Intervention de Éric Dupond-Moretti

Réunion du 6 février 2024 à 15h30
Violences intrafamiliales — Article 1er

Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux :

Mesdames, messieurs les sénateurs, vous proposez, par ces multiples amendements, de rétablir la version de l'article 1er adoptée par l'Assemblée nationale, qui crée deux mécanismes de suspension de plein droit de l'exercice de l'autorité parentale et de droit de visite et d'hébergement.

Le premier interviendrait en cas de poursuites ou de condamnation du parent pour un crime commis sur l'autre parent ou pour une agression sexuelle incestueuse ou un crime commis sur l'enfant.

Ce mécanisme s'appliquerait jusqu'à la décision du juge aux affaires familiales, celle de non-lieu du juge d'instruction ou celle du juge pénal.

Le second concerne les cas de violence sur l'autre parent ayant occasionné une ITT de plus de huit jours, lorsque l'enfant a assisté aux faits. Il s'appliquerait jusqu'à la décision du juge aux affaires familiales, saisi dans un délai de six mois à compter de la décision pénale.

Je vous rejoins évidemment sur la nécessité de prévoir que le mécanisme de suspension de plein droit de l'exercice de l'autorité parentale s'applique aux crimes et aux agressions sexuelles incestueuses dont peut être victime un enfant. C'est d'ailleurs une demande de la Ciivise, et le Gouvernement y voit un moyen efficace pour protéger les enfants d'un parent potentiellement violent ou abuseur dans l'attente de la décision du juge.

Il n'est pas nécessaire de préciser que le mécanisme s'applique à l'ensemble de la fratrie, car le droit positif le prévoit déjà.

Par ailleurs, vous souhaitez supprimer l'obligation pour le procureur de saisir le juge aux affaires familiales, afin qu'il statue sur cette suspension automatique de l'exercice de l'autorité parentale. Ce point fait débat entre les deux assemblées : la rédaction de la commission des lois du Sénat est plus protectrice des droits du parent que celle du texte adopté à l'Assemblée nationale.

Mesdames, messieurs les sénateurs, tout est question de proportionnalité. À mon sens, la prudence nous invite à conserver un minimum de garanties au bénéfice de l'enfant, le parent pouvant toujours saisir – dans des délais qui ne sont pas ceux que vous avez indiqués – le juge aux affaires familiales pour demander à être rétabli dans ses droits.

En ce qui concerne la suspension pour des violences commises sur l'autre parent et ayant occasionné une ITT de plus de huit jours, vous proposez de rétablir la version votée par les députés, que j'ai soutenue, en veillant à préserver les équilibres, s'agissant des faits de violence les plus graves auxquels l'enfant a assisté.

Pour toutes ces raisons, le Gouvernement s'en remettra à la sagesse du Sénat sur l'ensemble de ces amendements.

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