Intervention de Benoît Huré

Réunion du 24 octobre 2007 à 17h00
Valorisation des produits agricoles forestiers ou alimentaires et des produits de la mer — Adoption d'un projet de loi

Photo de Benoît HuréBenoît Huré, rapporteur de la commission des affaires économiques :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, les signes valorisant la qualité et l'origine des produits agricoles et alimentaires bénéficient d'un engouement véritablement croissant auprès de nos concitoyens. Il n'est plus un rayon de supermarché, en effet, où l'on ne puisse acheter un fromage ou un vin AOC, un poulet label rouge ou encore un fruit ou un légume provenant de l'agriculture biologique !

Cette évolution s'inscrit dans un contexte où les préoccupations liées au goût, à la sécurité et à la préservation des savoir-faire et du patrimoine gastronomique prennent une place prééminente. Elle permet, en outre, de renforcer économiquement la partie la plus qualitative de notre agriculture et de contribuer à un aménagement équilibré et durable du territoire.

Si la demande de signes de valorisation existe donc bel et bien, l'offre ne paraît plus aujourd'hui à la hauteur des attentes légitimes des consommateurs, qui se trouvent de plus en plus désemparés devant la multiplication de ces signes, créés à des époques, à des échelons et selon des logiques différents, sans qu'aucun travail de clarification ait jamais été entrepris.

Peu lisibles du fait de leur inflation et de leur complexité, les signes de valorisation sont désormais, pour certains d'entre eux du moins, peu crédibles aux yeux du grand public. Une récente enquête publiée dans le magazine Que choisir ? concluait ainsi qu'une partie importante des vins classés en AOC ne méritait pas de bénéficier de ce signe. Le manque d'impartialité des organismes de contrôle, dont les liens structurels avec les institutions gérant les signes sont étroits, a été pointé du doigt à cette occasion.

Enfin, il était devenu nécessaire de mettre tous ces signes d'identification en conformité avec le droit communautaire, qui, depuis quelques années, fixe leur régime de façon très précise.

Pour leur conserver toute leur renommée et toute leur valeur, il était donc devenu impératif de renforcer la lisibilité de ces signes, d'accroître leur crédibilité et de garantir leur « eurocompatibilité ». Tel était également l'objectif que nous avions fixé au Gouvernement lors du vote de la dernière loi d'orientation agricole, à la fin de l'année 2005. Il était, en effet, indispensable que cette réforme du dispositif français des signes de valorisation ne se fasse pas de façon précipitée, mais qu'elle donne lieu à la consultation de l'ensemble des acteurs intéressés.

Parlementaires, professionnels et représentants de l'administration ont donc travaillé de concert, pour finalement aboutir à la publication de l'ordonnance du 7 décembre 2006 relative à la valorisation des produits agricoles, forestiers ou alimentaires et des produits de la mer. C'est ce texte que le projet de loi que nous examinons aujourd'hui tend à ratifier, afin de lui donner valeur légale et donc d'en garantir les fondements juridiques.

La vaste réforme du système français de valorisation à laquelle il procède s'organise autour de quatre grands axes ou piliers.

Le premier pilier vise à structurer les nombreux signes de valorisation autour de trois catégories principales. Tout d'abord, les signes d'identification de la qualité et de l'origine, qui valorisent soit une qualité supérieure, comme « label rouge », soit une qualité liée à la tradition, telle que « spécialité traditionnelle garantie », ou à l'origine, comme « appellation d'origine contrôlée », « appellation d'origine protégée » ou « indication géographique protégée », soit encore une qualité environnementale, telle que « agriculture biologique » ; ensuite, les mentions valorisantes, comme « montagne », « fermier », « produits de pays », « vins de pays », entre autres ; enfin, les démarches de certification des produits. Ces catégories sont d'une nature différente de celle des autres signes, puisqu'elles reposent sur des démarches internes à des entreprises. En tant que telles, elles ne relèvent pas de l'INAO.

Le deuxième pilier de la réforme, c'est la création d'un l'Institut national de l'origine et de la qualité, l'INAO, une structure « tête de réseau » qui prend la place de l'ancien Institut national des appellations d'origine. Cet INAO « nouvelle formule » joue un rôle central : il encadre tous les signes d'identification de la qualité et de l'origine. Aussi est-il composé de comités nationaux organisés par filières et types de signes, dans lesquels chaque catégorie d'opérateurs se trouve représentée. L'INAO possède, par ailleurs, un conseil des agréments et contrôles, qui supervise le contrôle, par les organismes privés, de tous les signes pour lesquels il est compétent.

Le troisième pilier de la réforme, c'est la mise en place d'organismes de défense et de gestion, plus couramment appelés ODG, qui se substituent aux multiples structures antérieures. Également représentatifs des différentes catégories d'opérateurs, ils mettent au point et gèrent les cahiers des charges des signes de qualité et d'origine, après avoir été, quant à eux, reconnus par l'INAO.

Le renforcement des structures et des procédures de contrôle constitue le quatrième et dernier pilier du nouveau dispositif. Afin de mettre fin aux critiques sur leur impartialité, les contrôles sont confiés non plus aux opérateurs eux-mêmes, mais à des organismes tiers, indépendants et impartiaux, accrédités et contrôlés par l'INAO, à savoir les organismes d'inspection et de contrôle.

Mes chers collègues, voila évoqués à grands traits l'esprit et le contenu de la réforme dont nous devons aujourd'hui autoriser la ratification. Ce nouveau dispositif, mis en place progressivement depuis que l'ordonnance a été publiée, à la fin de l'année dernière, recueille l'assentiment général des acteurs concernés et devrait rassembler au-delà des clivages politiques.

Nous avons, d'ailleurs, fait le même constat lors de la douzaine d'auditions des organismes administratifs, syndicaux et professionnels les plus concernés à laquelle nous avons procédé.

Il ne saurait donc être question aujourd'hui de remanier profondément ce dispositif ; il s'agit seulement de procéder aux quelques corrections ou adaptations dont l'expérience a montré la nécessité. Tel est l'objet des cinq amendements que nous avons adoptés ce matin en commission et que nous examinerons tout à l'heure.

Le premier tend à apporter diverses améliorations et précisions rédactionnelles au texte de l'ordonnance.

Le deuxième vise, pour des raisons très pratiques, à proroger de deux années le mandat des assesseurs aux tribunaux paritaires des baux ruraux.

Le troisième a pour objet de restaurer, pour les labels rouges, un lien entre la qualité et l'origine.

Le quatrième tend à permettre à l'INAO de prendre des mesures communes pour l'ensemble des labels rouges, comme c'est déjà le cas pour les appellations d'origine.

Le cinquième vise à adapter les dates d'entrée en vigueur de l'article 2 du projet de loi, pour des raisons très prosaïques.

Sous réserve du vote de ces amendements, la commission des affaires économiques estime que ce projet de loi vient très opportunément renforcer l'assise juridique d'une réforme du dispositif français des signes de valorisation qui est en train d'être mise en oeuvre et qui est accueillie favorablement par la très grande majorité des opérateurs. Dans l'intérêt des consommateurs, des opérateurs et, plus largement, de l'image de la Ferme France à l'étranger, elle espère donc qu'il fera aujourd'hui l'objet d'une adoption aussi consensuelle que possible.

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