Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, cher Joël Labbé, nous vous proposons aujourd’hui, au cours de cet espace réservé au groupe Écologiste – Solidarité et Territoires, de contribuer à une avancée concrète, qui permettra à la fois de répondre aux urgences quotidiennes des populations les plus précaires et d’assurer la transition écologique.
Ce texte a pour objet, via les autorités organisatrices de la mobilité (AOM), de réemployer les véhicules les moins polluants destinés à être détruits dans le cadre de la prime à la conversion, et ce au bénéfice des populations les plus vulnérables.
Il vise à répondre à un besoin fort, bien identifié dans les territoires. Les réseaux associatifs de la mobilité solidaire, maillon clé de ce dispositif, ont en effet souligné, durant les auditions menées par la commission, toute l’urgence de réemployer ces véhicules face à l’explosion de la précarité.
Cette proposition de loi tend à répondre aux situations d’urgence sociale auxquelles sont confrontées de nombreuses familles précaires, souvent des femmes, qui ont besoin à très court terme d’un véhicule pour se rendre au travail, à un entretien d’embauche, un stage, une formation, ou pour gérer les enfants au quotidien.
Vous l’aurez compris, ces personnes ne bénéficieront pas du leasing social proposé par le Gouvernement. Si cette mesure a toute sa pertinence, elle concernera des ménages qui sont certes modestes, mais qui se trouvent dans une situation suffisamment stable pour s’engager pendant deux à cinq ans auprès d’un loueur conventionnel.
Un tel dispositif ne répond donc pas aux besoins des personnes en situation de fragilité, qui disposent par ailleurs d’un vrai accompagnement social de la part des garages solidaires.
La prime à la conversion, quant à elle, permet certes de changer de véhicule, mais elle ne concerne que les ménages ayant les moyens de régler un reste à charge élevé. Une grande partie de la population, celle qui a les revenus les plus faibles, donc les véhicules les plus anciens – quand ces personnes en ont un –, ne peut pas changer de voiture.
Notre parc automobile compte aujourd’hui 2 millions de véhicules immatriculés avant 2000 ou non classés, et 500 000 à 700 000 véhicules sans contrôle technique. Leurs propriétaires, sans solution, sont contraints de les conserver, ce qui a des conséquences en termes de pollution et accroît les risques d’accident.
De même, le parc de véhicules proposés par les garages solidaires comporte de nombreux Crit’Air 4 ou 5, faute de dons suffisants. Pour ces publics, la prime à la conversion n’a que peu d’effets. L’âge moyen du parc automobile est ainsi passé de neuf ans en 2011 à plus de onze ans en 2023.
Or, grâce à notre proposition de loi, les publics qui circulent dans ces vieux véhicules sont ceux qui, demain, pourraient bénéficier d’un véhicule relevant du Crit’Air 3 à moteur essence issu de la prime à la conversion.
Ce texte est une forme de prime à la conversion dans la prime à la conversion : il permet de rajeunir le parc existant, et ce sans avoir à construire de nouveaux véhicules, donc sans émettre de gaz à effet de serre – on limite ainsi la fameuse énergie grise.
La prolongation des Crit’Air 3 à moteur essence pendant une courte période, en remplacement des Crit’Air 4 et 5, a donc toute sa pertinence pour réduire les atteintes environnementales de notre parc automobile.
De plus, les garde-fous qu’a mentionnés le rapporteur garantissent à la fois la traçabilité des véhicules, un usage du dispositif uniquement orienté vers les publics qui en ont besoin et l’impact environnemental positif de la mesure.
La proposition du Gouvernement de restreindre le périmètre du texte aux véhicules rétrofités semble inopérante.
S’il faut bien sûr développer le rétrofit et l’inclure pleinement dans le dispositif, il faut aussi avoir conscience que les filières ne sont pas opérationnelles rapidement et qu’il faut du temps pour mobiliser les financements nécessaires. Le réemploi des véhicules Crit’Air 3 à moteur essence pour une durée limitée est donc une solution efficace, particulièrement dans les zones rurales.
En outre, nous ne doutons pas que notre proposition sera appréciée par nombre de nos concitoyens bénéficiant de la prime à la conversion : au lieu de voir partir à la casse leur ancien véhicule, ils seront pleinement satisfaits de savoir que celui-ci pourra, quelques années encore, avoir une seconde vie au service de celles et de ceux qui en ont besoin.
Je terminerai en rappelant que le développement des mobilités alternatives est essentiel pour nous. Pour autant, nous nous devons de reconnaître que, à l’heure actuelle, toute une partie de la population est privée de solutions. Ce texte contribuera à répondre aux besoins quotidiens de nos concitoyens les plus vulnérables, de façon solidaire et écologique.