité, substituer à ce dépistage une sensibilisation de ces employés aux problèmes de santé et de sécurité, ainsi qu'un suivi médical. Or la médecine du travail joue déjà ce rôle : il lui appartient d'assurer un suivi dans ce domaine, et surtout une prévention.

Je soulignerai tout d'abord que la consommation de produits stupéfiants par les conducteurs de véhicules de transport public de voyageurs est une infraction à la loi pénale. Surtout, elle peut mettre en danger la vie même des passagers.

Par conséquent, la sensibilisation des salariés aux questions de santé et de sécurité, qui incombe à tout chef d'entreprise sans que la loi ait à intervenir, ne constitue pas, à nos yeux, une réponse satisfaisante. On imagine mal, d'ailleurs, pour être tout à fait concret, que les conducteurs de véhicules de transport public de voyageurs ne soient pas conscients des dangers de la consommation de produits stupéfiants.

C'est pourquoi le Gouvernement est défavorable à votre amendement, monsieur Fischer, même s'il comprend vos motivations. Nous ne souhaitons pas qu'il y ait substitution de la sensibilisation à la répression.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

La parole est à M. Guy Fischer, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Monsieur le ministre, vous avez reprécisé la philosophie de l'article 28. Cependant, chaque cas concret doit faire l'objet d'un traitement particulier, d'autant que, même si les accidents marquent toujours profondément les esprits, quelle qu'en soit d'ailleurs la cause, seule une infime minorité de salariés est concernée par des problèmes liés à la consommation d'alcool ou de drogues.

Nous pensons donc, connaissant l'action menée en matière de prévention et de sécurité tant par les chefs d'entreprises que par les organisations syndicales, qu'il est possible d'aller plus loin. Mais il ne s'agit en aucun cas, pour nous, de mettre en cause la sécurité des personnes transportées.

L'amendement n'est pas adopté.

Le code de la santé publique est ainsi modifié :

1° L'article L. 3421-1 est complété par les trois alinéas suivants :

« Si l'infraction punie à l'alinéa précédent est commise, dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, par une personne dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une mission de service public les peines sont portées à cinq ans d'emprisonnement et à 75 000 € d'amende.

« Si la même infraction est commise par les personnels d'une entreprise de transport public de voyageurs, terrestres, maritimes ou aériens, dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de leurs fonctions, sont également encourues les peines complémentaires d'interdiction définitive d'exercer une profession ayant trait au transport public de voyageurs et l'obligation d'accomplir, le cas échéant à leurs frais, un stage de sensibilisation aux dangers de l'usage des produits stupéfiants.

« Un décret en Conseil d'État fixe la liste des personnels des entreprises de transport public de voyageurs soumis aux présentes dispositions. » ;

2° L'article L. 3421-4 est ainsi modifié :

a) Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Les provocations prévues au premier alinéa dirigées vers un mineur ou commises dans des établissements d'enseignement ou d'éducation ou dans les locaux de l'administration et aux abords de ceux-ci lors des entrées ou des sorties sont punies de dix ans d'emprisonnement et de 100 000 € d'amende. » ;

b) L'article est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les personnes coupables des délits prévus par le présent article encourent également la peine complémentaire d'obligation d'accomplir, le cas échéant à leurs frais, un stage de sensibilisation aux dangers de l'usage de produits stupéfiants. » ;

3° Après l'article L. 3421-4, il est inséré deux articles ainsi rédigés :

« Art. L. 3421-5. - Sur réquisitions du procureur de la République, les officiers de police judiciaire et, sur l'ordre ou la responsabilité de ceux-ci, les agents de police judiciaire et agents de police judiciaire adjoints mentionnés à l'article 20 et au 1° de l'article 21 du code de procédure pénale sont habilités, aux fins de rechercher et de constater le délit prévu au troisième alinéa de l'article L. 3421-1, à entrer dans les lieux où s'exerce le transport public de voyageurs, terrestre, maritime ou aérien, ainsi que dans leurs annexes et dépendances, sauf s'ils constituent un domicile, en vue de :

« 1° Contrôler l'identité des personnes présentes, pour déterminer celles relevant des dispositions du troisième alinéa de l'article L. 3421-1 ;

« 2° Procéder auprès de ces personnes, s'il existe à leur encontre une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner qu'elles ont fait usage de stupéfiants, à des épreuves de dépistage en vue d'établir la commission du délit recherché.

« Lorsque ces épreuves de dépistage se révèlent positives ou lorsque la personne refuse ou est dans l'impossibilité de les subir, les officiers ou agents de police judiciaire et agents de police judiciaire adjoints font procéder aux vérifications destinées à établir la preuve de l'usage de produits stupéfiants.

« Les vérifications visées à l'alinéa précédent sont faites au moyen d'analyses et examens médicaux, cliniques et biologiques. En pareil cas, un échantillon est conservé dans des conditions adéquates.

« Les réquisitions du procureur de la République sont écrites, présentées aux personnes intéressées à leur demande, et précisent qu'elles ont pour but la recherche de l'infraction prévue au troisième alinéa de l'article L. 3421-1. Ces réquisitions sont prises pour une durée maximum d'un mois et précisent les locaux où se déroulera l'opération de contrôle ainsi que les dates et heures de chaque intervention.

« Les mesures prises en application du présent article font l'objet d'un procès-verbal remis à l'intéressé.

« Art. L. 3421-6. - I. - Le fait de refuser de se soumettre aux vérifications prévues par l'article L. 3421-5 est puni de deux ans d'emprisonnement et 30 000 €d'amende.

« II. - Les personnes physiques coupables de ce délit encourent également les peines complémentaires suivantes :

« 1° La suspension pour une durée de trois ans au plus du permis de conduire ; cette suspension peut être limitée à la conduite en dehors de l'activité professionnelle ; elle ne peut être assortie du sursis, même partiellement ;

« 2° L'annulation du permis de conduire avec interdiction de solliciter la délivrance d'un nouveau permis pendant trois ans au plus ;

« 3° La peine de travail d'intérêt général selon les modalités prévues à l'article 131-8 du code pénal et selon les conditions prévues aux articles 131-22 à 131-24 du même code ;

« 4° La peine de jour-amende dans les conditions fixées aux articles 131-5 et 131-25 du code pénal ;

« 5° L'interdiction pour une durée de cinq ans au plus d'exercer une profession ayant trait au transport de voyageurs ;

« 6° L'obligation d'accomplir un stage de sensibilisation aux dangers de l'usage des produits stupéfiants. »

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Je parlerai au nom de Mme Boumediene-Thiery, qui ne peut être parmi nous ce matin.

Le paragraphe 1° de l'article 28 du projet de loi entraîne, pour certaines catégories de personnes et dans certains lieux, une aggravation inacceptable des peines liées à l'usage de stupéfiants. Il est en effet prévu que, si l'infraction d'usage illicite de substances ou de plantes classées stupéfiants est commise par une personne dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une mission de service public, les peines, qui sont actuellement de un an de prison et 3 750 euros d'amende, sont portées à cinq ans d'emprisonnement et 75 000 euros d'amende.

Dans le cas où cette même infraction est commise par les personnels d'une entreprise de transport public, une peine complémentaire prévoyant l'interdiction définitive d'exercer une profession ayant trait au transport public de voyageurs peut être prononcée.

Nous remarquons tout d'abord que ces dispositions concernent uniquement les usagers de drogues illicites, et en aucun cas ceux de la première des drogues licites, l'alcool. Elles sont proprement inacceptables et contreproductives.

Elles sont inacceptables, car nous sommes censés traiter ici de prévention. Or, encore une fois, vous vous bornez à présenter des propositions essentiellement répressives et vous dégainez l'arme privilégiée de votre arsenal : l'aggravation des peines.

En quoi le fait de placer une personne, pendant cinq ans, dans ces lieux indignes pour la République que sont les prisons françaises contribuera-t-il à prévenir la délinquance ? En rien !

Dans la majorité des cas, vous allez au contraire placer un simple usager d'ecstasy, de cocaïne ou de cannabis dans une situation criminogène, car, loin d'être privé de drogues - celles-ci, rappelons-le, ne sont pas absentes des prisons -, il apprendra mille et une manières d'acquérir, de transformer et de vendre ces produits.

