Il ne faut évidemment pas « dépénaliser » l'usage de stupéfiants, notamment parce que - j'imagine que cet argument fera l'unanimité sur l'ensemble des travées de la Haute Assemblée -, s'agissant d'un délit, il convient de pouvoir recourir à la garde à vue, indispensable aux enquêtes et à la remontée des filières. Cela étant, il faut aussi prendre acte des évolutions et établir des sanctions qui soient adaptées, à tous les stades de la procédure pénale.
C'est la raison pour laquelle le projet de loi prévoit d'étendre la procédure de l'ordonnance pénale au délit d'usage de stupéfiants et d'élargir le registre des peines de substitution.
Le recours à l'ordonnance pénale pour les majeurs pour la sanction de l'usage de drogue aurait l'avantage de rendre plus effectif le dispositif pénal et de permettre un meilleur respect du principe de proportionnalité : le juge pourra proposer des stages de citoyenneté ou des stages de sensibilisation aux dangers de l'usage des produits stupéfiants, comparables aux stages de sécurité routière.
L'orientation sociale, sanitaire et thérapeutique est également une dimension essentielle.
Le projet de loi prévoit d'étendre le champ de l'injonction thérapeutique, mesure que seul pouvait décider jusqu'à présent le procureur de la République. Nous voulons qu'elle puisse être mise en oeuvre à tous les stades de la procédure.
Nous sommes cependant confrontés à une réalité dont on doit mesurer toutes les conséquences, à savoir le faible succès des injonctions thérapeutiques. Leur nombre est passé de 8 000 en 1990 à 4 500 seulement en 2004. La principale explication de cette situation tient sans doute à la réticence des magistrats à recourir à une procédure pour laquelle ils n'ont aujourd'hui aucun « retour », aucune garantie.
C'est à cette difficulté que nous avons voulu remédier en instituant le médecin relais, qui doit être un véritable partenaire de confiance du juge.
Ce médecin relais aura un double rôle, monsieur Fischer.
D'abord, il pourra donner son avis sur l'opportunité médicale de la mesure ; cela permettra, par exemple, de « retourner à l'autorité judiciaire » une personne convaincue d'usage de stupéfiants, mais qui s'avérerait être un dealer.
Ensuite, il proposera les modalités de mise en oeuvre de l'injonction thérapeutique et en contrôlera le suivi sur le plan sanitaire. Il informera régulièrement l'autorité judiciaire et la préviendra sans délai en cas d'interruption du suivi ou de tout autre incident. L'autorité judiciaire qui aura décidé de recourir à la mesure bénéficiera ainsi d'un « retour », ce qui répond très concrètement à une demande des magistrats.
Voilà pourquoi, mesdames, messieurs les sénateurs, le Gouvernement est défavorable aux amendements identiques n° 216 et 270.
L'amendement n° 39 rectifié tend à réorganiser la rédaction de l'article 27 et à la rendre plus lisible, notamment pour ce qui concerne le rôle du médecin relais. Le Gouvernement y est naturellement favorable.
S'agissant du sous-amendement n° 272, vous nous proposez, monsieur Godefroy, de remplacer la notion de « médecin relais » par celle de « coordinateur », en prévoyant que celui-ci relèverait de la DDASS.
Il me semble que deux arguments s'opposent à cette proposition, dont je comprends bien l'origine.
D'abord, il est important que, par son appellation même, le responsable de la mise en oeuvre de l'injonction thérapeutique puisse être clairement identifié comme un médecin, quel que soit d'ailleurs son statut. Il ne doit pas y avoir d'ambiguïté sur ce point.
En outre, je crois que les débats que nous avons eus, à l'article 5, sur le coordonnateur doivent nous inciter à éviter toute confusion entre ces deux dispositifs.
Au travers du sous-amendement n° 93 rectifié, vous posez, monsieur About, la question du maintien de l'enquête sociale.
Cette enquête est-elle utile ? Incontestablement, oui. Est-elle toujours nécessaire ? Sans doute pas, lorsque le médecin dispose de suffisamment d'éléments pour apprécier le contexte familial, professionnel et social dans lequel s'inscrira la mesure d'injonction thérapeutique. Doit-elle être systématique ? Non, car cela risquerait de retarder la mise en place de la mesure.
La solution que vous préconisez est de bon sens, le Gouvernement y est donc favorable.
Enfin, le Gouvernement est défavorable au sous-amendement n° 273, puisque vous entendez, monsieur Michel, rendre l'enquête sociale systématique.