Monsieur le secrétaire d'État, le ministère de la défense a décidé de ne plus faire appel à la société Marbot-Bata, implantée sur la commune de Neuvic en Dordogne, pour la fabrication de brodequins destinés à l’armée de terre.
Alors que cette décision condamne une usine et pénalise toute une région, les raisons techniques pour justifier ce choix sont discutables et peu convaincantes.
L’armée a en effet reconnu depuis longtemps le savoir-faire incontesté de l’entreprise périgourdine, savoir-faire qui a été breveté.
Or, aujourd’hui, le ministère de la défense préfère désormais faire appel aux services de la société allemande Meindl et de la société Argueyrolles, qui sous-traite une partie de sa production en Tunisie.
Vous imaginez très certainement l’incompréhension de la direction et le désarroi des salariés de Marbot-Bata, ainsi que leur colère de voir partir à l’étranger un contrat d’équipement destiné à nos propres forces armées, avec lesquelles cette société travaillait depuis plus de cinquante ans.
L’appel de cette décision auprès du tribunal administratif de Versailles vient d’être rejeté. Ce jugement sonne le glas de Marbot-Bata, pour qui les commandes de l’armée représentent près de 70 % de sa production. Déjà en chômage partiel, les salariés de l’entreprise, qui comprend en grande majorité des femmes, vont donc bientôt connaître le chômage tout court.
Voilà comment un obscur raisonnement sur l’ergonomie des brodequins menace la survie d’une entreprise et le maintien de soixante-quinze emplois dans un bassin économique déjà affecté par le recul de l’industrie de la chaussure. Cette décision vient après l’annonce de la fermeture programmée de l’ESCAT – l’Établissement spécialisé du commissariat de l’armée de terre – de Bergerac en 2014, dans le cadre de la restructuration des activités de défense nationale et de la révision de la carte militaire. Or ce site emploie 124 personnes, dont 113 civils.
Certes, l’armée n’a pas pour mission de créer des emplois. Le Gouvernement pourrait cependant s’abstenir de faire de cette institution un « outil à délocaliser ».
En Dordogne, les élus locaux et les citoyens s’interrogent, légitimement, sur la stratégie de l’État. N’ont-ils pas entendu le Président de la République affirmer à diverses reprises que les usines devaient rester en France ? C’est tout de même un comble de constater que, malgré les appels au patriotisme économique lancés par le chef de l’État, l’armée française délocalise ses commandes !
Monsieur le secrétaire d’État, face à cette crise qui n’épargne pas la Dordogne, département dont le taux de chômage a augmenté de 17 % en un an, frappant plus particulièrement les jeunes, je souhaiterais connaître les mesures que vous comptez prendre pour sauver cette entreprise et ainsi permettre au Gouvernement et au chef de l’État de mettre enfin en concordance leurs paroles et leurs actes.