Un pallier supplémentaire est franchi dans l'inacceptable avec cette peine complémentaire d'interdiction définitive d'exercer une profession ayant trait au transport public de voyageurs.

Pourquoi prendre une telle mesure ? De quel droit ? Quel est le but recherché lorsqu'une personne emprisonnée pendant cinq ans et condamnée à payer une amende pouvant atteindre 75 000 euros se voit, en plus, interdire définitivement d'exercer le travail pour lequel elle a été formée ? Une telle mesure, dont l'effet dissuasif est nul pour tous les types de crimes, sera encore plus inefficace dans le contexte de la pathologie dont souffrent les usagers de drogues.

Pis, cette mesure constitue une autre sorte de double peine. En effet, cette personne, condamnée pénalement, l'est aussi socialement et économiquement, puisqu'elle ne peut plus exercer son métier. Que devra-t-elle faire ? L'incitez-vous à devenir dealer pour gagner sa vie et faire vivre sa famille ?

Monsieur le ministre, ces dispositions sont contraires au principe d'égalité. En effet, pourquoi viser uniquement les usagers de drogues illicites ?

Vous me répondrez que ces personnes sont responsables de la vie d'autrui. Certes, mais, dans ce cas, pourquoi ne pas étendre ces dispositions aux chirurgiens qui nous opèrent, aux architectes qui bâtissent nos maisons, voire aux ministres qui nous gouvernent ?

Les Verts ne peuvent tolérer une telle rupture d'égalité. Si le Conseil constitutionnel n'invalide pas votre projet de loi pour inconstitutionnalité, nous sommes prêts à porter le débat au niveau européen.

Mais cet article comporte d'autres dispositions liberticides. Ainsi, le paragraphe 3° tend à autoriser les officiers de police judiciaire, sur réquisitions du procureur de la République valables pendant un mois, à « entrer dans les lieux où s'exerce le transport public de voyageurs, terrestre, maritime ou aérien, ainsi que dans leurs annexes et dépendances » en vue, notamment, de « procéder auprès de ces personnes, s'il existe à leur encontre une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner qu'elles ont fait usage de stupéfiants, à des épreuves de dépistage en vue d'établir la commission du délit recherché. »

Nous sommes ici dans l'incertitude et le flou absolus, ce qui laisse la porte ouverte à l'arbitraire.

Qu'entendez-vous donc par « raisons plausibles de soupçonner » ? Comment cela s'apprécie-t-il ?

Par ailleurs, cette disposition, qui figurait déjà dans les versions antérieures du présent projet de loi, risque de se situer hors du cadre légal.

Selon la Ligue des droits de l'homme, la Chancellerie, interrogée par le ministère de l'intérieur, a d'ailleurs émis, dans une note en date du 7 mars 2006, d'importantes réserves « sur la constitutionnalité des dispositions de l'article 25, [numéro de l'article alors qu'il ne s'agissait que d'un avant-projet de loi] ».

Ces dispositions violent le principe de proportionnalité posé par l'article 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, qui dispose que « la loi ne doit établir que des peines strictement et évidemment nécessaires ».

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Je suis saisi de treize amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

Les deux premiers sont identiques.

L'amendement n° 218 est présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

L'amendement n° 274 est présenté par MM. Godefroy et Peyronnet, Mme Campion, MM. Cazeau et Domeizel, Mmes Demontès et Jarraud-Vergnolle, M. Michel, Mme Schillinger, MM. Badinter, Collombat, Dreyfus-Schmidt, C. Gautier, Mahéas, Sueur, Guérini, Lagauche, Madec, Mélenchon, Mermaz et Ries, Mmes Tasca, Boumediene-Thiery et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Guy Fischer, pour présenter l'amendement n° 218.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'article 28 prévoit l'aggravation des sanctions pénales prises à l'encontre des salariés qui feraient usage de stupéfiants. À cet effet, le procureur de la République pourrait autoriser la police à intervenir à tout moment dans les entreprises afin de procéder à des examens de dépistage d'utilisation d'alcool, de stupéfiants ou d'autres produits interdits.

Certes, tout le monde en convient, le dépistage préventif de l'utilisation de substances dangereuses est une très bonne chose.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Mais avec cette disposition, une fois encore, nous sortons du cadre de la prévention pour entrer dans celui de la répression.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

En effet, cet article ne vise pas à s'assurer de la santé des salariés ou de la sécurité des usagers des transports. Je rappelle pourtant que l'un des points faibles de notre pays en matière de santé publique est la prévention, et ce n'est pas M. About qui me contredira. Il s'agit ici d'apporter une réponse particulièrement répressive aux problèmes des salariés victimes d'addiction.

Or les salariés des transports sont déjà soumis à un certain nombre de règles très strictes, contraignantes, visant - et c'est légitime - à assurer la sécurité des usagers. Ils doivent ainsi subir de nombreux contrôles dont les conséquences sont importantes, puisqu'ils peuvent perdre leur habilitation, ce qui entraîne le plus souvent leur licenciement.

Le fait d'accroître le dispositif de sanctions visant ces salariés n'aura aucun effet sur le douloureux problème de la dépendance aux drogues, qui relève du domaine de la maladie. Les réponses que l'on doit y apporter doivent donc rester d'ordre médical, ce que ne prévoit malheureusement pas cet article.

Par ailleurs, en ce qui concerne les règles d'habilitation d'accès, notamment dans les transports aériens, les récentes évolutions montrent clairement les incohérences de la majorité sur cette question.

L'utilisation des fichiers STIC et JUDEX, qui peut permettre le retrait du badge d'accès, est très contestable, à tel point que les règles appliquées semblent parfois relever de l'arbitraire et du bon vouloir du préfet.

Surtout, la détérioration croissante des conditions de travail, en particulier le recours accru à la flexibilité, est l'une des premières causes d'insécurité dans les transports. Le recours massif aux emplois précaires, et notamment aux intérimaires, bien souvent confrontés à un problème de formation et d'expérience, conduit en effet à un turn-over particulièrement élevé dans ces secteurs d'activité.

Pour toutes ces raisons, nous souhaitons la suppression de cet article.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

La parole est à M. Jean-Pierre Michel, pour présenter l'amendement n° 274.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Michel

Nous demandons également la suppression de cet article, et ce pour plusieurs raisons.

Tout d'abord, mises à part une ou deux dispositions, cet article totalement répressif nous semble démagogique.

Croit-on vraiment que l'on empêchera que des personnes se droguent ou « dealent » en augmentant de façon considérable les peines de prison et les amendes visant certaines catégories de personnes investies de l'autorité publique ou exerçant leur activité professionnelle dans le domaine du transport ? Cette mesure est totalement démagogique.

Les dispositions de l'article L. 3421-5, surtout, nous semblent graves. Les sénateurs socialistes n'ont pas déposé d'amendements en commission des lois, mais, comme l'a dit l'excellent représentant du Gouvernement, nous avons tout le temps puisqu'il y aura plusieurs lectures de ce texte. Il nous faudra donc y revenir.

Cet article dispose que, sur réquisitions du procureur de la République - personnellement, je préfèrerais une ordonnance d'un juge des libertés, par exemple -, la police peut faire des perquisitions dans tous les « lieux où s'exerce le transport public de voyageurs », « sauf s'ils constituent un domicile ».

Premièrement, il n'est pas précisé si ces perquisitions pourront avoir lieu de jour et de nuit. La question se pose.

Deuxièmement, qu'entend-on par « les lieux » ?

Sont concernés le métro parisien, les aéroports et les gares. Cela signifie que, si on applique cet article de façon large, sur simple réquisition du procureur de la République ou d'un substitut, des policiers pourront interpeller en ces lieux toute personne, et pas seulement les salariés qui participent au transport. Toutes les personnes présentes dans le métro, les aéroports et les halls de gare pourront donc être soumises à des contrôles, afin de déterminer si elles sont susceptibles de relever de ces dispositions, et se voir imposer des mesures de dépistage.

