Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, lorsque j’ai appris qu’un texte sur les contrats d’assurance sur la vie était inscrit à l’ordre du jour de nos travaux de ce jeudi 29 avril, je me suis demandé pourquoi ce sujet était encore une fois abordé.
En effet, ces dernières années, le Sénat a été à la pointe dans ce domaine. Je n’ai pas le sentiment que, ni sous la houlette de Philippe Marini en 2005, lors de l’examen du texte devenu la loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit communautaire dans le domaine de l’assurance, ni sous celle de Jean Jacques Hyest, lors de la discussion du texte devenu la loi permettant la recherche des bénéficiaires des contrats d’assurance sur la vie non réclamés et garantissant les droits des assurés en 2007, nous ayons mal travaillé, bien au contraire. J’associe à ces travaux Yves Détraigne, puisque nous y avions tous deux participé.
Non seulement nous avons permis que de véritables avancées aient lieu, en assurant une réelle information des assurés, mais surtout nous avons créé les bases durables et efficaces permettant dorénavant aux assureurs d’accéder au fichier des personnes décédées, ce qu’ils ne pouvaient pas faire jusqu’en 2009. Sans cette disposition, je ne vois pas comment ils pouvaient découvrir que l’un de leurs assurés était décédé, sauf s’il avait dépassé l’âge de cent-dix ans !
D’ailleurs, je doute que les banques se posent de telles questions si un compte est sans mouvement. Elles ne réagiront que lorsque le compte sera à découvert. Cela me conduit à vous demander, monsieur le secrétaire d'État, ce que deviennent les sommes des comptes bancaires ou des livrets d’épargne que nous offrons à la naissance des enfants, même si les montants sont plus faibles que pour un contrat d’assurance sur la vie. Une procédure est-elle prévue en ce domaine ?
Le rapport de Dominique de Legge m’a rassurée. Ce dernier n’a pas remis en cause le travail législatif antérieur qu’il connaissait parfaitement. Il s’est interrogé, lui aussi, sur l’opportunité de modifier un système récent qui commence tout juste à être opérationnel.
Le pragmatisme dont il a fait preuve a été souligné par Hervé Maurey. Je fais miens ces propos, car, en matière d’assurances, le pragmatisme doit l’emporter sur l’idéologie.
Les contrats en déshérence sont un sujet médiatique et font facilement la une des journaux. Ils sont notre monstre du Loch Ness : des millions, voire des milliards d’euros, ignorés de milliers de bénéficiaires, dormiraient chez les assureurs comme Nessie au fond du lac ! Or, pour l’instant, personne n’a vraiment vu ces sommes et le monstre en question n’est peut-être qu’un gros saurien qui fait rêver : n’aurions-nous pas, quelque part, un oncle ou une cousine richissime dont nous serions l’héritier et qu’un généalogiste bienveillant va retrouver pour nous ?
Les assureurs ne sont pas irréprochables. Jusqu’au xxie siècle, peu d’entre eux s’étaient préoccupés de ces contrats dormants avant l’intervention du législateur.
Les assurés ne le sont pas non plus. Et je veux profiter de cette tribune pour émettre un avis tout à fait personnel et faire part de mon étonnement quant à la sollicitude que nous manifestons à l’égard des personnes qui ne se préoccupent pas du capital qu’elles placent et qui leur rapporte pourtant des intérêts. C’est tout de même faire preuve de beaucoup de négligence ! Moi qui souscris ce type de contrat depuis que j’ai commencé à travailler, je sais où se trouvent les sommes que j’ai ainsi placées et qui en sont les bénéficiaires ! Si certains assurés sont trop vieux pour se souvenir qu’ils ont souscrit des contrats, tous ne sont pas dans ce cas. C’est pourquoi Hervé Maurey me paraît avoir été bien confiant en croyant qu’un courrier pourrait corriger le comportement de ces personnes désinvoltes.
J’approuve par conséquent la sagesse de la commission, qui a supprimé la référence à un accusé de réception. Une non-réponse aurait en effet été plus souvent due à la négligence qu’au décès du contractant, et cette mesure aurait été lourde en termes de coûts de gestion pour les assurés.
C’est pourquoi je souhaite avoir des précisions sur les dispositions que la commission a intégrées à l’article 1er concernant la recherche annuelle. Qui fixera les modalités pratiques de cette dernière ? Sera-t-elle obligatoire même si l’assuré a été, dans l’année, en contact avec sa compagnie d’assurance pour un autre contrat d’assurance, pour son automobile ou son habitation, par exemple, ou avec la banque auprès de laquelle il a souscrit le contrat d’assurance sur la vie, car il s’agit, comme c’est majoritairement le cas, de celle où il a ouvert un compte bancaire ?
Je sais que les assureurs ont accepté cette procédure. Toutefois, il nous faut être lucides : ce sont les assurés, c'est-à-dire nous, qui paieront les frais de cette gestion supplémentaire ! Dans ces conditions, autant limiter cette procédure aux seules personnes qui n’ont eu aucun contact avec l’entreprise gestionnaire.
Monsieur le secrétaire d'État, monsieur le rapporteur, pourrez-vous m’apporter des précisions à ce sujet ?
Comme je suis fidèle à mes convictions et que j’ai de la suite dans les idées, je regrette que la commission n’ait pas retenu deux dispositions prévues par la proposition de loi initiale, car il s’agit de mesures que j’avais moi-même défendues en 2005 et en 2007.
La première disposition concerne la communication obligatoire annuelle du souscripteur du contrat d’assurance sur la vie. Lui rappeler qu’il doit informer son assureur de son déménagement et qu’il peut modifier ou compléter la clause bénéficiaire faciliterait les choses ! Il me semble cependant que les assureurs pourraient d’eux-mêmes prendre cette initiative qui leur permettrait de tenir à jour leur fichier. Peut-être suffit-il, monsieur le secrétaire d'État, de le leur suggérer avec insistance ?