Intervention de Jean-Claude Carle

Réunion du 15 septembre 2010 à 14h30
Lutte contre l'absentéisme scolaire — Adoption définitive d'une proposition de loi

Photo de Jean-Claude CarleJean-Claude Carle, rapporteur :

Je pense par exemple aux réseaux d’écoute et d’aide à la parentalité ou encore aux conseils pour les droits et devoirs des familles. Ces derniers, créés par la loi du 5 mars 2007 relative à la prévention de la délinquance et mis en place sur l’initiative des maires, sont constitués d’une équipe pluridisciplinaire, compétente en matière de prévention de la délinquance, d’action sociale et éducative et de logement.

Ce n’est pas l’aspect punitif de la proposition de loi qui doit être mis en avant, c’est son volet éducatif. La suspension des allocations familiales doit être plutôt vue comme un moyen d’inciter les parents à superviser leurs enfants de manière plus attentive et plus active.

Une telle mesure de dissuasion, utilisable en dernier ressort, peut faire prendre conscience aux parents de la gravité de la situation dans laquelle se trouve l’enfant et les contraindre, si nécessaire, à recevoir une aide adéquate.

Plus largement, l’ensemble des auditions que j’ai menées ont renforcé ma conviction, déjà ancienne, que l’implication des parents dans la vie de l’école était un élément fondamental de la lutte contre l’absentéisme et l’échec scolaires.

En effet, il n’est pas rare que des parents ne perçoivent plus l’utilité, ni le sens, de l’école. C’est le cas des parents qui ont eux-mêmes connu des difficultés au cours de leur scolarité, qui subissent l’exclusion sociale, ou encore qui ne maîtrisent pas suffisamment la langue française.

Si l’on veut que les parents veillent à l’assiduité scolaire de leurs enfants, il faut d’abord entreprendre de leur expliquer ce qu’est l’école, ce qu’elle apportera à leurs enfants et ce qui est attendu d’eux.

L’examen à l’Assemblée nationale de la proposition de loi que nous examinons a permis également de faire un pas important dans cette direction. Dans chaque école et établissement d’enseignement scolaire public, le projet d’école ou d’établissement et le règlement intérieur devront être présentés aux parents lors de la première inscription de leurs enfants par le directeur de l’école ou le chef d’établissement.

Ce rendez-vous obligatoire constituera le premier contact des parents avec l’école, sans qu’aucun passif soit déjà accumulé. Il devrait permettre de mieux les intégrer au sein de la communauté éducative, au grand bénéfice de tous.

Cette démarche de dialogue ne devra pas se cantonner au seul moment de l’inscription. Au contraire, elle devra être continuée après ce premier contact tout au long de l’année scolaire, sans se limiter à de simples convocations en cas de mauvais comportements ou de mauvais résultats des enfants.

En définitive, cette proposition de loi avance des éléments de solution qui pourront se révéler utiles. Elle vise à responsabiliser les parents, et non, comme veulent le faire croire certains, à les stigmatiser.

Pour tirer pleinement le bénéfice du dispositif, il conviendra, d’abord, de l’appliquer avec pragmatisme et discernement, afin de tenir compte de la singularité de chaque cas – vous l’avez rappelé, monsieur le ministre –, ensuite, d’insister sur la visée éducative de la sanction, qui doit être plus dissuasive que punitive et favoriser l’entrée dans un processus d’accompagnement des parents, et, enfin, d’ouvrir véritablement l’école à l’ensemble des acteurs de la communauté éducative, aux parents au premier chef, car c’est à eux qu’incombe la mission d’éducation de leurs enfants. C’est d’ailleurs pour cela que la loi leur reconnaît des droits et des aides matérielles.

Sous le bénéfice de ces observations, mes chers collègues, et en considérant l’équilibre lucide et constructif trouvé par le texte, je vous propose d’adopter cette proposition de loi en l’état, alors que deux modifications importantes ont été apportées lors de la discussion à l’Assemblée nationale.

D’abord, j’y ai fait référence, le nouvel article 1er bis, adopté sur l’initiative de la commission, fait obligation au chef d’établissement de présenter aux parents le règlement intérieur et le projet d’établissement dès la première inscription de l’enfant.

Ensuite, le nouvel article 5, introduit sur l’initiative de nos collègues centristes, associe le Parlement à l’évaluation des dispositifs de lutte contre l’absentéisme scolaire et d’accompagnement parental, grâce à un comité de suivi.

Plus que l’absentéisme lui-même, ce sont ses conséquences qui sont peut-être les plus importantes. Elles sont de plusieurs ordres.

Pour ma part, j’en retiendrai deux : d’une part, le risque de marginalisation, dans la mesure où l’absence de formation crée des difficultés d’insertion professionnelle, donc d’emploi ; d’autre part, le risque de délinquance et de violence. Comme je l’ai déjà souligné, lorsque la rue concurrence l’école, c’est toujours la rue qui l’emporte.

Pour avoir été rapporteur d’une commission d’enquête sur la délinquance des mineurs, je sais que nous devons aujourd’hui sortir du débat dépassé entre les tenants de l’éducation et les partisans de la sanction ; il nous faut, me semble-t-il, conjuguer éducation et sanction.

Mes chers collègues, c’est tout l’objet de la présente proposition de loi, que je vous demande d’adopter.

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