Intervention de Annie David

Réunion du 13 novembre 2008 à 9h30
Financement de la sécurité sociale pour 2009 — Article 6

Photo de Annie DavidAnnie David :

La revalorisation des retraites au 1er septembre 2008 prévue par l’article 6 ne sera de nature à compenser ni l’inflation des prix, particulièrement ceux des produits de premières nécessités, ni la perte de pouvoir d’achat que subissent de plein fouet les retraités de notre pays.

D’ailleurs, comme vient de le rappeler notre collègue Patricia Schillinger, les retraités ont tenté de se faire entendre du Gouvernement, en manifestant massivement le 16 octobre dernier. Malheureusement, madame la ministre, cette mobilisation n’aura pas suffit à vous convaincre, et la revalorisation proposée restera très inférieure au taux d’inflation, estimé à 2, 9 %.

Madame la ministre, en 2003, votre majorité avait décidé d’indexer les retraites sur les prix. Au sein du groupe CRC, nous nous y étions opposés. De notre point de vue, il était préférable que les retraites soient indexées sur l’évolution moyenne des salaires. On nous avait alors promis une indexation fidèle. Aujourd’hui, force est de constater que tel n’est pas le cas. La hausse prévue en septembre suffit à peine à combler les écarts de 2007. La revalorisation de 0, 8 % est insuffisante d’au moins un point, d’autant que vous y intégrez de manière prévisionnelle la hausse pour 2009. Ainsi, nous sommes loin, très loin, d’une indexation à l’identique sur l’évolution des prix.

Votre volonté de réduire les dépenses de la branche vieillesse, sans jamais chercher à trouver des recettes nouvelles, sera lourde de conséquences pour les retraités de notre pays, qui plongeront plus encore dans la précarité et la pauvreté, renonçant aux soins et se privant sur le seul poste de dépenses ajustables après les loisirs, c'est-à-dire l’alimentaire. Cela est d’autant plus vrai que c’est précisément là où les prix ont le plus augmenté !

Selon le rapport annuel du Secours catholique, qui est paru récemment, la proportion de personnes âgées de plus de cinquante-cinq ans secourues par cette association est en augmentation entre 2006 et 2007.

Nous en connaissons tous la conséquence. Plus de la moitié des retraités de notre pays vivent avec moins de 1 300 euros par mois. En outre, des millions d’hommes et de femmes – d’ailleurs, il s’agit en particulier de femmes, en raison de carrières incomplètes – vivent avec 700 euros par mois, soit moins que le seuil de pauvreté.

À cet égard, je suis étonnée par les propos qui ont été tenus à l’Assemblée nationale. Selon le rapporteur du présent projet de loi de financement de la sécurité sociale pour l’assurance vieillesse, M. Denis Jacquat, nos compatriotes, en particulier les retraités, n’auraient pas subi la perte du pouvoir d’achat que nous dénonçons. Il a effet déclaré ceci : « Pour un indice 100 – hors tabac – en 1990, l’évolution des prix a atteint 135, 6 en 2008, contre 136, 4 pour la revalorisation des pensions de vieillesse du régime général. Il n’y a donc pas eu de perte à cet égard, même si j’ai bien conscience que nos concitoyens ressentent le contraire. »

Les femmes et les hommes que nos rencontrons dans nos permanences, notamment les retraités qui peinent à boucler leurs fins de mois, qui sollicitent même parfois l’aide de leurs enfants et qui se restreignent sur tous les postes de dépense, seront heureux d’apprendre qu’ils fantasment sur leurs difficultés.

Dans une telle situation, vous avez beau jeu de proposer, sur la base du volontariat – cela débute d’ailleurs toujours ainsi –, de reculer l’âge légal de départ à la retraite. Cette mesure vient se heurter de plein fouet à la réalité de notre pays, et à la hausse considérable du chômage. Aujourd’hui, seuls 25% des salariés âgés de plus de soixante ans sont en activité.

Pour l’immense majorité des salariés, si on passe la durée de cotisation à quarante et un ans sans avoir radicalement fait reculer le chômage des plus de soixante ans, il manquera une année de cotisation. Et quatre trimestres manquants, cela représente une perte de 10 % sur le niveau des pensions !

Madame la ministre, cette baisse programmée des pensions sera d’autant plus importante que vous avez imposé, contre l’avis de la majorité des organisations syndicales représentant les cotisants, une réforme de l’Institution de retraite complémentaire des agents non titulaires de l’État et des collectivités publiques, l’IRCANTEC, qui entérine à la fois une baisse de 30 % des pensions à venir et une hausse des cotisations.

Autrement dit, voici le message que vous faites passer aux salariés : il faut travailler plus longtemps, donc mécaniquement moins bénéficier des retraites, et cotiser plus pour moins percevoir ! Voilà votre conception du progrès ! C'est la raison pour laquelle nous voterons contre cet article.

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