Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, j’entrerai directement dans le vif du sujet : comme nous avons déjà eu l’occasion de le dire en commission, le groupe socialiste est opposé à l’adoption de cette proposition de loi, qui, selon nous, apporte une mauvaise, une très mauvaise réponse à un vrai problème.
Je rappelle que c’est à l’issue d’une longue mobilisation – celle du collectif Génération précaire et des organisations étudiantes, qui ont alerté l’opinion sur le scandale des stages étudiants non rémunérés – que la loi du 31 mars 2006 pour l’égalité des chances a posé le principe de la gratification obligatoire des stages étudiants d’une durée supérieure à trois mois. En novembre 2009, ce seuil a été abaissé à deux mois, ce qui est une excellente chose.
Il est donc dorénavant impossible qu’un stagiaire soit recruté par une entreprise sans qu’une convention de stage entre le chef d’entreprise, l’étudiant et l’établissement d’enseignement ait été conclue.
Le décret du 29 août 2006, reprenant les termes de la charte des stages étudiants en entreprise signée par M. Gérard Larcher, alors ministre du travail, précise qu’aucune convention de stage ne peut être conclue pour remplacer un salarié absent ou licencié, pour exécuter une tâche régulière correspondant à un poste de travail permanent, pour faire face à un accroissement temporaire d'activité de l'entreprise ou pour occuper un emploi saisonnier. C’est là encore une excellente chose.
Le stagiaire perçoit une gratification, et non une rémunération au sens du code du travail. Elle n’est donc pas assortie de cotisations sociales ni génératrice, à terme, de prestations. C’est là, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, un aspect qu’il faudra revoir, lors de la prochaine réforme des retraites, dans l’esprit de la proposition de loi que j’avais eu l’honneur de déposer ici même en 2006.
La question du montant de la gratification a suscité de nombreux débats. Pour mémoire, on peut rappeler l’existence d’une proposition de loi de Valérie Pécresse, alors député des Yvelines, précisant en mars 2006 que « les stages d’une durée de plus de trois mois donnent lieu au versement d’une indemnité mensuelle au moins égale à 50 % du salaire minimum de croissance ». Mme Gourault nous a à l’instant rappelé que le groupe de l’Union centriste avait formulé la même demande, tout comme je l’avais fait dans la proposition de loi que j’avais déposée.
En fin de compte, le décret du 29 août 2006 a repris le montant correspondant précédemment à la franchise de cotisations fixée par l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale, l’ACOSS, soit 360, 22 euros mensuels, les sommes versées au-delà de ce montant étant assujetties aux cotisations et contributions sociales ; car, il est important de le rappeler, et nous y reviendrons, la gratification est exonérée de charges sociales. Le montant en franchise de cotisations a été revalorisé et s’élève depuis le 1er janvier 2010 à 417 euros mensuels. Il ne s’agit néanmoins que d’une gratification minimale, celle-ci demeurant fixée par accord collectif ou, à défaut, par le chef d’entreprise.
À titre personnel, je souhaiterais que nous allions beaucoup plus loin dans l’encadrement des stages, comme en témoigne la proposition de loi que j’avais déposée en juin 2006 et qui a été repoussée par le Sénat le 13 février 2007, au demeurant dans des conditions peu glorieuses pour notre assemblée : je le rappelle, les travées de la majorité étaient désertes ce jour-là et il avait fallu suspendre la séance près de trois quarts d’heure avant de trouver un sénateur du groupe UMP qui veuille bien se rendre dans l’hémicycle pour, grâce au recours au scrutin public, faire échouer la proposition de loi.