Intervention de Laure Darcos

Réunion du 23 janvier 2024 à 14h30
Accompagnement humain des élèves en situation de handicap — Adoption d'une proposition de loi dans le texte de la commission

Photo de Laure DarcosLaure Darcos :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la décision du Conseil d’État du 20 novembre 2020 a suscité la consternation des parents d’enfants en situation de handicap.

Comment, à l’heure où l’école inclusive est devenue une réalité tangible, peut-on refuser à un enfant handicapé le bénéfice d’un AESH lors de la pause du déjeuner ?

Comment ne pas être indigné d’une telle rupture de l’accompagnement, au seul motif que la pause méridienne n’est pas considérée comme du temps scolaire ?

Dans l’urgence, les familles ont dû s’organiser et, parfois, mettre leur vie professionnelle entre parenthèses.

Les collectivités territoriales ont été placées dans une situation intenable, avec le devoir moral de trouver des solutions pour que ces enfants fragiles n’aient pas à supporter le poids d’une décision, certes fondée juridiquement, mais humainement inacceptable.

Plusieurs communes de mon département, l’Essonne, ont ainsi dû se résoudre à prendre financièrement en charge l’accompagnement des élèves en situation de handicap sur le temps de la pause méridienne : une charge supplémentaire bien malvenue à l’heure où elles se débattent dans des difficultés sans nom pour équilibrer leur budget et garantir la qualité et la pérennité de leurs services.

Certains établissements scolaires, ceux de l’enseignement privé sous contrat, ont dû prendre la responsabilité de trouver les financements nécessaires ou de laisser les familles assumer un coût bien trop lourd pour elles.

Il ne faut pas oublier les AESH, qui constituent un capital humain fort précieux ; leurs emplois du temps et leurs conditions de travail, tellement difficiles et si peu reconnues, ont été bouleversés au sein des Pial.

La proposition de loi de notre collègue Cédric Vial, à laquelle je me suis bien entendu associée, est donc particulièrement bienvenue. Son adoption assurera la continuité de la prise en charge des enfants handicapés.

Sur 478 000 élèves scolarisés en milieu ordinaire à la rentrée 2023, entre 20 000 et 25 000 ont besoin d’un accompagnement humain durant le temps périscolaire.

Ce texte met fin à la pluralité d’employeurs, qui est devenue la règle pour les AESH. Il renforce le droit des enfants en situation de handicap à un parcours continu et adapté en milieu ordinaire, dans l’esprit de la loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées.

Il met fin, surtout, à une forme de mesquinerie – celle qui découle de la décision du Conseil d’État, non de l’action du Gouvernement, madame la ministre ! –, en prévoyant que la solidarité nationale incombe à l’État et qu’il lui appartient, en conséquence, de financer l’intégralité du salaire de l’AESH, quelle que soit la nature – scolaire ou périscolaire – des activités durant lesquelles ce dernier intervient.

Alors qu’il finance actuellement 86 500 équivalents temps plein annuel travaillé (ETPT), je ne doute pas un instant qu’il soit capable de rémunérer l’intervention des AESH auprès des enfants concernés durant le temps méridien.

J’ajoute que cette proposition de loi traduit l’une des recommandations issues du rapport d’information de la commission de la culture, Modalités de gestion des AESH pour une école inclusive.

Enfin, je ne voudrais pas conclure sans indiquer qu’une réflexion globale sur l’accompagnement du handicap à l’école est nécessaire.

L’école inclusive, nous le savons, est au bord de la rupture. Nous avons certes beaucoup progressé sur le chemin de l’égalité, l’abolition des discriminations et la banalisation du handicap. Notre regard sur ce dernier a changé, et nous voyons bien que les différences s’estompent dans les consciences.

Toutefois, si l’inclusion en milieu ordinaire est acquise, les injonctions et les incantations ne sont pas bonnes conseillères. Nous devons imaginer dès aujourd’hui l’école inclusive de demain.

L’école ne peut pas accueillir tous les handicaps, et nous avons le devoir moral d’accélérer les créations de place dans les établissements médico-sociaux, notamment dans les IME.

Il nous faudra également, très vite, mener une réforme structurelle des conditions d’emploi et de travail des AESH. Nous sommes en effet bien conscients que la loi du 16 décembre 2022 visant à lutter contre la précarité des accompagnants d’élèves en situation de handicap et des assistants d’éducation ne peut s’envisager que comme une première étape et qu’un acte II de l’école inclusive est indispensable.

C’est donc avec conviction que le groupe Les Indépendants – République et Territoires votera en faveur de ce texte, qui est essentiel, non seulement sur le plan juridique, mais aussi et surtout sur le plan humain.

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