Cet article est donc absolument inacceptable en l'état. Je souhaite que, dans la suite de nos débats et de nos lectures, nos collègues de l'Assemblée nationale puissent le modifier.

Certes, figurent également dans ce texte d'autres dispositions qui tendent à prévoir, non plus une aggravation des peines de prison et d'amendes, qui ne sert strictement à rien, mais des mesures d'interdiction professionnelle, ce qui est très positif, notamment lorsque les salariés visés sont chauffeurs de bus ou pilotes d'avion. Une telle interdiction pourrait d'ailleurs être étendue à ceux d'entre eux qui font un usage immodéré de l'alcool.

La mesure qui concerne l'incitation des mineurs à la sortie des établissements scolaires, dont nous savons tous qu'elle représente un grave problème, est également acceptable.

Cependant, les dispositions exclusivement répressives contenues dans cet article nous incitent à demander sa suppression.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

L'amendement n° 166, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et M. Desessard, est ainsi libellé :

Rédiger comme suit cet article :

Les articles L. 3421-1 à L. 3421-4 du code de la santé publique sont abrogés.

La parole est à M. Jean Desessard.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

La prise en compte de la problématique de l'usage des stupéfiants ne peut passer par la répression.

La France, à l'instar de nombreux pays européens, doit dépénaliser la consommation de drogues et mettre en place une réelle politique nationale de réduction des risques. En effet, la question du traitement des conduites addictives relève avant tout d'une politique de santé publique.

Les villes européennes ont presque toutes adopté, en la matière, une politique dite de « réduction des risques liés à l'usage des drogues ». La France, quant à elle, reste le pays le plus répressif d'Europe. Elle est le principal obstacle à une politique européenne alternative en matière de drogue.

L'Europe a les moyens de mettre en oeuvre une politique sanitaire, sociale et sociétale, alternative à une politique sans cesse plus répressive et dont les résultats sont catastrophiques.

La répression, qui représente une aubaine pour les trafiquants et transforme les usagers en marginaux, ne fait qu'augmenter le trafic. Nous devons en finir avec la pénalisation de l'usage privé de drogues.

La prévention est la seule arme efficace contre l'usage de l'alcool, du tabac, du cannabis et des autres substances dangereuses pour la santé. Le simple usage de drogues ne doit plus conduire en prison, sauf s'il met en danger la vie d'autrui. Il convient donc de définir en quelle « petite » quantité ces substances sont assimilables à la consommation.

Quelque 90 000 usagers sont interpellés chaque année, dont plus de 80 % pour usage de cannabis. Cette action n'est utile en termes ni de santé publique ni de sécurité publique. La police doit se consacrer essentiellement à la lutte contre le trafic. C'est l'une des conclusions à laquelle les Britanniques sont parvenus en incitant à dépénaliser l'usage du cannabis et à le déclasser de la liste des psychotropes interdits.

Il est urgent d'appliquer cette mesure en France. La prohibition des drogues engendre, outre des mafias redoutables, une circulation massive d'argent sale que l'on est bien impuissant à contrôler, et une délinquance internationale qui alimente une délinquance locale.

Si l'on veut combattre efficacement ces trafics dangereux à tous points de vue, il faut commencer par transformer les modalités répressives de la loi contre les usagers, renforcer une présence policière de proximité destinée à démanteler les trafics locaux, favoriser l'assistance médicosociale, et inventer avec les consommateurs de nouveaux modes de gestion des drogues.

Qu'il s'agisse de médicaments, d'alcool, ou d'héroïne, ces produits sont dangereux et il faut apprendre à les contrôler.

La stratégie à adopter s'agissant des politiques de réduction des risques en Europe consiste à expérimenter de nouveaux modes de gestion des drogues - usage, contrôle, soins et approvisionnement - adaptés à chaque type de produit.

Nous sommes favorables à une interdiction de la publicité sur toutes les drogues, mais également au développement d'une information fiable et responsabilisante, d'une prévention, générale - école, affichage - et spécifique par rapport aux usagers des drogues et aux populations à grands risques.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

L'amendement n° 40, présenté par M. Lecerf, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :

Rédiger comme suit le 1° de cet article :

1° L'article L. 3421-1 est complété par deux alinéas ainsi rédigés :

« Les personnes coupables de ce délit encourent également, à titre de peine complémentaire, l'obligation d'accomplir un stage de sensibilisation aux dangers de l'usage des produits stupéfiants, selon les modalités fixées à l'article 131-35-1 du code pénal.

« Si l'infraction est commise dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, par une personne dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une mission de service public, ou par le personnel d'une entreprise de transports terrestres, maritimes, aériens, de marchandises ou de voyageurs, exerçant des fonctions mettant en cause la sécurité du transport dont la liste est fixée par décret en Conseil d'État, les peines sont portées à cinq ans d'emprisonnement et à 75.000 euros d'amende. »

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-René Lecerf

Cet amendement tend à soumettre tous les personnels des entreprises de transport à une circonstance aggravante en cas d'usage de stupéfiants dans l'exercice de leurs fonctions, que leur entreprise remplisse ou non une mission de service public et que le transport concerne des marchandises ou des voyageurs.

Le chauffeur d'un autocar de tourisme doit en effet, selon nous, être soumis aux mêmes obligations qu'un conducteur de bus en ville.

L'amendement précise, en outre, que cette circonstance aggravante ne concerne que les personnels des entreprises de transport exerçant des fonctions mettant en cause la sécurité du transport.

Il supprime enfin les dispositions relatives aux peines complémentaires encourues en cas d'usage aggravé, celles-ci étant revues et regroupées au II de l'article L. 3421-6 du code de la santé publique par un amendement ultérieur. Pour ce qui est de l'usage simple, il est prévu un stage de sensibilisation aux dangers de l'usage des produits stupéfiants.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

L'amendement n° 94, présenté par M. About, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

Dans le deuxième alinéa du texte proposé par le 1° de cet article pour compléter l'article L. 3421-1 du code de la santé publique, remplacer les mots :

terrestres, maritimes ou aériens

par les mots :

terrestre, maritime ou aérien

La parole est à M. le rapporteur pour avis.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

L'amendement n° 41, présenté par M. Lecerf, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :

I. Remplacer les quatre premiers alinéas du 2° de cet article par un alinéa ainsi rédigé :

2° L'article L. 3421-4 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

II. Compléter cet article par un paragraphe II ainsi rédigé :

II. - Le code pénal est ainsi modifié :

1° L'article 227-18 est ainsi rédigé :

« Art. L. 227-18 - Les provocations directes à faire un usage illicite de stupéfiants dirigées vers un mineur ou commises dans des établissements d'enseignement ou d'éducation ou dans les locaux de l'administration, et aux abords de ceux-ci, sont punies de sept ans d'emprisonnement et de 150.000 euros d'amende.

« Les personnes coupables de ce délit encourent également la peine complémentaire d'obligation d'accomplir un stage de sensibilisation aux dangers de l'usage des produits stupéfiants, selon les modalités fixées à l'article 131-35-1. »

2° L'article 227-18-1 est ainsi rédigé :

« Art. L. 227-18-1 - Les provocations directes à transporter, détenir, offrir ou céder des stupéfiants dirigées vers un mineur ou commises dans des établissements d'enseignement ou d'éducation ou dans les locaux de l'administration, et aux abords de ceux-ci, sont punies de dix ans d'emprisonnement et de 300.000 euros d'amende.

« Les personnes coupables de ce délit encourent également la peine complémentaire d'obligation d'accomplir un stage de sensibilisation aux dangers de l'usage des produits stupéfiants, selon les modalités fixées à l'article 131-35-1. »

III. En conséquence, faire précéder le début de cet article de la mention :

I.-

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-René Lecerf

Cet amendement tend à clarifier les peines applicables aux provocations à l'usage ou au trafic de stupéfiants dirigées vers des mineurs ou commises dans des établissements scolaires, des administrations ou aux abords de ceux-ci.

