Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la loi du 20 juillet 2023 vise à faciliter la mise en œuvre des objectifs de lutte contre l’artificialisation des sols, tout en renforçant l’accompagnement des élus locaux.
Fruit d’un compromis heureux entre le Sénat, l’Assemblée nationale et le Gouvernement, cette loi est la traduction de travaux, longs de plusieurs années, menés au Sénat, notamment par nos collègues Jean-Baptiste Blanc, Christian Redon-Sarrazy et Anne-Catherine Loisier, ou encore par notre ancienne collègue Valérie Létard.
La version finale de cette proposition de loi coconstruite réaffirme les objectifs ambitieux de la stratégie nationale de zéro artificialisation nette d’ici à 2050, tout en donnant plus de souplesse aux collectivités territoriales, et ce sans modifier l’esprit général de la loi Climat et résilience.
Il est vrai que l’application des objectifs du ZAN, fixés en 2021, a suscité des résistances et des interrogations chez les élus de terrain, qui ont déploré des problèmes de délais et une trop grande complexité.
Or, derrière son apparente technicité, la lutte contre l’artificialisation des sols repose sur l’évidence qu’il existe une urgence environnementale, dont la réalité n’échappe désormais plus à personne : ainsi, les effets du dérèglement climatique sur la faune et la flore affectent déjà nos concitoyens au quotidien.
L’artificialisation des sols concerne, en France, entre 6 % à 9 % de la surface des terrains. Cela signifie qu’entre 3 millions et 5 millions d’hectares ont subi une altération durable de leurs fonctions naturelles en raison des activités humaines.
Concrètement, la loi ZAN vise à freiner le rythme d’artificialisation des terres, insoutenable pour l’environnement et, à terme, pour la vie humaine, sans toutefois faire obstacle au développement pragmatique des territoires, principalement ruraux.
Réduire puis arrêter à partir de 2050 l’artificialisation de nos sols est donc une priorité écologique et économique. L’implication des collectivités locales est l’un des facteurs clés de sa réussite.
Il s’agit bel et bien d’une priorité écologique, car le bétonnage et l’étalement urbain, à l’origine de la hausse de la consommation des espaces naturels, agricoles et forestiers, les fameux Enaf, sont l’une des principales menaces pesant sur la biodiversité : ils favorisent l’imperméabilisation des sols, ce qui a des conséquences désastreuses, notamment en cas d’inondation ou de canicule.
Il s’agit également d’une priorité économique, car l’artificialisation brute des terres se fait avant tout au détriment des surfaces agricoles. À terme, celle-ci fait peser un risque sur la souveraineté alimentaire de la France.
C’est donc dans un esprit de responsabilité, et en vertu de la confiance mutuelle qui nous a animés, vous, monsieur le ministre, et nous, parlementaires, qu’un accord a été trouvé en commission mixte paritaire. Celui-ci comporte des avancées notables qui permettent de répondre aux attentes des élus locaux.
Premièrement, il assouplit les règles du ZAN pour certains projets d’aménagement de grande ampleur. Surtout, il crée la garantie rurale ou « surface minimale de développement communal », qui permet à chaque commune couverte par un document d’urbanisme de bénéficier d’un hectare de droit à construire sans être contrainte par les obligations du zéro artificialisation nette.
Deuxièmement, il multiplie les outils mis à la disposition des collectivités locales en vue de favoriser le ZAN. Avant 2031, les communes pourront définir, dans leur plan local d’urbanisme, des zones pour des opérations de renaturation. Elles pourront ainsi préempter des terrains et des espaces urbanisés identifiés comme pouvant faire l’objet d’une désartificialisation.
Troisièmement, il allonge les délais de mise en conformité des documents de planification et d’urbanisme, lesquels peuvent désormais, dans certains cas, courir jusqu’en 2027.
Quatrièmement et enfin, il crée un espace de dialogue territorial au sein des conférences régionales de gouvernance de la politique de réduction de l’artificialisation des sols.
Par ailleurs, comme il s’y était engagé, le Gouvernement a retranscrit plusieurs dispositions adoptées au Sénat en première lecture dans trois nouveaux décrets d’application de la loi ZAN publiés le 27 novembre dernier – ces derniers ont été élaborés en concertation avec l’Association des maires de France et des présidents d’intercommunalité (AMF).
Certes, des ajustements sont souhaitables pour simplifier les choses localement et accompagner les collectivités territoriales, notamment les plus petites d’entre elles, en matière d’ingénierie et de fiscalité.
Toutefois, nous pouvons nous réjouir collectivement des outils concrets que le texte met en place pour les élus : ces derniers seront désormais mieux assistés dans la mise en œuvre des objectifs ZAN, même si des améliorations sont toujours possibles.
À cet égard, je pense spécifiquement aux outre-mer : en effet, si la transition écologique représente un véritable défi pour nous tous, elle l’est tout particulièrement pour les territoires ultramarins, où la problématique du foncier est encore plus prégnante.