Intervention de Brigitte Devesa

Réunion du 13 décembre 2023 à 21h30
Débat préalable à la réunion du conseil européen des 14 et 15 décembre 2023

Photo de Brigitte DevesaBrigitte Devesa :

Mais ne pourrait-on parler de déni si celui-ci, alors qu’il a été valablement adopté, n’était pas ensuite examiné par le Conseil ?

Nous pensons qu’un débat doit avoir lieu, au regard du vaste champ des thématiques abordées dans cette résolution. Celle-ci a d’ailleurs suscité de nombreuses réactions, portant notamment sur de potentielles atteintes à la souveraineté des États et sur la remise en cause du sacro-saint principe du vote à l’unanimité.

Une réforme des traités apparaît nécessaire dans la perspective du prochain élargissement de l’Union européenne, qui ne fait presque plus de doute. Le nombre de candidats à l’adhésion est en effet en augmentation. À ce jour, huit États sont candidats à l’adhésion : la Turquie, la Macédoine du Nord, le Monténégro, la Serbie, l’Albanie, l’Ukraine, la Moldavie et la Bosnie-Herzégovine.

Nous sommes tous conscients ici que la guerre en Ukraine a bouleversé le fonctionnement de l’Union européenne. L’obtention rapide par l’Ukraine du statut de candidat a soulevé de nombreuses réactions dans les Balkans.

« L’Europe se fera dans les crises et elle sera la somme des solutions apportées à ces crises », disait Jean Monnet. La question de l’élargissement de l’Union devra donc être tranchée rapidement : il faudra décider comment élargir et à quels États.

Sur la forme, si une réforme de nos traités devait intervenir avant un élargissement, celui-ci serait élaboré sur le long terme. En effet, nous le savons tous, le processus de révision des traités – depuis l’initiative de révision jusqu’à la ratification définitive par l’ensemble des États – prend des années ; il sera d’autant plus long en l’occurrence que plusieurs États ont déjà fait part de leur hostilité à toute révision.

Une révision des traités semble néanmoins opportune, et la présidente de la Commission européenne a indiqué y être favorable. Elle entraînerait toutefois un élargissement post-révision d’ici à plus d’un an, a minima, sans garantie de succès.

Nos collègues Jean-François Rapin, président de la commission des affaires européennes, et Gisèle Jourda ont rendu l’année dernière un rapport d’information intitulé Comment donner suite à la Conférence sur l ’ avenir de l ’ Europe ?, dans lequel ils soulignaient qu’il existait dans les traités des formes de souplesse institutionnelle permettant de faire avancer la construction européenne sans passer par la procédure de révision. Il en est ainsi, notamment, de la composition de la Commission européenne.

Il convient de citer également l’article 352 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, aux termes duquel le Conseil peut prendre, à l’unanimité, des mesures visant à atteindre les objectifs des traités.

Quant à l’article 122, il prévoit que l’Union européenne peut prendre des mesures temporaires en cas de crise. Lesdites mesures peuvent être prises à la majorité qualifiée, notamment en matière de fiscalité.

Des amorces de solutions existent donc déjà dans les textes applicables. Si l’élargissement de l’Union devait se faire à brève échéance, s’appuyer sur les dispositifs en vigueur serait une piste à privilégier.

Toujours sur la forme, en matière d’élargissement, les Français seront-ils invités à s’exprimer par le biais d’un référendum, pour valider, ou non, l’élargissement proposé ? La question se pose !

Enfin, sur le fond, à qui l’Union doit-elle s’ouvrir ? L’élargissement doit-il s’effectuer en une seule fois à l’ensemble des pays ayant le statut de candidat et remplissant toutes les conditions fixées, ou se dérouler en plusieurs phases, et, dans ce cas, sur quels critères ?

Les réponses à ces questions nous permettraient de disposer d’une réelle vision tant de l’élargissement de l’Union que des réformes institutionnelles nécessaires. Ces thématiques seront également au cœur des débats des prochaines élections européennes.

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