Intervention de Hervé Novelli

Réunion du 29 avril 2010 à 15h00
Contrats d'assurance sur la vie — Adoption d'une proposition de loi

Hervé Novelli, secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation :

Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, cette proposition de loi de M. Hervé Maurey me semble bienvenue en raison des supputations, voire des fantasmes qui entourent les contrats non réclamés, compte tenu de la difficulté à évaluer le montant de ce prétendu trésor de Monte-Cristo, que d’aucuns chiffrent à 700 millions d’euros, d’autres à 5 milliards d’euros.

La transparence voulue tant par l’auteur de la proposition de loi que par la commission des lois me semble indispensable, car c’est l’un des piliers de la confiance.

En juin 2008, la profession de l’assurance publiait un baromètre de l’image de l’assurance en France, qui montrait que, pour un Français sur deux, le secteur de l’assurance était synonyme de « confiance ». Celle-ci m’apparaît essentielle pour deux raisons.

La première, comme l’a fort justement souligné Hervé Maurey, est que l’assurance sur la vie représente aujourd’hui le produit d’épargne préféré des Français. La « confiance » est impérative pour un produit qui concerne 22 millions de contrats et près de 41 % du patrimoine financier des ménages. Il s’agit donc là d’un enjeu important de consommation, auquel je suis naturellement particulièrement sensible compte tenu de mes responsabilités ministérielles.

La seconde raison est que l’assurance sur la vie ne peut tout simplement pas exister sans confiance, car, au moment du décès de l’assuré, c’est l’assureur qui a la responsabilité de verser les sommes aux bénéficiaires.

L’existence d’un stock, au demeurant difficile à évaluer, de contrats non réclamés constitue donc un échec à cet égard. La profession de l’assurance a, je crois, pleinement pris conscience de cet enjeu, qui est devenu une priorité de ses engagements déontologiques.

Pour autant, la confiance n’exclut pas de réguler, ce qui semble même indispensable pour la renforcer. Là encore, c’est le rôle du secrétaire d’État chargé de la consommation que d’y veiller, de concert avec d’autres acteurs.

Depuis trois ans, le Gouvernement a travaillé à renforcer les conditions de la confiance entre assureurs et assurés au bénéfice des consommateurs.

La loi du 17 décembre 2007 constitue de ce point de vue une avancée décisive, qui s’articule autour de trois actions clés.

Tout d’abord, cette loi oblige les assureurs à s’informer du décès de leurs assurés avant de pouvoir verser des sommes aux bénéficiaires.

Ensuite, elle donne aux assureurs les moyens de s’informer ; depuis mars 2009, les assureurs ont accès au fichier national qui recense les décès, le répertoire national d’identification des personnes physiques.

Enfin, la loi oblige les assureurs à rechercher les bénéficiaires une fois qu’ils ont connaissance du décès de l’assuré.

Toujours dans la loi de 2007, nous avons voulu réformer la clause bénéficiaire pour la rendre plus juste. Cette clause pouvait se retourner contre l’assuré. En effet, lorsque le bénéficiaire était informé de l’existence du contrat, il pouvait alors accepter la clause, la rendant ainsi irrévocable et privant l’assuré de toute possibilité de jouir de ses fonds, le cas échéant à son insu ou contre son gré. La loi a modifié le fonctionnement de la clause bénéficiaire. L’assuré peut désormais informer sans crainte son bénéficiaire. La sécurité des consommateurs est renforcée. Informer le bénéficiaire est encore la meilleure façon de garantir la réclamation du contrat au décès de l’assuré. Ces nouvelles mesures ont complété la loi de 2005, qui permet à tout particulier pensant avoir été désigné comme bénéficiaire d’un contrat d’assurance de se le faire confirmer en formulant une demande unique à l’AGIRA, qui saisit à son tour l’ensemble des assureurs.

L’efficacité de ces dispositifs est aujourd'hui démontrée. Au mois de juin 2009, le Gouvernement a publié un rapport relatif aux contrats d’assurance sur la vie non réclamés.

En trois ans et demi, le dispositif AGIRA I de la loi de 2005 a permis, grâce aux demandes de particuliers qui pensaient être bénéficiaires de contrats d’assurance sur la vie, d’ouvrir 7 500 dossiers correspondant à 205 millions d’euros de capitaux à verser.

En 2009, le dispositif AGIRA II de la loi de 2007 qui permet aux assureurs de consulter le fichier national des décès a été fortement utilisé par les assureurs, comme Hervé Maurey l’a indiqué : plus de six millions d’interrogations ont été recensées, chiffre considérable. Elles ont permis d’identifier 14 000 décès, ce qui a entraîné le versement de 121 millions d’euros supplémentaires.

Au final, grâce à ces deux dispositifs, AGIRA I et AGIRA II, près de 330 millions d’euros ont, en quelque sorte, retrouvé leur chemin en direction des consommateurs.

Aujourd’hui, la proposition de loi présentée par Hervé Maurey nous donne l’occasion à la fois de faire le point sur le dispositif AGIRA, mais aussi de parfaire les dispositifs existants.

La commission des lois du Sénat, eu égard au remarquable travail accompli par son rapporteur, Dominique de Legge, et sous la présidence de Jean-Jacques Hyest, a réalisé un travail d’orfèvre pour identifier les insuffisances du dispositif de 2007, tout en s’inscrivant résolument dans la continuité des dispositifs AGIRA, qui sont en train de faire leurs preuves. Comme vous l’avez relevé, monsieur le rapporteur, l’intérêt de la présente proposition de loi est de se fondre dans les dispositifs existants, qui démontrent leur efficacité grandissante. Je tenais à vous en remercier.

Tout d’abord, le texte de la commission va jusqu’au bout de la logique de la loi de 2007, en tendant à imposer aux assureurs une obligation annuelle de croiser leur fichier d’assurés avec le fichier national des personnes privées.

Ensuite, il instaure formellement un principe de responsabilité des assureurs, qui n’est pas démenti par la pratique observée depuis la loi de 2007, en exigeant des assureurs qu’ils publient chaque année les démarches qu’ils ont entreprises pour rechercher les bénéficiaires de contrats non réclamés, ainsi que les résultats obtenus.

Ces avancées, de bon sens, prolongent la loi de 2007. Elles sont efficaces et proportionnées, à l’image de l’action de la commission des lois du Sénat. C’est pourquoi le Gouvernement sera favorable au texte issu des travaux de cette dernière.

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