Intervention de Josiane Mathon-Poinat

Réunion du 8 mars 2011 à 14h30
Garde à vue — Article 16

Photo de Josiane Mathon-PoinatJosiane Mathon-Poinat :

Assurer la qualité de la défense et l’effectivité des droits suppose que l’engagement de l’État soit à la hauteur de cette ambition, ce qui est loin d’être acquis en l’état actuel du financement de la justice en général, et de l’aide juridictionnelle en particulier.

En effet, si la législation française offre l’un des plus importants champs de services juridiques sous aide juridictionnelle au regard du droit comparé, le budget affecté à celle-ci est très insuffisant, puisqu’il s’élève à 300 millions d'euros, alors que le besoin de financement est communément évalué à 1 milliard d’euros.

Tout d’abord, le nombre de bénéficiaires de l’aide juridictionnelle dépend de facteurs socioéconomiques et conjoncturels non maîtrisables, mais aussi de décisions politiques ayant une incidence immédiate, telle la réforme dont nous débattons. L’effort budgétaire de l’État à ce titre doit rester une priorité, garantir l’accès au droit relevant de ses missions régaliennes.

Ensuite, en vue de préserver la pérennité et la qualité d’un système ayant pour vocation de garantir à tous un égal accès à la justice, il importe de prendre enfin conscience de la montée du mécontentement dans les barreaux et de l’insatisfaction suscitée par un système dont le fonctionnement repose essentiellement sur la bonne volonté d’une partie de la profession. Cette dernière préconise depuis longtemps une réforme en profondeur de l’aide juridictionnelle, son financement étant une problématique centrale. En particulier, la question de la rétribution des avocats intervenant en la matière a toujours été une source de tensions avec les pouvoirs publics.

Ce manque de financement nous préoccupe, car il est directement subi par le justiciable. Les conditions permettant aux avocats d’assurer une défense de qualité au titre de l’aide juridictionnelle ne sont pas réunies : l’avocat n’est pas suffisamment rémunéré et travaille à perte dans une large majorité des cas.

Si nous portons une attention particulière à ce sujet, c’est qu’une forte implication de l’avocat est nécessaire – cela n’est plus à démontrer –, s’agissant d’une matière où son rôle ne cessera de s’étendre et où le risque d’atteinte aux libertés est évident.

Il convient donc de rémunérer plus justement ces missions, afin que puissent être réunies les conditions d’une bonne défense du justiciable. À l’heure actuelle, on constate un étranglement financier, dû à la multiplication des tâches inadéquatement rémunérées.

Enfin et surtout, il est de notre responsabilité de prévoir automatiquement le financement de toutes les missions d’aide juridictionnelle supplémentaires qui découleront de l’entrée en vigueur des nouvelles lois. L’étude d’impact annexée au présent projet de loi ne satisfait nullement cette exigence, puisqu’elle prévoit un budget largement insuffisant et ne tient compte ni des régimes dérogatoires ni des retenues douanières.

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