En effet, le projet de loi vise à modifier l'article L. 3421-4 du code de la santé publique, qui réprime les provocations dirigées vers un majeur de cinq ans d'emprisonnement et de 75 000 euros d'amende. Il porte ces peines à dix ans d'emprisonnement et à 100 000 euros d'amende lorsqu'elles sont dirigées vers un mineur ou commises dans un établissement scolaire, une administration ou leurs abords. Il prévoit, en outre, une peine complémentaire d'obligation de suivre un stage de sensibilisation aux dangers de l'usage des stupéfiants.

Or, le code pénal réprime déjà de tels comportements. Ainsi, à l'article 227-18, il est prévu cinq ans d'emprisonnement et 100 000 euros d'amende pour un mineur de plus de quinze ans ; sept ans d'emprisonnement et 150 000 euros d'amende pour un mineur de moins de quinze ans ou aux abords d'une école, s'agissant de la provocation à l'usage.

Quant à l'article 227-18-1, il prévoit sept ans d'emprisonnement et 150 000 euros d'amende pour un mineur de plus de quinze ans, dix ans d'emprisonnement et 300 000 euros d'amende pour un mineur de moins de quinze ans ou aux abords d'une école, s'agissant de la provocation au trafic.

Ces dispositions ne sont pas abrogées par le projet de loi qui, de plus, abaisse paradoxalement le niveau de l'amende dans certains cas. Il supprime, en outre, les distinctions entre les mineurs de plus et de moins de quinze ans, et prévoit un quantum d'emprisonnement identique, qu'il s'agisse de provocations à l'usage ou au trafic.

Cet amendement tend donc à supprimer la modification proposée de l'article L. 3421-4 du code de la santé publique, tout en ajoutant la peine complémentaire de stage de sensibilisation aux dangers de l'usage des produits stupéfiants. Il précise que la circonstance aggravante concerne également les provocations commises dans ou aux abords des administrations, aux articles 227-18 et 227-18-1 du code pénal. Enfin, la suppression de la distinction entre les mineurs de plus ou moins de 15 ans est maintenue, ce qui devrait permettre de gagner en lisibilité en retenant les quanta de peine les plus sévères.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

L'amendement n° 95, présenté par M. About, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

Dans le texte proposé par le a) du 2° de cet article pour insérer un alinéa après le premier alinéa de l'article L. 3421-4 du code de la santé publique, supprimer les mots :

lors des entrées ou des sorties

La parole est à M. le rapporteur pour avis.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

L'amendement de la commission des lois répondant à mes préoccupations, je considère que l'amendement n° 95 est défendu.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

L'amendement n° 178, présenté par M. Retailleau, est ainsi libellé :

Compléter le texte proposé par le b du 2° de cet article pour compléter l'article L. 3421-4 du code de la santé publique par un alinéa ainsi rédigé :

« Le fait pour une association de commettre une provocation prévue au premier alinéa, est puni d'une amende de 75 000 euros et, le cas échéant, du remboursement des subventions accordées par l'Etat. »

Cet amendement n'est pas soutenu.

L'amendement n° 43, présenté par M. Lecerf, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :

I. Dans le premier alinéa du texte proposé par le 3° de cet article pour l'article L. 3421-5 du code de la santé publique, supprimer les mots :

public de voyageurs,

II. Supprimer la seconde phrase de l'antépénultième alinéa du même texte.

III. Compléter le même texte par un alinéa ainsi rédigé :

« Un décret en Conseil d'État précise les modalités de vérification prévues au présent article. »

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-René Lecerf

Cet amendement tend à préciser, par coordination, que les contrôles peuvent avoir lieu dans toutes les entreprises de transport, qu'il s'agisse ou non de voyageurs, et à prévoir un décret en Conseil d'État pour préciser les modalités de vérification au moyen d'analyses et d'examens médicaux, cliniques et biologiques.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

L'amendement n° 96, présenté par M. About, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

Rédiger comme suit la deuxième phrase du cinquième alinéa du texte proposé par le 3° de cet article pour l'article L. 3421-5 du code de la santé publique :

Les modalités de conservation des échantillons prélevés sont définies par décret.

La parole est à M. le rapporteur pour avis.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

Cet amendement vise à renvoyer au règlement les modalités de conservation des échantillons d'analyses et d'examens médicaux de dépistage de drogues. Nous répondons à la même préoccupation que la commission des lois.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

L'amendement n° 44, présenté par M. Lecerf, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :

I. Supprimer le II du texte proposé par le 3° de cet article pour l'article L. 3421-6 du code de la santé publique.

II. Après le texte proposé par cet article pour l'article L. 3421-6, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :

« Art. L. 3421-7. - Les personnes physiques coupables des délits prévus au second alinéa de l'article L. 3421-1 et à l'article L. 3421-6 encourent également les peines complémentaires suivantes :

« 1° La suspension pour une durée de trois ans ou plus du permis de conduire ; cette suspension ne peut pas être limitée à la conduite en dehors de l'activité professionnelle ; elle ne peut être assortie du sursis, même partiellement ;

« 2° L'annulation du permis de conduire avec interdiction de solliciter la délivrance d'un nouveau permis pendant trois ans au plus ;

« 3° La peine de travail d'intérêt général selon les modalités prévues à l'article 131-8 du code pénal et selon les conditions prévues aux articles 131-22 à 131-24 du même code ;

« 4° La peine de jour-amende dans les conditions fixées aux articles 131-5 et 131-25 du code pénal ;

« 5° L'interdiction, soit définitive, soit pour une durée de cinq ans au plus, d'exercer une profession ayant trait au transport ;

« 6° L'interdiction de conduire certains véhicules terrestres à moteur, y compris ceux pour la conduite desquels le permis de conduire n'est pas exigé, pour une durée de cinq ans au plus ;

« 7° L'obligation d'accomplir, à ses frais, un stage de sensibilisation à la sécurité routière ;

« 8° L'obligation d'accomplir, à ses frais, un stage de sensibilisation aux dangers de l'usage des produits stupéfiants.

III. En conséquence, dans le onzième alinéa () de cet article, remplacer le mot :

deux

par le mot :

trois

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-René Lecerf

Cet amendement tend à clarifier les peines complémentaires pouvant être prononcées en cas d'usage de stupéfiants aggravé ou de refus de se soumettre à des épreuves de dépistage.

Elles s'appliquent, contrairement à ce que prévoit le projet de loi, aux deux délits. La possibilité de prononcer des permis blancs est supprimée, ce qui est d'ailleurs déjà le cas actuellement. Cette interdiction doit être maintenue a fortiori lorsque l'infraction a été commise dans un cadre professionnel. L'interdiction d'exercer une profession liée au transport de voyageurs est étendue au transport de marchandises ; elle peut être soit définitive, soit temporaire.

Deux nouvelles peines complémentaires sont introduites par coordination avec les dispositions relatives à la conduite après usage de stupéfiants : l'interdiction de conduire certains véhicules terrestres à moteur et l'obligation d'accomplir un stage de sensibilisation à la sécurité routière.

Enfin, il est précisé que le stage de sensibilisation aux dangers de l'usage des produits stupéfiants est obligatoirement mis à la charge du condamné.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

L'amendement n° 97, présenté par M. About, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

Dans le deuxième alinéa () du II du texte proposé par le 3° de cet article pour l'article L. 3421-6 du code de la santé publique, remplacer les mots :

peut être limitée

par les mots :

ne peut pas être limitée

La parole est à M. le rapporteur pour avis.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

Cet amendement vise à préciser que la suspension du permis de conduire pour usage de stupéfiant ne peut pas être limitée à la conduite en dehors de l'activité professionnelle, comme le texte l'indique à ce stade.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

L'amendement n° 42, présenté par M. Lecerf, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :

I.- Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

II.- Le code de la route est ainsi modifié :

1° Le II de l'article L. 235-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« 7° L'obligation d'accomplir, à ses frais, un stage de sensibilisation aux dangers de l'usage des produits stupéfiants. »

2° Le II de l'article L. 235-3 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« 7° L'obligation d'accomplir, à ses frais, un stage de sensibilisation aux dangers de l'usage des produits stupéfiants. »

II.- En conséquence, faire précéder le début de cet article de la mention :

I.-

La parole est à M. le rapporteur, pour présenter cet amendement et pour donner l'avis de la commission sur les amendements qui n'émanent pas d'elle.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-René Lecerf

Il s'agit d'un amendement de coordination, qui tend à introduire comme nouvelle peine complémentaire l'obligation d'accomplir un stage de sensibilisation aux dangers de l'usage des produits stupéfiants pour tout conducteur ayant fait usage de stupéfiants ou ayant refusé de se soumettre à des épreuves de dépistage.

