Intervention de Michel Mercier

Réunion du 8 mars 2011 à 14h30
Garde à vue — Article 11

Michel Mercier, garde des sceaux :

Je suis quelque peu perplexe face à l’amendement présenté par Jacques Mézard. Je crois comprendre, même s’il ne l’a pas dit expressément, que son objectif est de donner au témoin un statut de gardé à vue pour qu’il puisse bénéficier des garanties afférentes.

Mesdames, messieurs les sénateurs, faut-il rappeler ici que la garde à vue est une mesure de contrainte très grave, qui est décidée par un officier de police judiciaire lorsqu’une personne est suspectée d’avoir commis ou tenté de commettre une infraction passible d’emprisonnement ? Si le témoin en est réduit à demander sa mise en garde à vue, il vaudrait mieux pour lui reconnaître sa culpabilité et bénéficier des garanties figurant à ce titre dans le code de procédure pénale…

Prévoir la possibilité pour la personne de demander à être placée en garde à vue pose un certain nombre de problèmes, notamment de compétence. Avec l’adoption de l’article 2 tant par l'Assemblée nationale que par le Sénat, l’article 63 du code de procédure pénale dispose désormais que seul un OPJ peut, d’office ou sur instruction du procureur de la République, placer une personne en garde à vue : il n’est pas prévu que l’on puisse « s’auto-placer » en garde à vue !

Mais la difficulté devient dirimante quand on considère un droit fondamental reconnu par la CEDH, celui de se taire. Demander à être placé en garde à vue revient à reconnaître en effet que l’on se soupçonne d’être coupable. Si tel n’est pas le cas, il suffit de se taire et, une fois le délai de quatre heures écoulé, on peut partir, l’affaire est terminée, sauf si l’enquêteur décide un placement en garde à vue.

Je n’ai pas été convaincu par les arguments présentés par M. Mézard. J’émets donc un avis défavorable sur son amendement.

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