Intervention de Jean-Baptiste Blanc

Réunion du 18 janvier 2024 à 14h30
Mise en œuvre des objectifs de lutte contre l'artificialisation des sols et renforcement de l'accompagnement des élus locaux — Débat organisé à la demande du groupe communiste républicain citoyen et écologiste – kanaky

Photo de Jean-Baptiste BlancJean-Baptiste Blanc :

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, permettez-moi de remercier à mon tour Cécile Cukierman d’avoir permis l’inscription de ce débat à l’ordre du jour de notre assemblée. J’en profite également pour saluer l’ensemble de nos collègues qui travaillent sur le ZAN depuis très longtemps et tous ceux qui sont présents cet après-midi.

Monsieur le ministre, nous pensions avoir réglé ensemble le sujet du ZAN mais, apparemment, comme le dit la chanson, « ça s’en va et ça revient »… §Certes, « c’est fait de tout petits riens », mais nous pensions tout de même avoir fait le plus dur.

Je rappelle qu’à l’origine nous avions regretté la démarche descendante dans laquelle s’inscrivait la loi Climat et résilience – du moins s’agissait-il de notre impression. C’est d’ailleurs pourquoi les décrets signés par l’une de vos prédécesseurs, monsieur le ministre, nous avaient tant fâchés !

Heureusement, à votre nomination – sans doute parce que vous êtes un élu local et un maire –, vous les avez suspendus et avez ainsi permis d’engager un dialogue, ce dont le Sénat s’est largement félicité. Nous avons alors, me semble-t-il, su construire ensemble un nouveau texte, celui qui a été voté au mois de juillet dernier ; les décrets d’application ayant été publiés dans la foulée, ses mesures sont progressivement déclinées localement. On les retrouve d’ailleurs dans un guide et dans des fascicules élaborés par votre ministère.

Ce texte vise à faciliter la mise en œuvre de l’objectif ZAN.

Pour l’essentiel, la loi allonge les délais imposés aux territoires, notamment aux régions, leur permettant ainsi d’avoir davantage de temps pour dialoguer avec les services de l’État. Comme nos collègues l’ont rappelé, elle instaure également une nouvelle gouvernance ; elle améliore la définition, ainsi que la façon de comptabiliser les « grands projets » ; elle institue une garantie universelle symbolisée par le « droit à l’hectare » – nous en avons parlé, et c’est d’ailleurs la mesure qui fait le plus gloser ; enfin, elle prévoit de nouveaux outils juridiques : le sursis à statuer, le droit de préemption, etc.

Ce texte comporte certes de nombreux dispositifs mais, depuis quelque temps, au gré des cérémonies de vœux et des polémiques nationales, les inquiétudes qu’il suscitait font leur retour. Aussi faut-il les prendre très au sérieux.

Vous vous en souvenez sans doute, j’ai pu m’en émouvoir lors des questions d’actualité au Gouvernement à propos des conférences des parties (COP) régionales, démarche à laquelle nous ne nous opposons pas – bien au contraire ! Il s’agit en réalité d’un problème de méthode : nous avons l’impression que rien n’est fait pour que cette territorialisation – nous l’appelons de nos vœux depuis le début – soit réellement mise en œuvre.

Par ailleurs, les services du ministère, au travers du guide et des fascicules que j’évoquais, présentent certains éléments comme faisant partie de la réforme, alors qu’ils n’ont pourtant pas pu être votés. Pour le dire trivialement, il y a un risque d’entourloupe !

De nouveau, le ZAN suscite un malaise, une « peur sur la ville », si j’ose dire, qui pourrait mettre en jeu la confiance des élus.

Ce malaise résulte également de la crise de l’immobilier sans précédent que traverse notre pays. Aujourd’hui encore, la presse économique s’est fait l’écho du nombre élevé de faillites d’agences immobilières, lequel a été multiplié par deux en un an. Plusieurs articles universitaires ont fait état de la difficulté de mettre sur le marché 7, 8 millions de logements d’ici à 2050, un besoin pour notre pays dont on entend parler ici et là. Sans compter les artisans qui craignent l’essoufflement du marché de la rénovation.

C’est dans ce contexte que le Sénat s’interroge sur une planification écologique menée à coups de présentations PowerPoint. Celle-ci se fait, ou plutôt devrait davantage se faire avec les élus, et non les exclure.

Ajoutons que la loi de finances instaure un prêt à taux zéro (PTZ) traduisant un certain modèle de société, à savoir la fin programmée du modèle pavillonnaire, du bureau, de la voiture, de la piscine, de l’accès à la propriété, une évolution qui inquiète les élus, et dont le ZAN – débat récurrent – serait le nom.

En toile de fond, la crise démographique s’accentue ; or, en la matière, les 3, 1 millions de logements vacants suffiraient largement à répondre à nos futurs besoins.

Nombre d’élus se sont exprimés publiquement au sujet du ZAN. Je ne reviendrai pas sur les propos de Laurent Wauquiez d’autant que, tribune après tribune, le débat se judiciarise. En revanche, je tiens à citer, sans avoir malheureusement le temps de les exposer plus longuement, les déclarations de M. Rivenq, président de la communauté d’agglomération d’Alès, et de M. Pélieu, président du conseil départemental des Hautes-Pyrénées. Il me semble qu’il faut véritablement s’en soucier.

Le livre blanc du groupe Scet, mentionné par notre collègue Ronan Dantec, rappelle que les élus doivent s’approprier toutes ces règles et que les besoins en ingénierie sont très importants.

La réponse apportée par le Sénat à toutes ces questions, dont le présent débat est le point de départ, nous conduira à lancer une nouvelle mission de suivi, ainsi qu’une réflexion sur le volet financier et fiscal du ZAN, pour évaluer les mesures adoptées et faire en sorte qu’elles soient mieux accueillies.

Les outils juridiques instaurés par la loi, le droit à l’hectare notamment, fonctionnent-ils ? Les modes de financement et la fiscalité sont-ils efficaces ? Nos travaux permettront, j’en suis sûr, d’aboutir à des propositions fortes.

À ce titre, je veux remercier le président Larcher, ainsi que les différents présidents de groupe, d’avoir permis l’organisation d’une telle mission. Du reste, celle-ci devra aussi se pencher sur les enjeux fonciers et environnementaux, en particulier la santé des sols à travers l’hydrologie régénérative.

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