Intervention de François Marc

Réunion du 4 novembre 2008 à 16h00
Statut des dirigeants de sociétés — Renvoi à la commission d'une proposition de loi

Photo de François MarcFrançois Marc :

Par rapport à cet état de fait, qui est incontournable, on nous parle d’une proposition de code de bonne conduite. M. le ministre et M. le rapporteur de la commission des lois en ont eux-mêmes parlé. Ce code de bonne conduite me fait penser à celui que M. Rockefeller avait proposé il y a un certain nombre d’années, selon lequel un patron ne devait pas gagner plus de quarante fois le salaire d’un ouvrier. On sait ce qu’il est aujourd’hui advenu de ce code de bonne conduite, puisque, dans bon nombre d’entreprises, le rapport entre la rémunération des ouvriers et celle des dirigeants est supérieur à 500 !

Comme le Président de la République l’a lui-même souligné, l’injustice criante des rémunérations appelle une maîtrise et une régulation. Tel est l’objet de la proposition de loi que Nicole Bricq vous a présentée à l’instant.

Nous y proposons un certain nombre de mesures visant à limiter les cumuls excessifs des rémunérations, à introduire plus de contrôle et de transparence dans ces rémunérations, à instaurer une véritable responsabilité personnelle du dirigeant, à favoriser un meilleur encadrement des stock-options, à mettre en place une fiscalité adaptée des indemnités. Incontestablement, mes chers collègues, la transparence est à nos yeux et pour l’ensemble de nos concitoyens une exigence fondamentale.

En complétant le droit existant, il s’agit d’enrichir les informations qui doivent être délivrées à l’assemblée générale des actionnaires dans le cadre de l’obligation prévue à l’article L.225-102-1 du code du commerce. Eu égard à la pratique, il convient que toutes les rémunérations et avantages directs et indirects soient soumis à publicité ; c’est ce que nous demandons.

Cette obligation de transparence doit donc également viser les éléments de rémunération versés par une société se trouvant à l’étranger, par exemple dans un paradis fiscal, dès lors qu’elle a un lien juridique direct ou indirect avec la société pour laquelle le dirigeant comme l’administrateur exercent leur mandat.

Je souhaite plus particulièrement souligner le bien-fondé de cette proposition de loi en m’attachant aux trois premiers articles, ceux qui visent à la suppression du cumul d’un contrat de travail et d’un mandat social.

L’objet de ces trois premiers articles est simple : il s’agit de mettre fin aux ambiguïtés de la relation entre l’entreprise et son dirigeant, qui expliquent en grande partie les dérives récentes qui ont fait scandale.

La plupart des dirigeants jouissent, en effet, d’un contrat de travail qui est « officiellement suspendu » durant le mandat social mais qui est remis en vigueur au moment de leur départ, afin de légitimer qu’ils puissent toucher des indemnités de départ, les parachutes dorés notamment.

D’un point de vue juridique et organisationnel, on ne peut accepter que soit salarié, c’est-à-dire caractérisé par un lien de subordination, celui-là même qui dirige l’entreprise.

Donc, le dirigeant ne peut avoir le statut de mandataire social et bénéficier en même temps des garanties liées à un contrat de travail.

L’objet de notre proposition est donc d’interdire ce cumul du statut de salarié pour un dirigeant en fonction. De ce point de vue, la jurisprudence constante de la Cour de cassation a affirmé avec netteté qu’un administrateur en fonction ne peut pas conclure un contrat de travail avec la société.

La chambre sociale, dans un arrêt du 21 novembre 2006, a affirmé que le contrat de travail signé par un administrateur en fonction serait frappé de nullité absolue et que l’administrateur devrait restituer le salaire et les accessoires de salaire qu’il a perçus.

Voilà, mes chers collègues, quelques éléments d’évidence qui nous conduisent à penser que, dans la formulation juridique, il convient aujourd’hui de progresser et de mettre en place les garde-fous nécessaires.

En conclusion, il me paraît utile de rappeler quelques éléments, compte tenu de ce que nous a dit le ministre.

Le Président de la République a lui-même déclaré, dans son discours de Toulon – et ses propos valent la peine d’être cités : « Je n’hésite pas à dire que les modes de rémunérations des dirigeants et des opérateurs doivent désormais être encadrés. Il y a eu trop d’abus, trop de scandales. »

Dans le même temps, certains nous disent qu’il faut revaloriser le rôle de l’opposition parlementaire. La meilleure manière de le faire serait peut-être d’examiner les propositions de lois qui sont déposées ! Ce serait faire preuve d’un minimum de respect pour l’opposition.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion