Intervention de Jean-François Rapin

Commission des affaires européennes — Réunion du 6 décembre 2023 à 13h35
Institutions européennes — Audition de s.e. M. Stephan Steinlein ambassadeur d'allemagne en france

Photo de Jean-François RapinJean-François Rapin :

Mes chers collègues, nous recevons aujourd'hui Son excellence, M. Stephan Steinlein, ambassadeur d'Allemagne en France. Monsieur l'Ambassadeur, à titre liminaire, je souhaite vous présenter nos condoléances, et vous faire part de toute la compassion de notre commission, pour l'assassinat samedi dernier d'un de vos concitoyens, un citoyen européen, sur le sol français, vraisemblablement par un terroriste, selon les premières données de l'enquête.

Monsieur l'Ambassadeur, je vous remercie d'avoir accepté notre invitation. Vous avez été nommé, il y a seulement trois mois à Paris et il nous paraissait important de lier connaissance sans tarder avec vous, qui représentez dans notre pays notre partenaire européen le plus proche. Originaire d'Allemagne de l'Est, vous avez rencontré la France en août 1989, pour y suivre, à l'université de Strasbourg, un troisième cycle de théologie afin de devenir pasteur. Vous avez rapidement bifurqué vers la diplomatie et la politique, aux côtés du président, M. Frank-Walter Steinmeier, dont vous êtes devenu l'homme de confiance. Vous n'ignorez d'ailleurs pas que le Président Steinmeier a récemment rencontré le Président du Sénat, M. Gérard Larcher, lors de son déplacement en Allemagne, il y a dix jours, auquel j'ai moi-même participé. Ils ont pu évoquer ensemble la mobilisation franco-allemande contre la montée de l'antisémitisme depuis le 7 octobre et le « changement d'époque » que vit l'Allemagne depuis l'agression de l'Ukraine (« Epochenbruch » selon le Président fédéral).

L'objectif de votre audition aujourd'hui devant la commission des affaires européennes est de faire le point sur la relation franco-allemande dans une perspective européenne. Cette relation a connu des moments plus critiques. Je me souviens notamment du report, il y a un an, d'un conseil des ministres franco-allemand, manifestation sans équivoque d'une crise de confiance entre la France et l'Allemagne, alors en pleine crispation sur la façon de sortir au mieux l'Union européenne de la crise énergétique. Les motifs de tension restent nombreux. Toutefois, même s'ils peuvent donner le sentiment de faire parfois cavaliers seuls, nos deux États sont condamnés à s'entendre. Cette entente est à la fois le socle et l'avenir de l'Union européenne, et, à cet égard, la prochaine visite d'État du Président de la République, M. Emmanuel Macron, en Allemagne devrait marquer une étape importante.

Je me félicite également que nos ministres des affaires européennes aient mandaté un groupe d'experts franco-allemands pour appréhender ensemble le défi commun que représente la perspective d'élargissement de l'Union européenne et réfléchir aux nécessaires réformes de l'Union européenne qu'un tel élargissement impliquerait si l'on veut maintenir sa capacité d'action, protéger ses valeurs fondamentales, renforcer sa résilience et la rapprocher des citoyens européens. Nous avons récemment auditionné deux de ces experts qui nous ont présenté les fruits très intéressants de leur travail. Nous serions intéressés de savoir comment ce rapport a été reçu de l'autre côté du Rhin.

L'élargissement qui s'annonce à l'Est ramène encore plus l'Allemagne au centre de l'Europe, ce qu'avait manifesté le discours du chancelier, M. Olaf Scholz, à Prague en août 2022. C'est pourquoi nous nous interrogeons sur l'avenir de la relation franco-allemande. Les sujets de friction restent nombreux, notamment en matière de règles de gouvernance budgétaire, dans le nouveau contexte créé par la récente décision de la Cour constitutionnelle allemande, en matière de stratégie commerciale, notamment à cette heure avec le Mercosur, ou encore en matière de réforme du marché de l'électricité, de vision de l'autonomie stratégique dans le domaine économique mais aussi spatial et militaire, d'articulation entre atlantisme et défense européenne, de vision géopolitique mondiale par rapport à l'Ukraine, Israël, la Turquie, l'Afrique..., autant de vastes chantiers.

Sur tous ces sujets, l'Allemagne est-elle, selon vous, disposée à articuler ses intérêts propres avec l'intérêt stratégique supérieur que nos deux pays partagent, à savoir une Europe de la paix et de la liberté ?

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