La commission est défavorable aux amendements de suppression n°s 218 et 274. Elle estime que les personnes dépositaires de l'autorité publique doivent être exemplaires. Il paraît assez naturel que la protection particulière dont elles bénéficient, par exemple en cas d'outrage et de violence, soit assortie d'une contrepartie.

S'agissant de l'amendement n° 166, déposé par nos collègues Verts, la commission respecte totalement les convictions de ses auteurs, qui proposent la dépénalisation de la consommation de drogue. Toutefois, la majorité de la commission ne les partageant pas, elle a émis un avis défavorable.

J'en arrive à l'amendement n° 94. Je suggère à M. le président About de bien vouloir le transformer en un sous-amendement à l'amendement n° 40.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Monsieur le rapporteur pour avis, acceptez-vous la suggestion de M. le rapporteur ?

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Je suis donc saisi d'un sous-amendement n° 94 rectifié, présenté par M. About, au nom de la commission des affaires sociales, et ainsi libellé :

Dans le deuxième alinéa du texte proposé par l'amendement n° 40 pour compléter l'article L. 3421-1 du code de la santé publique, remplacer les mots :

transports terrestres, maritimes, aériens

par les mots :

transport terrestre, maritime ou aérien

Veuillez poursuivre, monsieur le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-René Lecerf

La commission est favorable au sous-amendement n° 94 rectifié.

Elle considère que les amendements n°s 95, 96 et 97 sont satisfaits par les amendements de la commission des lois.

Debut de section - Permalien
Brice Hortefeux, ministre délégué

Je profite de cette occasion pour rappeler le sens de l'article 28.

Il prévoit, d'abord, l'aggravation des peines en cas d'usage de stupéfiants par un agent public ou par un agent d'une entreprise de transport de voyageurs.

Il vise, ensuite, la création d'une nouvelle peine, sous la forme d'un stage de sensibilisation aux dangers de la drogue.

Il tend, en outre, à aggraver la peine en cas de provocation à usage de drogue si le délit est commis contre un mineur ou dans un établissement administratif ou éducatif, ou près d'un établissement lors des entrées ou sorties.

Enfin, il prévoit la possibilité de procéder à des contrôles dans les locaux des entreprises de transport de voyageurs pour vérifier s'il y est fait usage de stupéfiants.

Si certaines de ces dispositions peuvent être améliorées, elles répondent, le Gouvernement en est convaincu, à des besoins incontestables.

S'agissant des transports, j'indique à la Haute Assemblée qu'une étude de l'Observatoire français des drogues et des toxicomanies de 2005 montre très clairement l'influence de la consommation de stupéfiants dans les accidents de la circulation, puisqu'il apparaît que 8 % des conducteurs responsables d'un accident mortel sont positifs au cannabis.

Le projet de loi est donc parfaitement cohérent avec le fait qu'il existe désormais, dans le code de la route, une infraction pour conduite sous l'emprise de produits stupéfiants et avec les articles du code pénal qui prévoient une aggravation des peines pour un conducteur coupable d'homicide ou blessures involontaires lorsqu'il a fait usage de stupéfiants.

Dans ces conditions, je suis défavorable aux amendements de suppression n°s 218 et 274 parce qu'ils refusent par principe toute évolution ou amélioration de notre dispositif législatif.

Je suis encore plus défavorable à l'amendement n° 166, qui réécrit l'article afin d'abroger les dispositions du code de la santé publique réprimant l'usage de stupéfiants.

Je le dis très clairement devant la Haute Assemblée, proposer la dépénalisation totale de l'usage de stupéfiants, c'est à la fois irresponsable et dangereux. Beaucoup ayant déjà été dit à l'occasion de ce débat, je ne reviendrai pas sur la politique du Gouvernement en la matière, sinon pour vous confirmer son opposition totale à cet amendement.

J'en viens à l'amendement n° 40, dont l'objectif est de permettre que la peine de sensibilisation s'applique à l'usage de stupéfiants non aggravé, tout en durcissant la répression en cas d'usage de stupéfiants par les agents des entreprises de transport de marchandises. Le Gouvernement y est favorable, car il améliore son texte.

De même, il est favorable au sous-amendement n° 94 rectifié.

S'agissant de l'amendement n° 41, le Gouvernement n'est pas opposé par principe à la proposition de la commission qui tend à ce que l'aggravation de la répression de la provocation à l'usage de stupéfiants soit prévue dans le code pénal, et non pas seulement dans le code de la santé publique, même si, à l'évidence, cela peut soulever certains problèmes qui pourront être résolus à l'occasion de la navette.

Cet amendement ne reprend pas la limitation prévue par le projet, qui existe déjà dans le code pénal et selon laquelle l'aggravation découlant de la commission des faits aux abords d'un établissement éducatif ou administratif ne joue que si les faits sont commis lors des entrées ou des sorties. Je l'ai rappelé en préambule.

Cette condition de temps, qui complète concrètement la condition de lieu, a été introduite lors des travaux préparatoires au Conseil d'État, sur la base d'une remarque qui dépasse le simple bon sens : il s'agit d'une question de nature constitutionnelle au regard du principe de légalité et de nécessité des peines.

Chacun comprend, en effet, qu'il n'y a aucune raison d'aggraver les peines encourues pour des faits commis, par exemple la nuit ou le week-end, à proximité d'une préfecture ou d'une école dont les locaux sont fermés. Chacun comprend aussi que l'aggravation ne doit pas jouer qu'entre huit heures moins cinq et huit heures cinq, midi et midi quinze, etc.

Il doit y avoir aggravation dès lors que la provocation intervient pendant les horaires auxquels l'établissement est ouvert et fonctionne, donc pendant les plages horaires où il y a à ses abords des allées et venues, remarque qui, là encore, me paraît relever du bon sens.

Le Gouvernement est donc favorable à l'amendement n° 41, sous réserve de l'adjonction, dans les textes proposés pour les articles L. 227-18 et L. 227-18-1 du code pénal, des mots : « lors des horaires d'ouverture » après les mots : « aux abords de ceux-ci ».

L'amendement n° 95 étant satisfait, le Gouvernement en demande le retrait.

L'amendement n° 43 vise à étendre les vérifications pouvant être effectuées dans les entreprises de transport sur réquisition du procureur de la République aux entreprises de transport de marchandises et non plus seulement de voyageurs.

Le Gouvernement considère, monsieur le rapporteur, que cette extension serait sans doute un peu excessive au regard de l'objectif, raison pour laquelle il souhaiterait le retrait de cet amendement.

En revanche, il est favorable à l'amendement n° 96, qui prévoit qu'un décret précisera les modalités de conservation des échantillons recueillis lors de ces vérifications.

L'amendement n° 44, qui apporte une clarification quant aux peines complémentaires encourues par les personnes qui commettent l'infraction d'usage de produits stupéfiants avec circonstances aggravantes et celles qui assurent des activités de transport, complète de manière très judicieuse le texte : le Gouvernement y est favorable.

L'amendement n° 97, quant à lui, est satisfait par l'amendement n° 44.

Enfin, l'amendement n° 42 introduit dans le code de la route une peine complémentaire pour les conducteurs ayant fait usage de produits stupéfiants, qui devront accomplir un stage de sensibilisation. Le Gouvernement y est naturellement favorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Monsieur le rapporteur, acceptez-vous de modifier l'amendement n° 41 dans le sens souhaité par M. le ministre et de retirer l'amendement n° 43 ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-René Lecerf

Je suis tout à fait d'accord pour rectifier l'amendement n° 41 en y ajoutant, par deux fois, les mots : « lors des horaires d'ouverture », entendus au sens des horaires de fonctionnement.

Quant à l'amendement n° 43, il portait sur deux points ; le second reste valable, mais, puisqu'il est repris par un amendement de la commission des affaires sociales, c'est bien volontiers que je me rends à la demande de retrait du Gouvernement.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Je suis donc saisi d'un amendement n° 41 rectifié, présenté par M. Lecerf, au nom de la commission des lois, qui est ainsi libellé :

I. Remplacer les quatre premiers alinéas du 2° de cet article par un alinéa ainsi rédigé :

2° L'article L. 3421-4 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

II. Compléter cet article par un paragraphe II ainsi rédigé :

II. - Le code pénal est ainsi modifié :

1° L'article 227-18 est ainsi rédigé :

« Art. L. 227-18 - Les provocations directes à faire un usage illicite de stupéfiants dirigées vers un mineur ou commises dans des établissements d'enseignement ou d'éducation ou dans les locaux de l'administration, et aux abords de ceux-ci lors des horaires d'ouverture, sont punies de sept ans d'emprisonnement et de 150.000 euros d'amende.

« Les personnes coupables de ce délit encourent également la peine complémentaire d'obligation d'accomplir un stage de sensibilisation aux dangers de l'usage des produits stupéfiants, selon les modalités fixées à l'article 131-35-1. »

2° L'article 227-18-1 est ainsi rédigé :

« Art. L. 227-18-1 - Les provocations directes à transporter, détenir, offrir ou céder des stupéfiants dirigées vers un mineur ou commises dans des établissements d'enseignement ou d'éducation ou dans les locaux de l'administration, et aux abords de ceux-ci lors des horaires d'ouverture, sont punies de dix ans d'emprisonnement et de 300.000 euros d'amende.

« Les personnes coupables de ce délit encourent également la peine complémentaire d'obligation d'accomplir un stage de sensibilisation aux dangers de l'usage des produits stupéfiants, selon les modalités fixées à l'article 131-35-1. »

III. En conséquence, faire précéder le début de cet article de la mention :

I.-

Par ailleurs, l'amendement n° 43 est retiré.

Je mets aux voix les amendements identiques n° 218 et 274.

Les amendements ne sont pas adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote sur l'amendement n° 166.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

M. le rapporteur a signalé de façon courtoise qu'il était opposé à la dépénalisation de l'usage des drogues, en particulier du cannabis, et, par conséquent, défavorable à cet amendement déposé par les sénatrices et le sénateur Verts.

En revanche, M. le ministre a répété par trois fois qu'il était contre, vraiment contre. Pourquoi une telle insistance si ce n'est pour démontrer qu'il est très moral sur cette question ?

Toutefois, monsieur le ministre, vous n'avez pas apporté de réponses sur l'argent sale, la corruption, la délinquance internationale, bref, sur tous les problèmes soulevés par le trafic de stupéfiants du fait de leur interdiction et dont il faudra bien un jour que l'on discute.

En attendant, on sait quelle formidable activité déploie le ministre de l'intérieur - qui trouve encore le temps de se déplacer aux Etats-Unis - et président de l'UMP...

Parmi les nouveaux amis politiques de ce dernier, il y a le rappeur Doc Gynéco, qui, dans une de ses chansons les plus populaires, répète ce refrain :

« J'aime la rouler, la feuille à rouler

« J'aime la fumer... »

Tout le monde aura compris ce qu'il voulait dire...

Il y aussi un autre chanteur, Johnny Hallyday, passé de la Chiraquie à la Sarkozie, qui confessait dans Le Monde du 7 janvier 1998 son usage de drogues, en particulier de cocaïne. Johnny récidivait récemment puisque, dans L'Express du 22 décembre 2005, il ajoutait : pour savourer l'écoute de l'opéra Carmina Burana, « je me cale dans mon fauteuil, je ferme les yeux et j'allume un joint ».

Vous pouvez être moral, monsieur le ministre, mais n'en faites pas trop quand même alors que vous avez des amis qui prônent la politique contraire !

L'amendement n'est pas adopté.

Le sous-amendement est adopté.

L'amendement est adopté.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

En conséquence, l'amendement n° 95 n'a plus d'objet.

Je mets aux voix l'amendement n° 96.

L'amendement est adopté.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

En conséquence, l'amendement n° 97 n'a plus d'objet.

Je mets aux voix l'amendement n° 42.

L'amendement est adopté.

L'article 28 est adopté.

I. - Le code de la santé publique est modifié comme suit :

1° Les chapitres III et IV du titre II du livre IV de la troisième partie de ce code sont remplacés par les dispositions suivantes :

« CHAPITRE III

« INJONCTION THÉRAPEUTIQUE PAR LE PROCUREUR DE LA RÉPUBLIQUE

« Art. L. 3423-1. - Le procureur de la République peut enjoindre à la personne ayant fait un usage illicite de stupéfiants de se soumettre à une mesure d'injonction thérapeutique prenant la forme d'une mesure de soins ou de surveillance médicale dans des conditions prévues par les articles L. 3413-1 à L. 3413-3.

« L'intéressé doit donner son accord écrit. S'il est mineur, cet accord est recueilli en présence de ses représentants légaux, ou ceux-ci dûment convoqués. La mesure prend effet à compter de sa notification à l'intéressé par le procureur de la République et sa durée est de six mois, renouvelable une fois selon les mêmes modalités.

« L'action publique n'est pas exercée à l'encontre des personnes qui se soumettent à la mesure d'injonction thérapeutique qui leur est ordonnée et la suivent jusqu'à son terme.

« De même, l'action publique n'est pas exercée à l'égard des personnes ayant fait un usage illicite de stupéfiants, lorsqu'il est établi qu'elles se sont soumises, depuis les faits qui leur sont reprochés, à une mesure de soins ou à une surveillance médicale adaptés, dans les conditions prévues par les chapitres II et IV du titre Ier du présent livre.

« Art. L. 3423-2. - Dans tous les cas prévus à l'article L. 3423-1, lorsque la conservation des plantes et substances saisies n'apparaît pas nécessaire, il est procédé à leur destruction par un officier de police judiciaire, sur la réquisition du procureur de la République.

« CHAPITRE IV

« INJONCTION THÉRAPEUTIQUE PAR LE JUGE D'INSTRUCTION ET LE JUGE DES ENFANTS

« Art. L. 3424-1. - Les personnes mises en examen pour les délits prévus par les articles L. 3421-1 et L. 3425-2 peuvent se voir notifier, par ordonnance du juge d'instruction ou du juge des enfants, une mesure d'injonction thérapeutique selon les modalités définies aux articles L. 3413-1 à L. 3413-3.

« L'exécution de cette ordonnance se poursuit, s'il y a lieu, après la clôture de l'information, les règles fixées par l'article 148-1 (deuxième à quatrième alinéas) du code de procédure pénale étant, le cas échéant, applicables.

« CHAPITRE V

« INJONCTION THÉRAPEUTIQUE PAR LA JURIDICTION DE JUGEMENT

« Art. L. 3425-1. - La juridiction de jugement peut, à titre de peine complémentaire, astreindre les personnes ayant commis le délit prévu par l'article L. 3421-1 à se soumettre à une mesure d'injonction thérapeutique, selon les modalités définies aux articles L. 3413-1 à L. 3413-3. Dans ce cas, l'autorité judiciaire mentionnée aux articles L. 3413-1 à L. 3413-3 est le juge d'application des peines.

« Art. L. 3425-2. - Le fait de se soustraire à l'exécution de la décision ayant ordonné une injonction thérapeutique est puni des peines prévues aux articles L. 3421-1 et L. 3425-1.

« Toutefois, ces sanctions ne sont pas applicables lorsque l'injonction thérapeutique constitue une obligation particulière imposée à une personne qui a été condamnée à une peine d'emprisonnement assortie du sursis avec mise à l'épreuve ou du sursis assorti de l'obligation d'accomplir un travail d'intérêt général. » ;

2° L'article L. 3842-2 est abrogé.

