Intervention de Rima Abdul-Malak

Réunion du 18 décembre 2023 à 16h00
Restitution des restes humains appartenant aux collections publiques — Adoption définitive des conclusions d'une commission mixte paritaire sur une proposition de loi

Rima Abdul-Malak  :

Je tiens aussi à saluer l’implication du député Christophe Marion, qui a permis de parvenir aujourd’hui à un texte équilibré, grâce à un travail de dentelle et de précision.

Le respect de la dignité humaine anime cette loi. Son écriture a été guidée par la connaissance approfondie de différentes situations relatives aux restes humains. La France regarde son histoire en face, entend les demandes des autres peuples et souhaite instaurer avec eux une nouvelle ère, ouvrir de nouveaux échanges culturels en ayant contribué à apaiser les mémoires douloureuses.

Les commissions bilatérales sauront étudier avec rigueur et méthode l’histoire propre à chaque cas de restes humains. De cette expertise à plusieurs voix, tant historiques, ethnologiques, qu’autochtones ou juridiques, naîtra un consensus. Celui-ci pourra être le fondement pour non seulement des restitutions, mais aussi des coopérations scientifiques.

Les amendements adoptés par le Sénat et les modifications opérées par la commission mixte paritaire ont réaffirmé la place centrale du rapport scientifique rédigé par la commission bilatérale et ont renforcé les modalités d’association du Parlement à ces travaux.

Cet écrit concourt à assurer le respect du principe d’inaliénabilité, à garantir la qualité scientifique des démarches, mais aussi à joindre la représentation nationale au processus de restitution. C’est une base prometteuse pour l’avenir, et je vous en remercie très sincèrement.

Restituer les restes humains originaires des territoires ultramarins ne pouvait pas avoir sa place dans un texte visant à cadrer les demandes de restitution d’États étrangers. Mais ce travail sera notre priorité des prochains mois. J’ai en effet annoncé que le Gouvernement lancera début 2024 une mission parlementaire sur le sujet. En lien avec la délégation aux outre-mer de l’Assemblée nationale et la délégation sénatoriale aux outre-mer, il aura notamment pour objectif d’évaluer le corpus des restes ultramarins conservés dans les collections publiques, de consulter les autorités administratives, politiques et coutumières des outre-mer, puis d’identifier le véhicule législatif le plus approprié.

Le Gouvernement tiendra son engagement : d’ici à un an, et je l’espère même avant, nous aurons, avec le ministre Philippe Vigier et les territoires concernés, identifié des solutions pour déroger à l’inaliénabilité des restes humains originaires des territoires ultramarins et pour pouvoir les restituer.

Permettez-moi, pour conclure, de revenir à Virgile avec le chant XI, qui suit les premiers affrontements entre les armées d’Énée et les peuples latins. Des ambassadeurs viennent lui demander la faveur de reprendre les corps des vaincus, afin qu’ils puissent être ensevelis : « Le bon Énée, trouvant leur prière tout à fait recevable, leur réserve un accueil favorable, ajoutant ces paroles : “Latins, quelle fortune indigne vous a donc mêlés à une si grande guerre, au point de fuir notre amitié ? Vous demandez la paix pour des morts, victimes des aléas de Mars ?” En vérité, c’est à des vivants aussi que je voudrais l’accorder ! »

Voilà le sens profond de votre travail, voilà le sens de cette loi : rendre les corps des morts pour rendre la paix aux vivants.

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