Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, le projet de loi autorisant l'approbation de l'avenant entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Grand-Duché de Luxembourg au protocole d'accord du 20 mars 2018 relatif au renforcement de la coopération en matière de transports transfrontaliers et à la convention du 23 octobre 2020 relative au financement d'aménagements visant à renforcer la desserte ferroviaire et favoriser les mobilités durables va dans le bon sens, et nous le soutenons à 100 %.
Pour autant, ce texte va-t-il régler les problèmes au quotidien des habitants de notre territoire ? Mettra-t-il fin aux sempiternels bouchons que nous rencontrons sur les différents réseaux de transport ? Tous sont saturés : le réseau ferroviaire, comme le réseau autoroutier ou les réseaux secondaires. C'est l'asphyxie généralisée !
La vie va-t-elle changer dans ce territoire ? On peut en douter. En tout cas, tel a été mon sentiment lorsque j'ai lu l'étude d'impact de ce projet de loi : le nombre de frontaliers passera de 114 000 aujourd'hui à 135 000 en 2030, soit une augmentation de 21 000.
Il est également indiqué que l'objectif est, sur la même période, de multiplier par deux et demi le trafic ferroviaire quotidien, de doubler le covoiturage et de tripler le trafic en cars transfrontaliers. Au total, on aboutit à une augmentation de 22 000 places de transport, pour 21 000 voyageurs transfrontaliers supplémentaires. Certes, tous n'utilisent pas ces modes de déplacement. Mais toutes les voies de circulation sont déjà saturées !
Il faut donc encore faire un effort ! La centaine de millions supplémentaire est bienvenue, mais ce n'est pas suffisant. J'observe par ailleurs que, du côté luxembourgeois, cette somme sera payée en totalité par l'État, tandis que, du côté français, cette somme sera partagée entre l'État et les collectivités territoriales, notamment le conseil régional du Grand Est pour le transport ferroviaire.
Or ces dernières sont toutes déjà à la recherche de financement pour leurs propres projets. En tout cas, toutes, de la plus petite à la plus grande d'entre elles, devront, aux termes du décret tertiaire, faire face à un mur d'investissement pour financer la rénovation énergétique des bâtiments. Une étude récente avance le chiffre de 55 milliards d'euros pour atteindre le premier niveau prévu, soit 40 % de réduction des consommations énergétiques d'ici à 2030. Les collectivités ne pourront pas tout faire !
C'est pourquoi il importe que le Gouvernement parvienne à convaincre le Luxembourg d'être plus généreux. Que diable ! La plupart des équipements réalisés par les collectivités ne sont pas détachables de l'emploi au Luxembourg. De surcroît, cela améliore le respect du « zéro artificialisation nette » (ZAN) côté français. Les collectivités, je le répète, ne pourront pas tout faire. On se leurre si l'on croit que les 100 millions d'euros amélioreront considérablement les choses, même si l'effort va dans le bon sens.
Comme le disait Jules Ferry voilà plus d'un siècle, on n'a pas encore inventé l'art de faire de grandes choses sans argent. L'argent est toujours nécessaire pour mener à bien des projets.
Et même lorsque les projets ne nécessitent pas d'argent, ils n'avancent pas non plus ! Je prendrai un exemple dans l'éducation, même si ce n'est pas votre ministère qui est concerné : le président du conseil départemental de la Moselle travaille d'arrache-pied depuis – tenez-vous bien ! – douze ans pour construire un collège franco-luxembourgeois. Le conseil départemental, qui est maître d'ouvrage, est d'accord. Les Luxembourgeois sont d'accord. Tout le monde est d'accord. Sauf que l'on n'a pas la réponse de l'État. Il suffirait de son accord ; il n'y a même pas besoin d'argent. Et même dans ces conditions, on n'y arrive pas…
Enfin, le statut de l'élu, qui est un sujet d'actualité au Sénat, le deviendra bientôt aussi pour l'exécutif. Nous venons d'adopter un rapport visant à faciliter la vie d'élu, pour permettre l'articulation entre le temps de travail et le temps consacré au mandat.