II. - Au 3° de l'article 132-45 du code pénal sont ajoutées les dispositions suivantes :

« Cette mesure peut consister en l'injonction thérapeutique prévue par les articles L. 3413-1 à L. 3413-4 du code de la santé publique, lorsque les circonstances de fait ou de droit font apparaître que le condamné fait usage de stupéfiants ou fait une consommation habituelle et excessive de boissons alcooliques ; ».

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Je suis saisi de six amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

Les deux premiers sont identiques.

L'amendement n° 219 est présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.

L'amendement n° 275 est présenté par MM. Godefroy et Peyronnet, Mme Campion, MM. Cazeau et Domeizel, Mmes Demontès et Jarraud-Vergnolle, M. Michel, Mme Schillinger, MM. Badinter, Collombat, Dreyfus-Schmidt, C. Gautier, Mahéas, Sueur, Guérini, Lagauche, Madec, Mélenchon, Mermaz et Ries, Mmes Tasca, Boumediene-Thiery et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat, pour présenter l'amendement n° 219.

Debut de section - PermalienPhoto de Josiane Mathon-Poinat

Introduire la nécessité d'un accord écrit en cas d'injonction thérapeutique relève presque de la farce.

Le cadre dans lequel l'injonction thérapeutique est mise en place ne laisse en effet que peu de choix pour la personne ayant fait un usage illicite de stupéfiants, et je ne vois d'ailleurs pas comment celle-ci pourrait s'opposer à la mesure qui lui sera prescrite !

Cet accord écrit apparaît comme une forme de paternalisme ou de mise sous tutelle insidieuse des personnes, ce qui nous semble parfaitement malvenu.

De plus, dans cet article, l'injonction thérapeutique peut s'adresser à un mineur. Cette uniformisation des procédures est, une fois encore, le moyen de détruire l'ordonnance de 1945 sur la délinquance des mineurs.

Cet alignement du traitement des mineurs toxicomanes sur les majeurs met une fois de plus en cause la spécificité de la justice des mineurs.

Cette mesure est d'autant plus injustifiée que la prise en charge des mineurs ayant fait un usage illicite de stupéfiants existe déjà puisqu'ils peuvent être placés dans un établissement médical ou médico-pédagogique adapté.

Enfin, dernier point d'ailleurs retenu par la commission des lois, nous nous opposons à l'introduction d'une limitation de la durée de l'injonction thérapeutique à six mois renouvelable.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

La parole est à M. Jean-Pierre Michel, pour présenter l'amendement n° 275.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Michel

Nous demandons également la suppression de cet article, qui relève d'une approche répressive et qui, comme l'article 27, tend à l'élargissement de la définition de l'injonction thérapeutique, dont il modifie totalement le contenu.

Désormais, l'alternative thérapeutique consistera non plus à suivre une cure de désintoxication ou à se placer sous surveillance médicale, mais à se soumettre à une mesure de soins ou de surveillance médicale, ce qui est bien différent.

Par ailleurs, l'article 29 accroît encore les difficultés qui existent aujourd'hui entre l'autorité judiciaire et les autorités sanitaires, donc le conflit entre le répressif et le sanitaire.

L'autorité médicale devra justifier ses diagnostics et ses décisions auprès de l'autorité judiciaire. Les médecins comme tous les soignants qui exercent dans ce domaine sont révoltés par cette orientation qui aura pour effet de leur faire perdre la confiance des toxicomanes qui viennent se soigner chez eux, soit volontairement, soit à la suite d'une injonction prononcée par l'autorité judiciaire.

Comme je le disais tout à l'heure, il apparaît clairement que, si l'on veut réformer la loi de 1970, c'est l'ensemble des aspects répressifs mais aussi des aspects sanitaires et sociaux liés à l'usage des drogues qui doivent être pris en compte, et non la seule question qui est ici posée, à savoir celle du sevrage.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

L'amendement n° 47 rectifié bis, présenté par M. Lecerf, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :

Supprimer le deuxième alinéa du texte proposé par le 1° du I de cet article pour l'article L. 342-1 du code de la santé publique.

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-René Lecerf

Cet amendement a deux objets.

D'une part, il tend à supprimer la limitation de l'injonction thérapeutique à une durée de six mois renouvelable une fois introduite par le projet de loi, limitation qui nous paraît dépourvue de fondement s'agissant d'un traitement médical au cours duquel les rechutes sont courantes.

D'autre part, il vise à supprimer l'exigence d'un accord du bénéficiaire de l'injonction thérapeutique, l'accord de l'intéressé n'étant actuellement pas requis et ne l'étant normalement pas s'agissant d'une alternative aux poursuites.

J'ajoute que, parmi les médecins que nous avons entendus, plusieurs ont fait valoir que l'injonction thérapeutique permettait parfois de transformer l'attitude du malade et de l'amener à l'adhésion.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

L'amendement n° 98, présenté par M. About, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

Rédiger comme suit le deuxième alinéa du texte proposé par le 1° du I de cet article pour l'article L. 3423-1 du code de la santé publique :

« L'intéressé doit donner son accord écrit. Lorsqu'il est mineur, son avis favorable et l'accord écrit de ses représentants légaux sont requis.

La parole est à M. le rapporteur pour avis.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

La position de la commission des affaires sociales sera, bien sûr, très différente selon le sort qui sera réservé à l'amendement n° 47 rectifié bis.

Si l'on s'en tient au texte fourni par le Gouvernement, qui rend nécessaire un accord, il s'agit d'assurer l'efficacité de l'injonction thérapeutique et l'adhésion du toxicomane est requise. Dans l'optique retenue par la commission des lois, l'accord de ce dernier n'est pas nécessaire : l'injonction est une décision prise par le procureur est n'est qu'une alternative aux poursuites.

J'attends donc de connaître la position du Gouvernement pour décider du maintien ou du retrait de l'amendement n° 98, qui précise que, dans le cas d'un mineur, celui-ci ne pouvant consentir, ce sont son adhésion et l'accord de ses représentants légaux qui sont recherchés.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

L'amendement n° 45, présenté par M. Lecerf, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :

Avant le 2° du I de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :

2° A Dans l'article L. 3842-1, les références : « des articles L. 3842-2 et L. 3842-4 » sont remplacées par la référence : « de l'article L. 3842-4 ».

L'amendement n° 46, présenté par M. Lecerf, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :

Dans le second alinéa du II de cet article, remplacer les mots :

Cette mesure peut

par les mots :

Ces mesures peuvent

et les mots :

lorsque les circonstances de fait ou de droit font apparaître

par les mots :

lorsqu'il apparaît

La parole est à M. le rapporteur, pour présenter ces deux amendements et pour donner l'avis de la commission sur les amendements qui n'émanent pas d'elle.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-René Lecerf

L'amendement n° 45 est un amendement de coordination.

Quant à l'amendement n° 46, il est rédactionnel.

La commission est défavorable aux amendements de suppression n° 219 et 275 : contrairement à leurs auteurs, nous estimons que les nouvelles règles en matière d'injonction thérapeutique, notamment la possibilité qu'elle intervienne à tous les stades de la procédure pénale, constituent un progrès notable.

En ce qui concerne l'amendement n° 98, si le premier point est satisfait par l'amendement n° 47 rectifié bis de la commission, le second, comme cela a été dit tout à l'heure, est incompatible.

Debut de section - Permalien
Brice Hortefeux, ministre délégué

L'article 29 constitue, à l'évidence, une disposition essentielle du projet de loi.

En effet, il précise et il améliore les dispositions relatives à l'injonction thérapeutique telles qu'elles figurent dans le code de la santé publique et le code pénal, afin que cette mesure soit plus facilement ordonnée à toutes les phases de la procédure par le parquet, le juge d'instruction, le juge des enfants et la juridiction du jugement.

L'injonction thérapeutique est ainsi étendue aux personnes ayant commis une infraction dans des circonstances qui révèlent une tendance à l'alcoolisme, ce qui, personne ne le contestera, paraît particulièrement opportun.

Compte tenu de l'intérêt et de l'utilité de cette disposition, le Gouvernement est bien évidemment défavorable aux amendements de suppression n° 219 et 275.

