Intervention de François Zocchetto

Réunion du 4 novembre 2008 à 16h00
Statut des dirigeants de sociétés — Demande de renvoi à la commission

Photo de François ZocchettoFrançois Zocchetto, rapporteur :

Je regrette, bien entendu, que nos collègues des groupes socialiste et CRC aient choisi de quitter la séance, mais il est bien évident que le droit de l’opposition à demander l’inscription d’un texte à l’ordre du jour n’implique pas de légiférer dans la précipitation.

Comme je l’ai indiqué tout à l’heure, le rapporteur de la commission, le président Jean-Jacques Hyest, que je remplace à nouveau, a eu moins d’une semaine pour examiner cette proposition de loi, dont le moins qu’on puisse dire est qu’elle est dense et imparfaite. En général, la plupart des propositions de loi sont des textes très simples, qui tiennent en un article et n’appellent pas de modifications. Or la proposition présentée par Mme Bricq méritait beaucoup de précisions et de modifications. Je le dis formellement, elle ne pouvait être adoptée sans une étude approfondie, ne serait-ce que sur un plan technique. Mais, vous l’avez bien compris, cela n’a pas été possible dans le délai qui nous a été imparti.

La motion tendant au renvoi à la commission que je vais maintenant vous présenter n’implique nullement – bien au contraire ! – que nous n’ayons pas envie de débattre des questions que soulève la proposition de loi. La gauche n’a pas voulu nous entendre, mais nous sommes pleinement d’accord sur le constat : la commission des lois considère qu’il doit être mis un terme à certaines pratiques qui ont cours, en matière de rémunération et de statut des dirigeants, dans les grandes sociétés cotées.

De plus, un certain nombre de parlementaires, qu’ils soient de l’UMP, de l’Union centriste ou d’ailleurs, ont eu l’occasion, avant les représentants des partis socialiste ou communiste, d’exprimer leurs préoccupations sur le sujet et de faire des propositions, par exemple lors de l’examen des projets de loi de finances ou de financement de la sécurité sociale.

Pour autant, la commission estime que, telle qu’elle est envisagée par la présente proposition de loi, l’intervention législative dans ce domaine est prématurée. Cela ne veut pas dire que nous ne voulons pas en discuter ou légiférer, mais nous jugeons qu’il ne serait pas opportun d’en débattre ce soir, et cela pour trois raisons.

Tout d’abord, les grandes sociétés, qui sont les premières concernées par ces phénomènes et qui sont confrontées à la réprobation grandissante de l’opinion publique, ont déjà pris des engagements fermes. Ce code de conduite, que les différents orateurs ont évoqué, constitue une réponse appropriée aux errements constatés jusqu’alors. Les entreprises intéressées– au nombre de 688, M. le ministre l’a rappelé – se sont formellement engagées à le respecter. La commission estime que, avant de décider, le cas échéant, de légiférer, il convient d’évaluer la mise en œuvre de ces recommandations.

La commission envisage ainsi de se livrer, à la fin du premier trimestre de 2009, à une évaluation de la bonne application de ces principes de gouvernement d’entreprise en procédant à des auditions. J’espère que nos collègues de la gauche y participeront. Nous avons l’intention d’entendre le maximum de personnes concernées, en particulier les associations d’entreprises et les représentants de l’Autorité des marchés financiers. À cette occasion, nos collègues de l’opposition pourront faire des suggestions.

Ensuite, des réformes ponctuelles ayant un objet proche de celui de cette proposition de loi sont en cours d’examen dans le cadre d’autres véhicules législatifs. Notre commission estime qu’il convient d’attendre l’issue des navettes parlementaires sur ces différentes initiatives – le projet de loi de finances pour 2009, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2009 et le projet de loi en faveur des revenus du travail, que nous venons d’adopter en première lecture au Sénat –, avant de décider de légiférer sur des points complémentaires.

Enfin, sur le plan de la procédure parlementaire, cette proposition de loi a été déposée très tardivement, le 23 octobre dernier. La version définitive du texte n’a été disponible que le 27 octobre ; or il s’agit d’un document d’une vingtaine de pages ! En dépit de toute la bonne volonté du rapporteur et des membres de la commission des lois, celle-ci n’a pas disposé d’un délai suffisant pour examiner ce texte avec toute la sérénité nécessaire. À l’évidence, il convient de prendre pleinement en considération les conséquences pratiques des importantes modifications que propose Mme Bricq.

Telles sont les trois raisons pour lesquelles nous estimons que les dispositions de la proposition de loi ne peuvent être discutées ce soir en séance publique. Nous vous proposons donc, mes chers collègues, de voter le renvoi à la commission.

Ce renvoi n’a pas pour but d’enterrer le texte, comme cela a pu être dit tout à l’heure de façon totalement aberrante puisque nous avons bien conscience que nous sommes en face de problèmes à résoudre. Mais il permettra à la commission d’examiner les conditions de mise en œuvre, dans les prochains mois, par les sociétés concernées, des principes de gouvernement d’entreprise, et d’envisager, dans l’hypothèse où ces principes ne serait pas effectivement appliqués, l’édiction de normes législatives en la matière.

Voilà une façon sereine de procéder, et qui donnera, je n’en doute pas, des résultats bien meilleurs qu’un examen hâtif et incomplet du présent texte, ce soir.

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