Intervention de Florence Blatrix Contat

Commission des affaires européennes — Réunion du 25 janvier 2024 à 8h40
Budget de l'union européenne — Révision à mi-parcours du cadre financier pluriannuel cfp de l'union européenne - communication

Photo de Florence Blatrix ContatFlorence Blatrix Contat, co-rapporteure :

Pour financer ces besoins non identifiés lors des négociations du CFP en 2020, deux options étaient possibles. La première consistait à rehausser la contribution des États membres, la seconde à financer les nouvelles priorités par des redéploiements, mot plus policé pour désigner les coupes budgétaires. Compte tenu de la volonté des États membres de limiter l'impact de la révision sur leurs finances publiques, c'est la seconde option - celle des redéploiements - qui a été privilégiée.

Il en résulte des coupes importantes sur des domaines pourtant identifiés comme prioritaires pour l'Union. Ainsi, dans l'accord provisoire de décembre, on peut noter une diminution drastique du programme STEP, présenté pourtant comme la réponse européenne à l'Inflation Reduction Act, passant de 10 milliards d'euros à 1,5 milliards d'euros. Depuis l'annonce d'un Fonds de souveraineté européenne par Ursula von der Leyen lors du discours sur l'état de l'Union en septembre 2022 - véritable révolution dans le discours -, nous sommes allés sur ce sujet de déception en déception, la Commission ne présentant d'abord qu'une plateforme de renforcement de programmes existants, puis le Conseil décidant d'amputer STEP de l'essentiel de ses ressources financières...

Les autres ponctions les plus fortes concernent les politiques de voisinage (-4,5 milliards d'euros sur les instruments d'assistance à la pré-accession à l'UE), le programme Horizon Europe (-2,1 milliards d'euros), le Fonds européen d'ajustement à la mondialisation (-1,3 milliards d'euros), ainsi que le programme de santé EU4Health (-1 milliard d'euros) et les programmes en gestion directe de la PAC et de la politique de cohésion (-1,1 milliard d'euros).

Le Parlement européen fait observer que les redéploiements en provenance du programme Horizon Europe éloigneraient l'UE de l'objectif de consacrer 3 % de son PIB à la R&D - une cible que le Conseil européen avait lui-même déterminée -, tandis qu'Horizon Europe, comme EU4Health, figuraient parmi les programmes pour lesquels l'accord sur le CFP 2021-2027 prévoyait une augmentation de la dotation.

Un point de satisfaction, cependant : les propositions d'augmentation des dépenses administratives de la Commission ont été abandonnées. La France ainsi que de nombreux États membres avaient maintes fois rappelé leurs réserves quant à cette demande. Elle était difficilement acceptable et impossible à satisfaire dans le contexte actuel, au regard des efforts que les États membres doivent réaliser au niveau national.

Autre élément rassurant, mais qui méritera d'être confirmé dans l'accord final : les enveloppes nationales de la PAC et des fonds de cohésion ne seraient pas affectées par ces redéploiements. Le SGAE et la Représentation permanente nous ont par ailleurs assuré que nombre de ces redéploiements correspondraient à des crédits non consommés.

Comment, alors, financer cette révision sans couper dans les programmes ? J'ai évoqué deux options possibles ; il y en a en réalité une troisième, celle de compter sur de nouvelles ressources propres. C'est cette solution que défend le Parlement européen. Comme nous l'a indiqué Valérie Hayer, la logique de recyclage budgétaire s'est installée comme une habitude ces dernières années, afin de contenter la frugalité des États tout en essayant de pourvoir l'UE des moyens de faire face aux crises. Le Parlement européen appelle à changer de paradigme budgétaire et à tourner la page des redéploiements. Les nouvelles priorités devraient être financées par de nouvelles ressources financières, pour donner au budget de l'Union les moyens des ambitions qu'on lui attribue.

Si l'intention est louable, force est cependant de constater le blocage actuel sur la Décision « Ressources propres », qui doit être adoptée à l'unanimité. Les pays « frugaux » comme la Suède, la Finlande et le Danemark y sont opposés par principe, quand la Pologne ou les États baltes s'y opposent plutôt en raison du caractère régressif de la ressource d'échange de quotas d'émission. On peut cependant se réjouir que la présidence belge du Conseil de l'UE ait fait de ce sujet une de ses priorités pour son mandat. Il semble que les mentalités évoluent, même chez les plus « frugaux » des États membres, au vu des besoins d'investissement de l'UE, notamment pour répondre à l'IRA ou aux enjeux du secteur de la défense.

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