J'ajoute, pour être tout à fait complet, que, très honnêtement, je ne comprends pas comment l'on peut s'opposer à l'extension de l'injonction thérapeutique.

S'agissant de l'amendement n° 47 rectifié bis tendant à supprimer, d'une part, la nécessité de l'accord écrit de la personne faisant l'objet de l'injonction thérapeutique et, d'autre part, la présence de ses parents pour un mineur, le Gouvernement y est favorable dans la mesure où ces deux conditions conduiraient soit à un excès de formalisme dont la lourdeur pourrait retarder la mise en oeuvre de la procédure, soit à l'ajout d'une précision inutile, puisque les parents d'un mineur doivent toujours être convoqués, et ce en application des dispositions générales de l'ordonnance de 1945.

Par ailleurs, cet amendement vise également à supprimer la limitation de la durée de l'injonction thérapeutique qui, selon les termes du projet de loi, est de six mois, renouvelable une fois. Or il est évident que les soins peuvent durer plus d'un an ; il faut, en effet, parfois plusieurs années pour qu'un drogué décroche - compte tenu, notamment, des rechutes, ainsi que nous le savons les uns et les autres - et il arrive même que ce soit un échec total, la personne ne pouvant jamais sortir de sa dépendance.

C'est pourquoi il nous paraît souhaitable que l'injonction thérapeutique, ordonnée et contrôlée par l'autorité judiciaire, se poursuive jusqu'à la guérison de l'intéressé. Il appartiendra donc à l'autorité judiciaire de fixer la durée pendant laquelle la personne devra se soumettre à cette injonction thérapeutique en vue d'obtenir l'extinction de l'action publique.

Pour toutes ces raisons, le Gouvernement est favorable à cet amendement.

Pour ce qui est de l'amendement n° 98, le Gouvernement ne peut y être favorable, pour les raisons mêmes que je viens d'exposer concernant l'amendement n° 47 rectifié bis, en ce qu'il prévoit d'exiger un accord écrit, soit de l'intéressé lui-même, soit, si celui-ci est mineur, de ses parents.

J'observe que le fait d'exiger l'accord écrit des parents aurait pour conséquence - au cas où ceux-ci refuseraient l'injonction ou ne se donneraient tout simplement pas la peine de répondre, ce qui peut arriver - de n'offrir d'autre choix au procureur de la République que d'engager des poursuites contre le mineur.

C'est la raison pour laquelle le Gouvernement vous demande, monsieur About, de bien vouloir retirer cet amendement.

Enfin, le Gouvernement est favorable aux amendements n° 45 et 46 qui, en fait, coordonnent ou simplifient le texte du projet.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

Non, monsieur le président, je le retire. De toute façon, il n'aura plus d'objet si l'amendement n° 47 rectifié bis est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

L'amendement n° 98 est retiré.

La parole est à M. François Zocchetto, pour explication de vote sur les amendements identiques n°s 219 et 275.

Debut de section - PermalienPhoto de François Zocchetto

Je ne comprends pas très bien la logique qui sous-tend ces deux amendements dans la mesure où le fait de permettre au procureur de prononcer une mesure d'injonction de soins est, me semble-t-il, bien préférable à l'engagement de poursuites qui, aujourd'hui, est la seule possibilité d'action qui lui est offerte.

Or l'on sait que, le plus souvent, ce dernier n'engage pas de telles poursuites ou que, quand il le fait, il n'est pas suivi par les tribunaux, tant la législation dans cette matière, nous en convenons tous, est inapplicable et inappliquée.

C'est pourquoi j'avoue ne pas comprendre l'objet de ces amendements. En effet, dans mon esprit, la disposition proposée par le Gouvernement va tout à fait dans le bon sens en ce qu'elle permet aux personnes susceptibles de faire l'objet de poursuites de bénéficier de soins.

Les amendements ne sont pas adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

La parole est à M. Jean-Pierre Michel, pour explication de vote sur l'amendement n° 47 rectifié bis.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Michel

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le Gouvernement -c'est magnifique ! - a trouvé plus répressif que lui, à savoir la commission des lois, en particulier son président et son rapporteur !

Pour ma part, je pense que la commission se trompe.

Que l'on étende l'injonction thérapeutique, en donnant la possibilité au procureur d'y avoir recours, passe encore, même si nous avons proposé la suppression de cette disposition, considérant qu'elle ne devait pas figurer dans le présent texte. Mais cette mesure met fin à l'action publique. Par conséquent, l'imposer aux toxicomanes constitue, selon moi, un profond contresens.

En effet, si la personne convaincue de toxicomanie ne souhaite pas se faire soigner, croit-on qu'elle acceptera de se soumettre à l'injonction thérapeutique et au suivi des soins ? Personnellement, je ne le pense pas.

Et puis, si elle ne veut pas se soigner, tant pis pour elle ! Dans ce cas, l'action publique continuera. Je ne vois donc pas pourquoi on ne demanderait pas son accord à l'intéressé.

C'est la raison pour laquelle nous sommes profondément hostiles à l'amendement n° 47 rectifié bis, qui tend à supprimer l'accord de l'intéressé quand lui est proposée une injonction thérapeutique ; cette mesure représente une alternative aux poursuites, en y mettant fin, et lui permet, en outre, de se soigner.

Si cet amendement est adopté, le groupe socialiste reprendra à son compte l'amendement n° 98, que M. le président About a précipitamment retiré.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

Je ne crois pas avoir retiré cet amendement dans la précipitation, mon cher collègue, bien au contraire !

En matière d'injonction thérapeutique, le choix est laissé non pas aux toxicomanes eux-mêmes, mais au procureur qui devra opter pour cette injonction thérapeutique ou pour les poursuites.

Il lui appartiendra donc d'offrir sa chance au toxicomane, et si, dans certains cas, ce dernier n'adhère pas immédiatement à la démarche, petit à petit, comme l'indiquait le président Hyest, il se laissera probablement convaincre par les bienfaits de cette thérapeutique, qui constitue tout de même une alternative bien préférable aux poursuites.

De la même façon, j'ai parfaitement compris ce qu'a dit M. le ministre tout à l'heure, à savoir que le fait d'exiger l'accord des parents ne permettra pas au procureur, dans un certain nombre de cas, d'offrir l'injonction thérapeutique au jeune toxicomane.

Par conséquent, c'est éclairé par la commission des lois et le Gouvernement, ainsi que par les discussions que nous avons eues ensemble, que j'ai retiré l'amendement n° 98, considérant qu'il y allait de l'intérêt des toxicomanes eux-mêmes.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

La parole est à M. François Zocchetto, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de François Zocchetto

Je voudrais simplement rappeler que l'injonction thérapeutique prononcée par le procureur constitue tout simplement une proposition. Dès lors, je ne vois pas pourquoi l'on devrait recueillir l'accord écrit de l'intéressé ! E quand bien même on le recueillerait, rien ne saurait obliger la personne concernée à se soigner.

Par conséquent, le fait de prévoir un accord écrit n'ajoute, selon moi, absolument rien au texte.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Je signale au groupe socialiste qu'il lui est impossible, à ce stade du débat, de reprendre l'amendement n° 98.

Je mets aux voix l'amendement n° 45.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Je mets aux voix l'amendement n° 46.

Je mets aux voix l'article 29, modifié.

L'article 29 est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

La parole est à M. le président de la commission des lois.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

Monsieur le président, pour la clarté des débats, je demande que soit examiné par priorité l'article 38, avant l'article 35.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Quel est l'avis du Gouvernement sur cette demande de priorité ?

Debut de section - Permalien
Brice Hortefeux, ministre délégué

Favorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

La priorité est ordonnée.

La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Monsieur le président, cet après-midi, doit avoir lieu à Matignon, sous la présidence de M. le Premier ministre, une réunion importante consacrée à la prévention de la délinquance, sujet dont débat actuellement le Parlement.

Dès lors, je vous demanderai une suspension de séance.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Le banc du Gouvernement sera, j'en suis persuadé, occupé par le ministre compétent dans les matières dont nous aurons à discuter cet après-midi !

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à douze heures quarante, est reprise à quinze heures.