Intervention de Éliane Assassi

Réunion du 21 septembre 2006 à 15h00
Prévention de la délinquance — Article 43

Photo de Éliane AssassiÉliane Assassi :

L'article 43 crée une nouvelle peine correctionnelle, la « sanction-réparation ».

Cette disposition viendrait « combler une évidente lacune de notre droit pénal et de notre procédure pénale », peut-on lire dans l'exposé des motifs du projet de loi.

Le code pénal prévoit sept peines correctionnelles : l'emprisonnement, l'amende, le jour-amende, le stage de citoyenneté, le travail d'intérêt général, les peines privatives ou restrictives de droits prévues à l'article 131-6 et les peines complémentaires prévues à l'article 131-10.

À quel besoin répond la création d'une huitième peine ? L'objectif serait d'assurer la réparation du dommage, mais l'objectif d'une peine est, justement, d'assurer cette réparation, en plus de sanctionner l'auteur du dommage.

Laissez-moi vous lire la définition que donne du mot« peine » le Petit Robert : « Sanction appliquée à titre de punition ou de réparation pour une action jugée répréhensible. »

Avec sept peines correctionnelles et plus de 12 000 infractions recensées dans le code pénal, comment affirmer aujourd'hui que notre droit pénal et notre procédure pénale comportent encore des lacunes ?

Néanmoins, l'article 43 se situe dans une logique qui n'est pas neutre, celle qui est largement défendue par le ministre de l'intérieur : faire de la victime l'élément central du procès pénal.

Le procès pénal s'articule autour de deux entités : la société, dont l'ordre a été troublé et qui est incarnée par le ministère public, et l'auteur présumé de l'infraction. Les victimes ne sont nullement écartées du procès, contrairement à ce que l'on voudrait nous faire croire, puisqu'elles peuvent se constituer partie civile.

Loin de nous, donc, l'idée d'écarter la réparation du dommage causé à la victime ; tel n'est pas mon propos en l'espèce. En revanche, je crois nécessaire de dénoncer l'utilisation qui est faite, de manière abusive, de la souffrance des victimes, prétexte à toutes les aggravations de peine que nous constatons depuis quatre ans.

La création de cette nouvelle peine correctionnelle est donc purement une mesure d'affichage, destinée à faire croire que le sort des victimes sera enfin pris en compte. C'est faire preuve de défiance vis-à-vis de l'autorité judiciaire, qui se soucie des victimes bien plus que vous ne le donnez à croire.

En revanche, force est de constater que, faute de moyens, la justice rencontre des difficultés pour faire appliquer les peines prononcées. L'exposé des motifs lui-même évoque des difficultés d'ordre juridique ou technique, mais également des difficultés liées à l'insuffisance de postes offerts afin de pouvoir mettre en oeuvre de manière satisfaisante le travail d'intérêt général.

Ne nous trompons donc pas d'objectif : il serait certainement plus utile de donner à la justice les moyens de faire appliquer les peines prononcées plutôt que d'en créer de nouvelles. Tel est le sens de notre amendement de suppression de l'article 43.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion